Robots
Cookies

Préférences Cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site. Certains sont essentiels, d'autres nous aident à améliorer le service rendu.
En savoir plus  ›
Actu-Environnement

Biodiversité : et si on laissait des espaces naturels évoluer librement…

Le Conservatoire d'espaces naturels Normandie Ouest a lancé un programme régional d'espaces en libre évolution. Une manière de changer de regard sur des espaces souvent dénués de statut mais utiles pour la biodiversité.

Biodiversité  |    |  L. Radisson
Actu-Environnement le Mensuel N°394
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°394
[ Acheter ce numéro - S'abonner à la revue - Mon espace abonné ]

"Nous voulons provoquer un changement de regard sur la nature en libre évolution", explique Lydie Doisy du Conservatoire d'espaces naturels (CEN) Normandie Ouest, lors d'un atelier qui s'est tenu le 20 juin aux 9e Assises de la biodiversité à Massy (Essonne). Le Conservatoire a lancé il y a deux ans un programme régional, dénommé "Prele (1) ", destiné à améliorer l'acceptabilité d'espaces en libre évolution.

De quoi s'agit-il ? "Un espace naturel en libre évolution est un terrain pour lequel la volonté est de ne pas intervenir. Cet espace évolue librement sans usage particulier pour l'homme, quelle que soit son histoire agricole, forestière, industrielle ou autre. Ainsi, il peut désigner une friche agricole vieille de cinq ans, un fourré humide de saules ou même une forêt non exploitée depuis 50 ans", explique le Conservatoire.

Nouveauté totale à l'échelle de l'évolution

Le programme est décliné en trois axes. En premier lieu, il s'agit de sensibiliser au concept de "nature en libre évolution". Des espaces laissés sans intervention humaine suscitent bien souvent des expressions négatives ou au moins ambivalentes, explique Lydie Doisy : Le terrain est-il en friche ? Est-il abandonné ? La nature reprend-elle ses droits ? Il n'existe en effet plus d'espaces vierges de toute intervention humaine, a fortiori en Normandie. Certains peuvent associer "l'abandon" d'une parcelle à la démission de son propriétaire. Le programme fait donc appel au concept de "nature férale", c'est-à-dire des espaces façonnés par l'homme mais que l'on rend à un état "sauvage".

"C'est une nouveauté totale à l'échelle de l'évolution de laisser faire la nature", explique en effet François Sarrazin, président du conseil scientifique de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB). "La libre évolution, avant d'être un sujet de nature, est un sujet sociétal. Ses représentations, qu'elles soient positives ou négatives, découlent de représentations sociales plus profondes, liées à notre culture et notre histoire", explique Camille Royer, auteure d'une enquête sociologique exploratoire pour le CEN. Mais, en tout état de cause, "cette approche est tout sauf un retour en arrière", explique François Sarrazin, qui y voit plutôt l'opportunité d'en faire des territoires en pointe sur la conservation de la biodiversité.

Développer un réseau de sites

En second lieu, le programme Perle permet de développer un réseau de sites. "Aujourd'hui, six sites naturels sont déjà inscrits, 70 autres sont labellisables", explique Lydie Doisy. La surface des sites inscrits est pour l'instant modeste : 2,5 hectares par site en moyenne. Le programme s'adresse aussi bien à des personnes publiques que privées. L'engagement prend la forme d'une convention d'engagement, généralement sur 30 ans, signée entre le propriétaire du site et le Conservatoire, ou l'un de ses partenaires (parc naturel, Conservatoire du littoral, ONF, etc.). "C'est cet engagement dans la durée qui est le plus dur à obtenir, et paradoxalement davantage sur le domaine public", relève la coordinatrice du Prele. L'engagement peut prendre la forme d'une obligation réelle environnementale (ORE), outil contractuel créé par la loi de reconquête de la biodiversité. L'exemple en est donné par l'ORE signée il y a quelques semaines seulement entre le CEN et un agriculteur dans le Pays d'Auge ornais.

En intégrant le programme, le propriétaire d'un site s'interdit d'exploiter le bois et de faire pâturer des troupeaux. Les autres activités, telles que la lutte contre les espèces envahissantes, la cueillette, la pêche ou la chasse sont en question, explique Lydie Doisy. Ce qui se traduit concrètement par la soumission des candidatures à un comité expérimental, composé de différents partenaires du programme (institutionnels, associations, recherche, usagers, etc.). Cette instance est chargée de valider ou non les candidatures en prenant en compte les différentes caractéristiques des sites candidats, et notamment les interventions humaines qu'ils souhaitent conserver. "Les espaces permettent de conserver le potentiel évolutif de la biodiversité, de participer à la trame verte et bleue et de constituer des espaces de résilience face aux changements climatiques, en complémentarité avec des sites bénéficiant d'autres types de protection ", analyse la coordinatrice du projet.

Pas d'approche unique de protection de la nature

En dernier lieu, le programme a pour ambition de permettre une meilleure connaissance des processus dynamiques qui animent ces espaces, les universités de Caen et de Rouen figurant parmi la grosse trentaine de partenaires du programme. Les études scientifiques ne porteront pas sur un site en particulier mais, de manière plus globale, sur les processus naturels qui peuvent se développer dans ce type d'espaces.

"L'approche actuelle de la protection de la nature a beaucoup de vertu, mais ce n'est pas l'unique approche de la protection", résume Lydie Doisy. Au-delà du changement de regard recherché sur ces espaces, la coordinatrice du programme escompte un gain de biodiversité à long terme, en particulier à travers des espèces de mousses, champignons, lichens et insectes favorisées par l'absence d'intervention humaine sur ces sites. Et pourquoi pas voir même réapparaître des espèces qui avaient totalement disparu des paysages normands ?

1. Programme régional d'espaces en libre évolution

Réactions2 réactions à cet article

Cette idée a déjà été mise en pratique par l'association ASPAS, sur des sites dans le Drome et autres départements
Un autre exemple vient de Grande Bretagne avec le domaine privé de Knepp ,1400 hectares rendus à la vie sauvage .

sirius | 24 juin 2019 à 19h40 Signaler un contenu inapproprié

bonjour
j'étudie cette possibilité de mettre à disposition une partie de mon exploitation agricole...mais le volontariat doit pouvoir trouver des partenaires qui soutiennent cette action, par exemple par une souscription d'adhésion au soutien financier et de son suivi de ce projet.
Cette "affaire" ne peut seulement être basé sur le phylantropisme souhaité de certains et le simple regard extérieur des autres.
Tous doivent se sentir concerné et responsable dans les causes et les conséquences...

j'adhère...et vous | 25 juin 2019 à 19h42 Signaler un contenu inapproprié

Réagissez ou posez une question au journaliste Laurent Radisson

Les réactions aux articles sont réservées aux lecteurs :
- titulaires d'un abonnement (Abonnez-vous)
- inscrits à la newsletter (Inscrivez-vous)
1500 caractères maximum
Je veux retrouver mon mot de passe
Tous les champs sont obligatoires

Partager

Leko, système d'écoute et de suivi de la biodiversité Birdz