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Distillation du cognac : un brûleur hybride biométhane-hydrogène expérimenté avec succès

Dans le cadre de sa stratégie de décarbonation, la Maison Hennessy, productrice de cognac, a travaillé avec la société Bulane à l'adoption d'un brûleur hybride, fonctionnant au biométhane et à l'hydrogène, pour distiller ses eaux-de-vie.

TECHNIQUE  |  Energie  |    |  S. Fabrégat
Distillation du cognac : un brûleur hybride biométhane-hydrogène expérimenté avec succès
Environnement & Technique N°391
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°391
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Le projet HyD2, qui a expérimenté avec succès l'usage de l'hydrogène pour la distillation du cognac, a reçu, en mai dernier, le prix de l'industrie bas carbone des trophées Hydrogénies. Lancé par la Maison Hennessy en 2019, en partenariat avec Bulane, ce projet s'inscrit dans la politique de décarbonation de la production de cognac de l'entreprise - il faut savoir que 85 % des gaz à effet de serre émis par une distillerie proviennent de l'étape de chauffe.

Optimisation énergétique : 20 % d'économies d'énergie obtenuEs

La combustion représente 85 % des gaz à effet de serre émis lors de la production de cognac. Avant de changer de combustible, la Maison Hennessy a travaillé à l'optimisation énergétique de ses process. Un premier audit énergétique a été réalisé en 2006. Parmi les actions d'efficacité énergétique mises en place depuis : le préchauffage des vins, l'optimisation des réglages de combustion ou encore le remplacement des brûleurs atmosphériques par des brûleurs à air soufflé. Ces actions ont permis de réduire la consommation de gaz des distilleries de 20 %, indique la société. Un défi, pour un procédé de distillation inchangé depuis des siècles, et une société fondée il y plus de deux-cent-cinquante ans. En 2022, cette dernière a obtenu la certification Iso 50001 sur le management de l'énergie.

En 2020, la Maison Hennessy a d'abord fait basculer ses trois distilleries charentaises vers des contrats de fourniture 100 % biométhane, en remplacement du gaz naturel. L'objectif du projet mené avec Bulane était de tester le recours à l'hydrogène pour la distillation, afin de développer un brûleur fonctionnant au biométhane et à l'hydrogène et, à terme, uniquement à l'hydrogène. « Nous avons fondé Bulane dans l'idée que le problème n'était pas la combustion, mais la nature du combustible. Il fallait donc travailler avec des gaz différents, décarbonés, comme l'hydrogène qui peut être produit par électrolyse avec des énergies renouvelables. L'avantage : l'hydrogène est compatible avec les usages industriels et peut être utilisé sans modifier profondément les process », explique Nicolas Jerez, directeur général de l'entreprise spécialisée dans la combustion à hydrogène.

Jusqu'à 45 % d'hydrogène en volume

Après avoir développé sa technologie dans plusieurs secteurs industriels, la société héraultaise a donc accompagné la Maison Hennessy. Il s'agissait d'expérimenter, d'abord en laboratoire, puis en conditions réelles, un brûleur de chaudière hybride (biométhane/hydrogène), alimenté directement par un électrolyseur mobile, fonctionnant à l'électricité verte, achetée sur le réseau. « Le niveau d'exigence est haut avec le cognac : nous n'avions pas le droit de modifier quoi que ce soit, les conditions de distillation de l'eau-de-vie sont définies dans le cahier des charges de l'AOC (appellation d'origine contrôlée) Cognac », souligne le directeur de Bulane. Le brûlage à flamme nue fait notamment partie des exigences. Le brûleur hybride a donc été adapté pour être intégré directement à l'alambic traditionnel en cuivre.

“ L'hydrogène est compatible avec les usages industriels et peut être utilisé sans modifier profondément les process ” Nicolas Jerez, Bulane
Après des tests concluants en laboratoire, l'expérimentation a été menée en conditions réelles, sur un alambic expérimental de 12 hectolitres (contre 25 hectolitres pour un alambic traditionnel), avec une unité d'électrolyse adaptée aux besoins. « L'hydrogène atteint 45 % du mélange en volume, donc 25 % en puissance. L'électrolyseur est intégré au process, l'hydrogène est directement injecté dans le brûleur en feu continu, sans stockage », détaille Nicolas Jerez. Une condition indispensable à la fabrication du cognac, qui requiert une chauffe 24 heures sur 24 pendant toute la campagne de distillation, d'octobre à fin mars. En chauffant le vin, un premier spiritueux brut, appelé « brouillis », est extrait. La deuxième étape de distillation commence alors pour obtenir une teneur en alcool beaucoup plus élevée et, donc, l'eau-de-vie qui vieillira dans des fûts pendant plusieurs années.

« On a démontré la faisabilité du recours à l'hydrogène dans les mêmes conditions d'exploitation. Désormais, le nombre d'alambics équipés va être augmenté. Et, en 2024, le projet sera ouvert à d'autres acteurs, dans l'idée de travailler à un contrat de filière », indique le dirigeant. Près de 3 200 alambics sont actuellement exploités en France. Enfin, donnée à ne pas négliger : la qualité des eaux de vie obtenues avec ce brûleur hybride a été validée par le comité de dégustation Hennessy.

L'hybridation, une étape avant l'électrification ?

L'expérimentation a montré la faisabilité d'un recours à l'hydrogène à 45 %, sans modification des équipements. Au-delà de ce pourcentage, il faudrait faire évoluer le brûleur. Mais, estime le directeur de Bulane, vouloir tendre vers 100 % d'hydrogène n'est pas forcément pertinent aujourd'hui. « Avec cette technologie hybride, le taux d'hydrogène peut varier de 0 à 45 % du mix en volume. Il est donc possible de moduler ce taux : utiliser plus de biogaz quand l'électricité est chère, ou inversement. Les coûts d'exploitation dépendent en effet directement du coût de l'électricité, du gaz et du biogaz, explique Nicolas Jerez. En allant vers 100 % d'hydrogène, on perd la réversibilité du dispositif. Or, nous pensons qu'une phase de transition est nécessaire aujourd'hui, ce que permet l'hybridation. » A l'heure où les prix de l'énergie ont connu une grande volatilité, pouvoir moduler le recours à deux énergies apporte en effet une certaine résilience, ce que n'autorise pas une électrification totale des process.

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