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La chaleur renouvelable face au défi de la compétitivité

La programmation pluriannuelle de l'énergie prévoit de doubler la part des énergies renouvelables dans la production de chaleur en 2030. Mais le rythme actuel de développement est insuffisant, que ce soit dans les réseaux de chaleur ou dans l'industrie.

Energie  |    |  S. Fabrégat
Actu-Environnement le Mensuel N°390
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°390
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La programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) prévoit de porter la part des énergies renouvelables dans la production de chaleur à 33 % en 2020 et 38 % en 2030, contre 18,7 % en 2017. L'objectif est ambitieux : "Pour atteindre 38 %, il faudrait un rythme de développement de 800 à 850 ktep par an contre environ 500 aujourd'hui [répartis entre installations individuelles et collectives/industrielles]. Si la consommation ne baisse pas en parallèle, le rythme devra atteindre 1 Mtep par an…", souligne Nicolas Garnier, délégué général d'Amorce.

Un soutien public nécessaire pour enclencher les investissements

Mais face à la concurrence des énergies fossiles et la nouvelle épée de Damoclès sur le prix du carbone, la chaleur renouvelable peine à apparaître compétitive à court terme pour les investisseurs, qu'ils soient industriels ou collectivités. Les projets n'émergent donc qu'avec le soutien du Fonds chaleur. Résultat : la chaleur renouvelable est surtout présente dans le résidentiel. Le chauffage au bois domestique et les pompes à chaleur représentent de loin la majorité de la chaleur renouvelable produite aujourd'hui (respectivement 53 % et 21 %). La biomasse collective industrielle tertiaire couvre 17 % de la production de chaleur verte, les unités de valorisation énergétique (UVE) seulement 4 %...

Pourtant, à long terme, dans une perspective de hausse du prix des fossiles et du carbone, la chaleur renouvelable "est l'énergie renouvelable la plus efficiente d'un point de vue économique", estime Pascal Roger, président de la Fedene (Fédération des services énergies environnement). Elle est nécessaire pour décarboner la production d'énergie française. La nouvelle directive européenne prévoit d'ailleurs une hausse de 1,3 % par an de la chaleur renouvelable dans les bâtiments et de 1 % dans les réseaux de chaleur.

De nombreux acteurs demandent un coup de pouce supplémentaire pour accélérer le développement des projets. L'augmentation du Fonds chaleur, prévue dans la PPE, est saluée par tous, mais jugée insuffisante. "On demande que les aides à l'investissement soient le plus hautes possibles, avec augmentation projet par projet", précise Nicolas Garnier. Même la Cour des comptes va dans ce sens : "Il y a un déséquilibre du soutien public: 10 % de l'effort est consacré à la chaleur renouvelable contre 90 % à l'électricité", souligne Eric Allain, président de la section énergie à la Cour des comptes.

Réseaux de chaleur : aller chercher les petits ?

L'accent doit d'abord être mis sur les réseaux de chaleur, estiment les acteurs. S'ils ne constituent qu'une partie des 4.300 projets soutenus par le Fonds chaleur en dix ans (environ 800), en volume, ils représentent la majorité de la chaleur financée (70 %). De plus, il permettent de valoriser des ressources renouvelables, "qu'on ne pourrait pas aller chercher sans les réseaux, comme la géothermie profonde en Ile-de-France ou la chaleur issue de l'incinération", insiste le président de la Fedene.

"Il y a plusieurs centaines de projets de l'ordre du million d'euros dans les pipelines. On a travaillé jusque là avec les grandes collectivités, les métropoles, il faut désormais aller chercher de plus petits projets qui, certes, coûteront plus cher, mais sont nécessaires" pour éviter une fracture énergétique territoriale, analyse Arnaud Leroy, président de l'Ademe. L'agence travaille à un démarchage systématique de toutes les communes de 10.000 à 20.000 habitants qui n'ont pas de réseaux de chaleur.

Autre point d'attention : "le taux de désengagement des projets est très élevé" aujourd'hui, indique le président de l'Ademe. Le prix des énergies fossiles y est pour beaucoup, ainsi que des offres alléchantes d'opérateurs qui font capoter le business model des projets en promettant des prix bas à de gros consommateurs de chaleur, qui renoncent de fait à se raccorder au réseau. Du coup, l'équilibre économique du projet est compromis. Une hausse des aides permettrait d'éviter ce phénomène, estiment les acteurs. Un meilleur accompagnement aussi.... La taille du réseau, sa densité, son calibrage sont primordiaux pour assurer sa compétitivité.

Lever les risques et assurer la fiabilité

Autre cible prioritaire : l'industrie. Elle représente une consommation annuelle de 200 ktep, 365 jours par an. Aujourd'hui, ces besoins sont principalement couverts par les énergies fossiles. "L'industrie est à un point de bascule. Il faut lui donner les moyens d'entamer sa transition énergétique, qui est un élément de compétitivité, souligne Arnaud Leroy. Il existe une pluralité de solutions techniques ". Solaire thermique, biomasse, chaleur de récupération…

La chaleur fatale constitue un gisement important (109 tWh), qui peut être récupéré pour produire de la chaleur directe, du froid, de l'électricité, ou encore alimenter des réseaux. Mais entre le potentiel techniquement exploitable et le potentiel économiquement exploitable, la différence est grande. L'industrie, plus que tout autre acteur, est à la recherche d'un optimum économique, à court terme.

Pour Raphaëlle Imbault, présidente de l'Union des industries utilisatrices d'énergie (Uniden), elle doit avoir accès "à des technologies matures et fiables, ainsi qu' à une ressource à un prix compétitif dans la durée". Or, selon elle, ce n'est pas encore le cas pour les procédés industriels et les machines (pour ces dernières, l'électrification serait privilégiée pour les décarboner). En revanche, la chaleur renouvelable peut être utilisée pour des usages spécifiques : séchage, chauffage… Des projets voient le jour, avec le soutien du Fonds chaleur. Mais les risques financiers en freinent encore beaucoup… L'Ademe planche donc sur cette question actuellement, pour savoir comment mieux accompagner l'émergence de la chaleur renouvelable industrielle.

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