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Flexibilité des réseaux (1/4) : un indispensable de la future équation énergétique

Le développement des renouvelables va fortement accroître les besoins en flexibilité du système électrique. La Programmation pluriannuelle de l'énergie devra détailler ces besoins et les mesures à instaurer pour anticiper le déploiement des solutions.

Energie  |    |  S. Fabrégat
Flexibilité des réseaux (1/4) : un indispensable de la future équation énergétique
Actu-Environnement le Mensuel N°441
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°441
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« Le monde de l'énergie est appelé à changer considérablement d'ici à 2030 », a prévenu récemment l'Agence internationale de l'énergie (AIE). « L'essor phénoménal de certaines technologies, comme le solaire, l'éolien, les voitures électriques et les pompes à chaleur, vont remodeler notre façon d'alimenter le système, des usines aux véhicules en passant par l'électroménager et le chauffage », souligne-t-elle.

Cette transformation profonde des modes de production et de consommation questionne l'équilibre offre-demande du système électrique et la capacité du réseau à l'assurer. À l'avenir, un nouveau levier va prendre une place prépondérante : la flexibilité. Dans ses Futurs énergétiques 2050, le gestionnaire du réseau d'électricité RTE chiffre les besoins en flexibilité au-delà de 2030, lorsque les énergies renouvelables (ENR) auront une place prégnante dans le mix électrique.

Une mutation du système électrique

« L'adaptation du système électrique va être le grand défi, analyse Andreas Rüdinger, coordinateur transition énergétique à l'Iddri. L'Union européenne veut atteindre 42,5 % de renouvelables en 2030, ce qui équivaut à 70 % d'ENR électriques. Sur ces 70 %, les deux tiers seront couverts par l'éolien et le solaire. C'est une évolution massive, qui entraîne une transformation systémique. »

Pour schématiser, les systèmes électriques vont passer de moyens de production centralisés et pilotables à une multiplication de sites de production moins pilotables, avec des courbes de production variables. « Très peu d'études simulent un système énergétique européen avec un taux aussi important d'ENR », souligne Andreas Rüdinger. En parallèle, les usages électriques vont se multiplier et certains, comme la mobilité, peuvent être beaucoup moins prévisibles pour le système et peser sur l'équilibre offre/demande à certains moments clés. Il va falloir anticiper, piloter, décaler… « On va vers un système beaucoup plus réactif, volatil, avec des échanges d'informations massifs. C'est une énorme opportunité pour créer de l'intelligence collective. Mais va-t-on se réveiller à temps ? » questionne le chercheur.

“ L'adaptation du système électrique va être le grand défi ” Andreas Rüdinger, Iddri
Car l'adaptation du système doit être pensée dès aujourd'hui : disponibilité des solutions techniques, adaptation des infrastructures, mise en place d'un cadre réglementaire et incitatif… À l'occasion de la réforme du marché de l'électricité, la Commission européenne demande d'ailleurs aux États membres de plancher sur des plans de flexibilité afin d'évaluer les besoins et les solutions non fossiles pour y répondre. « La France est assez avancée par rapport à ses voisins européens et mieux lotie, grâce à son parc hydroélectrique et à ses stations de pompage-turbinage (Step) », analyse le chercheur.

Bouquets de flexibilité et mix énergétiques

De plus, RTE a réalisé un travail considérable pour chiffrer, quel que soit le scénario énergétique futur, les besoins en flexibilité du système électrique. Pilotage de la demande, de l'offre, effacement, moyens de stockage… Ils sont évalués en fonction de la part d'ENR, du nucléaire, des interconnexions… Car, selon les paramètres, les besoins en flexibilité varient en puissance, mais aussi en typologie (courte durée, long terme, activation rapide, prévisibilité…). RTE détaille les différents « bouquets de flexibilité » à déployer selon le mix énergétique développé.

Globalement, tous les scénarios tablent sur le développement de nouvelles Step, jusqu'à 3 gigawatts, qui assurent une flexibilité intersaisonnière et interannuelle. Pour la flexibilité interjournalière et intrahebdomadaire, tous les scénarios s'appuient sur une flexibilité accrue de la demande, mobilisable à moindre coût. Mais un fort développement du solaire, à la production diurne, nécessitera davantage de moyens de stockage journaliers, comme les batteries. Une forte production éolienne aura plutôt une variabilité interhebdomadaire, voire interannuelle, et nécessitera donc des moyens de stockage à long terme, comme les Step ou l'hydrogène.

Une bonne disponibilité du parc nucléaire et la construction de nouveaux réacteurs limitent les besoins en flexibilité aux Step et au pilotage de la demande. A contrario, un scénario 100 % renouvelables nécessiterait un recours à des moyens de production thermiques pilotables. Enfin, le développement des interconnexions augmente la capacité d'échange entre les pays et limite les besoins. « La France profite déjà des Step suisses, qui achètent l'électricité nucléaire la nuit pour restituer la production lors de la pointe », explique Andreas Rüdinger. RTE mise, quel que soit le scénario, sur un triplement de ces interconnexions pour réduire les coûts du système.

Un cadre pour qu'émergent les solutions

Ces scénarios vont désormais éclairer les réflexions autour de la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) qui doit définir, pour les dix à quinze ans à venir, la trajectoire de transition énergétique. « La PPE devra se positionner sur le bouquet de flexibilités vers lequel la France s'oriente et sur les modèles économiques et juridiques sur lesquels elle va s'appuyer. C'est un enjeu proche et qui était un peu impensé jusque-là », analyse Michel Gloria, délégué général de France Renouvelables.

Cette anticipation est indispensable. « Si on loupe le pilotage de la recharge électrique, on passe à côté d'un volet important de flexibilité », estime Michel Gloria. Pire : « Non pilotée, la mobilité électrique peut constituer une charge énorme pour le réseau, avec un déploiement de charges rapides, ou au contraire constituer un énorme gisement de flexibilité, avec le vehicle-to-grid », souligne Andreas Rüdinger. Idem pour les pompes à chaleur : leur fort développement pourrait augmenter de plusieurs gigawatts la pointe de consommation hivernale en 2030, sans rénovations performantes et sans pilotage.

Réactions1 réaction à cet article

Il y a un non-dit monstrueux dans ces discours : qui va payer ?
Actuellement, pour complaire aux diktats des opérateurs financiers et de l'Europe, c'est RTE donc le citoyen qui payent le renforcement et le raccordement des réseaux : les sites de production intermittentes étant dans des zones a priori peu peuplées, le réseau est soit inexistant (offshore), soit sous-dimensionné (campagnes).
Quand le volume de production intermittentes sera tel que la flexibilité des moyens pilotables (hydraulique, nucléaire) deviendra insuffisante pour absorber sa divagation, comment seront financés les moyens de back-up requis pour pallier l'intermittence (au bas mot, une semaine de consommation nationale si on veut garantir la disponibilité), à ce jour forcément des batteries, et garantit-on que la mine de matériaux nécessaires sera disponible, et provenant de pays "recommandables" ?
La réduction à volonté du régime des centrales, même si elle est -et heureusement- possible renchérit le coût de l'électricité produite, une centrale coûte autant à 100% ou à 20% de puissance : qui va payer ce différentiel ?
Les intermittentes sont entrées dans notre paysage aux forceps, sans aucune nécessité, pour des motifs tout sauf écologiques ou économiques (financiers d'abord, géopolitiques, dogmatiques, etc.), il serait inadmissible que ce soit le consommateur qui paye !

dmg | 24 novembre 2023 à 09h22 Signaler un contenu inapproprié

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