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Limitation des agrocarburants en Europe : le parlement veut aller plus loin

La députée européenne Corinne Lepage a présenté les modifications législatives qu'elle comptait défendre au Parlement européen concernant les agrocarburants. Le changement d'affectation des sols est au cœur des calculs proposés.

Energie  |    |  F. Roussel

En octobre dernier, la Commission européenne a proposé via la modification de deux directives de freiner l'incorporation des agrocarburants de première génération. Le parlement européen a commencé à analyser la proposition de la Commission. Ces travaux se traduisent par un projet de rapport (1) présenté aujourd'hui par Corinne Lepage dans lequel la député européenne renforce le texte de la commission (2) .

Alors que la commission propose un plafonnement à 5% des biocarburants issus de cultures alimentaires pour le calcul des objectifs d'EnR dans les transports (3) et un "reporting" des émissions liées au changement d'affectation des sols, la député propose de modifier la comptabilité carbone de ces carburants afin de mieux rendre compte des réductions de gaz à effet de serre liées à leur utilisation. L'idée est de renforcer les critères de durabilité fixés aux agrocarburants sous forme de niveaux minimaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) en intégrant les émissions liées au changement indirect d'affectation des sols (CASI) dans le calcul des réductions attribuées aux agrocarburants. "Une politique destinée à réduire les émissions de GES ne saurait être fondée sur une comptabilité tronquée et ne saurait promouvoir le soutien à de pratiques qui en réalité augmentent les émissions de GES", explique la député.

10 Mds d'euros de soutien en Europe

Selon l'étude de l'Institut international du développement durable (IISD) intitulée "Biofuels - At What Cost ? A review of costs and benefits of EU biofuels policies", les États européens ont soutenu à hauteur de 10 milliards d'euros en 2011 l'industrie des agrocarburants sous forme d'exonérations fiscales (payées par les citoyens : 5,8 Md€), d'obligations d'incorporations (payées par les automobilistes : 318 - 736 millions € pour l'éthanol et 3,1 - 4,1 Md€ pour le biodiesel) et de financement de la R&D (52 millions €). Des investissements fortement critiqués en période d'austérité budgétaire.

"Selon la Cour des Comptes, l'exonération fiscale dont ont bénéficié les producteurs d'agrocarburants français entre 2005 et 2010 a coûté à l'Etat plus de 2,6 Md€", déclare Clara Jamart d'Oxfam France. "Alors que beaucoup de pays européens arrêtent les exonération de taxes, le gouvernement Ayrault a décidé en octobre 2012 de renouveler pour trois ans cette niche fiscale intolérable", ajoute-t-elle.
La député rappelle que la méthode de calcul actuelle utilisée par la Commission se base sur des valeurs CASI les plus basses par rapport aux autres études. "L'effet CASI" serait estimé à 38,4 gCO2eq/MJ d'agrocarburants alors que l'étude française Ademe-Inra notamment, publiée en 2012, l'estime en moyenne à 72 gCO2eq/MJ. La commission est donc invitée à travailler sur une méthodologie visant à intégrer ce critère dans ses calculs. "La science derrière le calcul de l'effet CASI est en effet assez solide pour être intégrée dans la législation. Les incertitudes normales résultant de la modélisation ne sauraient être utilisées comme une excuse pour nier le problème et pour ne pas agir", souligne la député.

Le rapport parlementaire prévoit toutefois d'exonérer les biocarburants cultivées sur des terres nouvelles, auparavant non cultivées qui ne se verraient pas attribuer d'émissions au titre du facteur CASI. Mais il estime nécessaire de prévoir un facteur CASI aux cultures énergétiques non alimentaires.

Protection du tissu industriel déjà existant

Afin de "préserver les investissements effectués en vue de la production de biocarburants de la première génération et les emplois afférents", le rapport parlementaire prévoit d'exempter de la prise en compte du facteur CASI un volume de production équivalent au niveau de production de 2012 soit un taux d'incorporation de 5%. Seules les productions supérieures à venir seraient affectées et par conséquent comptabilisées de façon moindre dans les objectifs d'incorporation.

Passage aux agrocarburants de seconde génération

Pour favoriser le développement des agrocarburants de deuxième et troisième générations, la Commission souhaite que leur contribution soit décomptée de manière avantageuse. Elle a donc attribué des facteurs 2 et 4 à certains de ces agrocarburants. Une proposition globalement validée par le rapport parlementaire. Mais Corinne Lepage s'inquiète de la disponibilité des matières premières concernées et propose la mise en place de plusieurs "garde-fous" visant à ne pas "répéter les erreurs faites avec la première génération". Les déchets et la biomasse forestière sont particulièrement visés : "l'utilisation de bois pour la fabrication de biocarburants ne saurait être justifiée que dans les zones dans lesquelles la croissance forestière est suffisante pour répondre aux usages existants et à la demande additionnelle sans compromettre la gestion durable des forêts", peut-on lire dans le rapport.

De nouveaux objectifs pour les Etats membres

Afin d'encourager l'utilisation d'électricité d'origine renouvelable dans le secteur des transports, le rapport propose l'instauration d'un sous-objectif de 1,5% pour l'électricité. "Cet objectif est réaliste puisque les projections nationales des Etats-membres prévoient déjà un niveau de 1,4% pour 2020", commente Corinne Lepage. En complément, un objectif de 12% d'efficacité énergétique dans ce même secteur devrait être fixé, afin "d'encourager au sein des Etats membres une réflexion sur la politique des transports".

Enfin, afin de rendre plus facile pour les fournisseurs de carburants l'atteinte de 6% de réduction des émissions de GES prévue par la Directive 98/70/CE sur la qualité des carburants, le rapporteur propose de repousser cet objectif à 2025 (au lieu de 2020).

1. Lire le rapport
http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//NONSGML+COMPARL+PE-508.236+01+DOC+PDF+V0//FR&language=EN
2. Lire la proposition initiale de la Commission européenne
http://europa.eu/rapid/press-release_IP-12-1112_fr.htm
3. La directive européenne sur les énergies renouvelables fixe un objectif de 10% d'EnR dans le secteur des transports.

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