''Il est probable que les mesures prévues dans le Grenelle 2, restant basées sur des incitations fiscales et l'approfondissement du diagnostic de performance énergétique, ne seront pas suffisantes pour relever'' le défi de la réduction des consommations énergétiques du bâtiment.
C'est ce que révèle l'étude Habitat facteur 4 (1) présentée par le club d'ingénierie prospective énergie et environnement (CLIP) le 6 janvier dernier, qui rappelle que l'habitat constitue 30 % de la consommation totale d'énergie finale en France.
Pour parvenir à une réduction par 4 des émissions de CO2 dans l'habitat à l'horizon 2050, l'étude insiste sur l' ''importance d'opérations de réhabilitation programmées à large échelle, allant bien au-delà des instruments incitatifs disponibles actuellement''. Ainsi, le rythme de réhabilitation devra être plus soutenu que ne le prévoit le Grenelle (600.000 contre 400.000 fixées par la loi) et les technologies les plus performantes devront être généralisées.
Isolation et ventilation : 60 % de l'effort de réduction des consommations dans l'ancien
Le parc résidentiel en 2050
En 2050, la France comptera 70 millions d'habitants. A comportement constant, la taille moyenne des ménages devrait décroître de 2,3 personnes à 2 personnes. Il y aura donc quelque 35 millions de résidences principales, contre 26 millions en 2006. La surface habitable devrait croître, de 38 m2 par personne à 45 m2 en 2050.
L'étude souligne néanmoins que les modes d'habiter pourraient changer d'ici quarante ans, impulsés par l'évolution des revenus et des prix notamment.
Or, d'ici 2050, le parc existant devrait connaître deux cycles de rénovation des équipements technologiques et un cycle de rénovation, note l'étude qui préconise donc d'intégrer les solutions les plus performantes lors de ces travaux.
La première étape porte sur ''la généralisation à l'ensemble du parc de construction antérieure à 2001 de l'isolation thermique par l'extérieur en priorité, lorsque les caractéristiques architecturales l'autorisent, d'équipements de ventilation contrôlée, des vitrages à isolation renforcée'', travaux qui devraient permettre de ''réduire en moyenne de 60 % les besoins en maison individuelle comme en immeuble collectif''.
Les experts estiment le coût de cet effort de réhabilitation entre 12.700 et 24.200 € HT par logement, hors rénovation des équipements énergétiques et de ventilation.
Trois énergies priorisées : le bois, le gaz et l'électricité
Pour la production de chauffage et d'eau chaude, l'étude privilégie trois énergies (bois, gaz et électricité) associées aux ''technologies les plus performantes'' : substitution aux chaudières existantes et aux convecteurs électriques de pompes à chaleur électriques, de cogénération à gaz, de mini réseaux de chaleur valorisant la biomasse…
Le solaire thermique pour la production d'eau chaude, qui ''peut contribuer à 50 % des besoins'', pourrait être appliqué à 30 % du parc existant et généralisé dans le neuf (hors parc équipé au bois, avec appoint gaz, effet Joule ou pompe à chaleur).
Pour les logements construits après 2020, l'étude considère que, selon les objectifs du Grenelle, l'ensemble des bâtiments seront à énergie positive, la production d'électricité photovoltaïque interviendra donc en compensation des consommations électriques.
Les experts passent ensuite en revue quatre scenarii afin d'évaluer le potentiel maximal de chaque solution énergétique retenue : priorité au bois puis au gaz quand l'électricité apparaît en ultime choix (bois/gaz/élec), et selon la même logique, bois/élec/gaz, gaz/bois/élec ou élec/bois/gaz. Dans ces quatre scenarii, le bois est favorisé et apparaît soit en premier choix d'énergie, soit en deuxième. Ces trois énergies sont successivement généralisées dans leur champ d'application, selon des règles d'affectation dépendant de la localisation (rural/urbain), de la présence ou non de réseau de chaleur et de la desserte en gaz. ''L'objectif est de rechercher, à partir de ces scénarii tranchés, quelles sont les conditions technologiques les plus favorables à l'obtention du facteur 4''. L'étude conclut que ''le facteur 4 sur les émissions de CO2 n'impose pas un facteur 4 sur l'énergie finale, ni en énergie primaire, sous réserve de disposer d'énergies peu carbonées pour couvrir les besoins énergétiques''.