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Flexibilité du réseau (2/4) : anticiper le pilotage de la demande et mobiliser les bons gisements

Le pilotage de la demande jouera un rôle important dans le système électrique de demain. Mais pour actionner ces outils, il faudra mettre en place les bons signaux tarifaires et anticiper l'installation d'équipements adaptés.

Energie  |    |  S. Fabrégat
Flexibilité du réseau (2/4) : anticiper le pilotage de la demande et mobiliser les bons gisements
Actu-Environnement le Mensuel N°441
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°441
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« En permettant d'adapter en partie la demande à la production disponible, qui dépendra elle-même de plus en plus des conditions météorologiques, la flexibilité de la demande apparaît comme un levier pour limiter la construction de moyens de production ou de stockage », estime RTE dans ses Futurs énergétiques 2050. Décaler certaines consommations permettrait de réduire jusqu'à 7 gigawatts (GW) la demande moyenne aux heures de pointe et de l'augmenter de 10 GW durant les heures les plus creuses, estime le gestionnaire de réseau.

L'association Luciole, qui regroupe des PME engagées dans la transition énergétique, estime qu'il est possible de mobiliser 10 GW de demande flexible dès 2030. « La France a plutôt été en pointe dans les années 1980 avec les tarifs EJP/Tempo et, depuis une dizaine d'années, avec les travaux sur l'effacement, explique Cyprien Videlaine, pricing manager chez Eqinov. Mais si l'Hexagone est aujourd'hui plutôt en avance en Europe, c'est aussi parce que les autres pays sont en retard sur ce sujet ! Il reste de nombreux freins à lever pour développer cette flexibilité à la hauteur des besoins. »

Des tarifs plus proches du réel

Plusieurs leviers rendent la demande plus flexible et chacun répond à un besoin précis. Le premier n'est pas nouveau, mais il doit être adapté à la future donne énergétique. Il s'agit des tarifs de fourniture qui permettent de structurer la courbe de la demande autour des heures pleines/heures creuses. Ces signaux tarifaires permettent également de piloter certains équipements. Ainsi, le pilotage des trois quarts du parc des chauffe-eau électriques évite des appels de puissance de 2 GW en moyenne aux heures de pointe, estime RTE. « Un travail important est aujourd'hui à effectuer pour faire évoluer ces tarifs, note Cyprien Videlaine. On constate déjà que les surplus de production arrivent plutôt l'après-midi que la nuit en dehors de la période hivernale, en raison de la production photovoltaïque. Ce phénomène va s'accentuer dans les prochaines années. »

L'objectif est donc d'adapter les tarifs heures pleines-heures creuses aux nouvelles périodes de tension, et de tendre vers une tarification plus dynamique, correspondant aux réalités de la production. Quelques fournisseurs ont déjà diversifié leurs offres avec des « heures super-creuses » ou des offres « week-end ». Mais il ne s'agit que des prémices de ce que pourrait être une tarification plus dynamique. Un arrêté doit encore venir préciser l'obligation, pour les fournisseurs de plus de 200 000 sites, de proposer au moins une offre de ce type.

“ On constate déjà que les surplus de production arrivent plutôt l'après-midi que la nuit, en raison de la production photovoltaïque ” Cyprien Videlaine, Eqinov
Des travaux sont également en cours pour piloter d'autres équipements résidentiels. Le ministère de la Transition énergétique a engagé, avec les parties prenantes, une réflexion « pour mieux interconnecter les différents équipements des foyers (chauffage, climatisation, chauffe-eau, machines à laver, bornes de recharge automobile, etc.) et aboutir à un pilotage plus fin de la consommation d'énergie ».

Piloter à la baisse… et à la hausse

Le deuxième levier est justement le pilotage de la demande. La France s'est jusque-là surtout appuyée dessus pour gérer les jours de tension, avec l'effacement industriel (3 GW aujourd'hui), et plus récemment l'effacement diffus. Mais pour Cyprien Videlaine, il est possible d'aller beaucoup plus loin « en pilotant également la demande à la hausse pour répondre au profil de production et placer les consommations au meilleur moment ». RTE, Enedis et Eqinov mènent actuellement une expérimentation sur ce sujet, afin d'évaluer l'intérêt de cette nouvelle flexibilité.

De nouveaux gisements peuvent être développés. « On peut automatiser le pilotage des pompes à chaleur, des chauffages, des ventilations, de la production d'eau chaude via la gestion technique des bâtiments (GTB) dans le tertiaire. Ce gisement permet de réaliser des décalages de consommation proches du temps réel, alors que l'effacement industriel est plutôt programmable à l'avance. Idem pour la recharge des véhicules électriques », explique l'expert d'Eqinov.

Si le chauffage est pilotable plusieurs minutes à plusieurs heures en fonction de l'usage et des caractéristiques du bâtiment, les véhicules sont activables en quelques minutes en voirie pour gérer les situations d'urgence et pendant plusieurs heures dans le tertiaire pour lisser la demande. Là, le gisement d'effacement a été estimé à 6 GW aux heures de pointe par la Commission de la régulation de l'énergie (CRE).

Déployer les bons équipements

En théorie. Car en pratique, très peu de ces équipements sont réellement pilotables. « Peu de bâtiments sont équipés de GTB et, lorsqu'ils le sont, ces équipements sont peu communicants, voire fermés. Il faut développer des protocoles de communication pour accéder à ce gisement à bas coût. » La réglementation prévoit d'équiper les bâtiments tertiaires de GTB à partir de 2025, mais sans envisager leur pilotage.

Même enjeu du côté des bornes de recharge : « Beaucoup de bornes installées, notamment sur la voie publique, ne sont pas communicantes », regrette l'expert d'Eqinov. Pourtant, selon RTE, 70 à 80 % des recharges électriques sont réalisées en temps non contraint, c'est-à-dire qu'il serait possible de les décaler aux heures creuses, sans impact pour les utilisateurs.

Par ailleurs, si l'effacement est actuellement valorisé sur le mécanisme de capacité et à travers un appel d'offres spécifique, les incertitudes réglementaires de ces mécanismes pèsent sur le développement de la filière. « Les différents acteurs doivent trouver un intérêt économique au pilotage de la demande. Il faut des mécanismes bien définis avec une visibilité sur les règles et le niveau de rémunération à moyen terme pour développer les gisements, estime Cyprien Videlaine. Il faudrait également différencier les types de flexibilité (dynamique, structurelle) et les gisements, qui n'ont pas les mêmes coûts de déploiement et ne répondent pas aux mêmes besoins. »

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