Pour ce faire, les sénateurs confirment qu'il leur apparaît nécessaire de créer une organisation des Nations-Unies spécialisée dans les problèmes de l'environnement. Cet organisme, qui pourrait être pris en charge dans un premier temps par la FAO, aurait trois tâches principales : assurer la gestion du futur mécanisme de surveillance mondial de la biodiversité (Imoseb) qui serait l'équivalent pour la biodiversité du Groupe intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC/IPCC), mener une action d'unification du droit international de la biodiversité et du contrôle des normes dans ce domaine et agir comme une agence de moyens en fédérant l'ensemble des actions internationales menées en faveur de la biodiversité, en particulier dans les pays en voie de développement. Cette action pourrait s'appuyer de façon plus systématique sur les grandes ONG internationales qui seraient garantes de la bonne fin des projets, précise le rapport.
Les sénateurs proposent également d'activer la protection de la forêt tropicale dans les mécanismes de la deuxième phase du protocole de Kyoto. Actuellement, les mécanismes de Kyoto y contribuent, mais partiellement, par les « mécanismes de développement propre » (MDP) destinés aux pays en voie de développement. Ceux-ci ne rendent éligibles au marché des émissions que les actes professionnalisés de déboisement/reboisement mais excluent les actions portant sur la conservation des forêts existantes. L'éligibilité de ces actions au mécanisme de Kyoto permettrait aux entreprises des pays adhérents de financer des projets de conservation de la forêt tropicale, note le rapport.
Les auteurs proposent aussi de créer une taxe internationale sur le transport de produits issus de la biodiversité et non-certifiés même s'ils se disent conscients des difficultés de mise en œuvre de cette mesure.
Les deux sénateurs réclament par ailleurs un moratoire européen sur la progression de l'utilisation des biocarburants** après 2012, en attendant la maturité des biocarburants de deuxième génération (catalyse enzymatique de la filière ligno-cellulosique) ou de troisième génération (micro-algues). L'objectif européen d'inclure d'ici 2012, 5,75% de biocarburants dans les combustibles automobiles partait d'une excellente intention, assurent-ils. Mais sa réalisation a eu des effets pervers tant sur la biodiversité européenne que sur la biodiversité mondiale, estiment-ils.
Rappelons qu'à l'occasion de cette dernière table ronde des Grenelle, Jean-Louis Borloo a annoncé une expertise sur le bilan écologique et énergétique des agrocarburants de première génération (issus de cultures destinées à l'alimentation), confiée à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME). Les efforts de recherche et développement concernant les agrocarburants de deuxième génération seront par ailleurs intensifiés. Mais pour l'instant l'objectif français (7 % d'incorporation d'ici à 2010, 10 % d'ici à 2015) n'a pas été modifié.
Parmi les autres propositions des sénateurs, on notera le lancement d'un programme de recherche sur les conséquences du changement climatique sur la façade méditerranéenne de l'Europe, la création d'un marché de la compensation des atteintes aux milieux naturels, l'accroissement du rôle des agriculteurs dans la protection des écosystèmes et la mise en place d'une labellisation européenne des produits issus de la biodiversité. Ces labels pourront ultérieurement faire l'objet de négociations auprès de l'OMC pour valoriser l'exploitation durable de la biodiversité dans le commerce mondial, précise le rapport.
Il faudrait également, selon le rapport mieux recenser et protéger la biodiversité ultramarine de la France et notamment supprimer les excès de l'exploitation minière en Nouvelle-Calédonie et en Guyane et appliquer les accords internationaux conclus par la France qui ne s'applique pas.
Enfin, les sénateurs estiment souhaitable d'entamer une réflexion sur l'environnement fiscal des milieux naturels et d'insérer les services rendus par les écosystèmes dans le calcul économique. L'instauration progressive d'une taxe pollueur-payeur (assise notamment, mais pas exclusivement, sur la production de produits chimiques, d'engrais et de produits phytosanitaires) valoriserait, a contrario, le respect de la biodiversité dans le calcul économique, indique notamment le rapport.
Ces dix propositions seront soumises aux groupes de suivi du Grenelle que le Parlement a créé pour veiller à la préparation de la future loi sur l'environnement.
Cette étude est le complément de celle déjà adoptée sur le changement climatique et la crise énergétique.
*La biodiversité : l'autre choc ? l'autre chance ?