Sale temps pour le solaire thermique. Après avoir connu une chute de 15 % en 2009, le marché français du solaire thermique a connu une nouvelle baisse en 2010 (3,4 %). La forte progression des années 1998 à 2006 (40 % par an) a été suivie d'un net ralentissement, avant de connaître une baisse. Cette tendance est partagée en Europe (-10 % en 2009, -13 % en 2010), avec de fortes différences selon les pays (Italie : +3,2 %, Royaume-Uni : +18,1 %).
Aujourd'hui, la France représente 7 % du marché européen du solaire thermique, loin derrière l'Allemagne (31 %) et l'Italie (13 %). Quant à la capacité installée par habitant, la France fait partie des mauvais élèves de l'UE avec moins de 25 kilowatts thermiques (kWth) pour 1.000 habitants contre plus de 600 kWth/1.000 hbts à Chypre, plus de 300 kWth/1.000 hbts en Autriche…
La crise est passée par là, mais pas seulement. Concurrence du solaire photovoltaïque et d'autres énergies renouvelables (EnR), manque d'incitations financières et de volonté politique expliquent le manque de dynamisme du marché français.
Un marché porté par les bailleurs sociaux
En 2010, la capacité installée en France était de 1.101.730 kWth. Si le nombre d'installations dans le collectif est en augmentation, les applications individuelles sont en diminution. En 2009, les chauffe-eau solaires individuels ont baissé de 14 % (36.000 CESI vendus en 2009 par rapport à 42.000 en 2008), les systèmes solaires combinés de 56 % (2.500 SSC vendus en 2009 par rapport à 5.800 en 2008). Seuls les chauffe-eau solaires collectifs ont connu une hausse de 19 % (68.000 m2 de capteurs installés en 2009 par rapport à 56.000 m2 en 2008). La tendance a été la même en 2010 : ''on observe une diminution sur le marché du particulier et une croissance continue sur le marché collectif'', indique Philippe Gay, coordinateur de mission chez Enerplan.
Autre projet : au Danemark, le réseau de chaleur de Marstal est alimenté par 18.300 m2 de panneaux solaires qui fournissent 40 % de la chaleur des 1.500 usagers du réseau. Une chaudière biomasse et mazout complètent le dispositif.
Dans le collectif , le marché est avant tout porté par les bailleurs sociaux et les dispositifs de soutien mis en place par les pouvoirs publics, notamment le fonds chaleur. Mais comme pour le marché des particuliers, dans les projets collectifs, ''l'effet photovoltaïque taille des croupières au thermique : les tarifs d'achat attractifs attirent les investissements dans ce secteur''.
RT 2012 : un rendez-vous manqué
Le Grenelle de l'environnement prévoit que le solaire thermique passera de 27.000 tep (tonnes équivalent pétrole) en 2006 à 900.000 tep en 2020, soit au total plus de 4 millions de logements équipés, , avec un objectif intermédiaire en 2012 de 185.000 tep. En 2009, le solaire thermique représentait 81.000 tep. On est encore loin de ces objectifs…
La nouvelle réglementation thermique (RT 2012) aurait bien pu changer la donne mais elle ne devrait avoir finalement que très peu d'impact sur le solaire thermique. ''Le CLER souhaitait que le solaire thermique devienne obligatoire dans le cadre de la RT 2012. C'était initialement prévu mais au cours des discussions le texte a été modifié et prévoit désormais un objectif d'intégration des énergies renouvelables. Le solaire thermique se trouve donc en compétition avec les pompes à chaleur, la cogénération, dont le temps de retour sur investissement est plus court et les incitations nombreuses. On est donc sceptiques quant à un décollage futur'', explique Joël Vormus.
Selon lui, le manque de succès du solaire thermique tient au fait que cette énergie est décentralisée ''à l'extrême''. ''Or la France a l'habitude de la centralisation. Les appels d'offres éolien offshore, photovoltaïque le montrent bien''. Les gros investisseurs ont également peu d'intérêt à se lancer dans cette énergie qui, finalement, est surtout destinée aux particuliers.