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Les négociations échappent à la Convention-cadre de l'ONU

Climat : comment 2010 a établi une nouvelle donne Actu-Environnement.com - Publié le 04/01/2011
Climat : comment 2010 a établi une...  |    |  Chapitre 4 / 7
Si la négociation climatique onusienne reste la voie privilégiée, d'autres enceintes ont pris une importance croissante depuis dix ans. Des négociations jugées plus efficaces par certains mais qui évincent certains acteurs importants.

À la suite de l'échec de la conférence de Copenhague, certains négociateurs, dont le président français Nicolas Sarkozy, n'ont pas hésité à critiquer le mode de décision des négociations climatiques officielles. Selon eux, il serait impossible d'atteindre l'unanimité à 194 Etats sur un sujet aussi complexe. Une des voies proposées consiste donc à réunir autour d'une même table un nombre restreint de pays afin de progresser plus rapidement. Si ces Etats, en l'occurrence les principaux pays émetteurs de CO2 représentant quelques 80% des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), s'accordent sur des politiques de lutte efficaces, alors il deviendrait possible d'adopter une stratégie globale efficace. Les décisions validées dans ces discussions parallèles pourraient ensuite être officiellement adoptées par la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC.)

Si l'idée est séduisante, elle suscite cependant des craintes de la part de certaines parties aux négociations officielles. La principale critique concerne le manque de transparence puisque ces négociations parallèles ne regroupent pas l'ensemble des pays concernés et les ONG. En effet, peu d'éléments filtrent de ces discussions, les décisions sont prises à huis clos et les organisateurs rechignent à y intégrer les parties les plus vindicatives.

L'administration Bush impulse le mouvement

Si les discussions informelles ont toujours existé, l'annonce en mars 2001 par George W Bush du refus de son Administration de ratifier le protocole de Kyoto marque un tournant. L'annonce s'accompagne d'une proposition de collaboration visant à lutter contre les changements climatiques par "d'autres moyens" que ceux proposés par le protocole.

En juillet 2005, le Partenariat Asie Pacifique pour un développement propre et le climat (APP) vient matérialiser cette volonté américaine. Il rassemble notamment les Etats-Unis, la Chine, le Japon et des acteurs du secteur privé. L'objectif est de réduire l'intensité carbone des économies participantes grâce à des transferts de technologie bas carbone volontaires. Le Partenariat se démarque ainsi du protocole qui cherche à réduire en valeur absolue le volume d'émissions de GES des pays développés.

La seconde initiative de l'Administration Bush voit le jour en mai 2007 avec la création de la Rencontre des grands émetteurs (le MEM pour Majors Emmiters Meeting renommé ensuite Majors Economies Meeting) qui réunit un peu plus d'une quinzaine d'Etats, ainsi que des représentants de l'ONU, représentant environ 80% des émissions mondiales. L'objectif est de "compléter les activités en cours à l'ONU" en réfléchissant à une nouvelle forme d'engagement international post 2012. La voie privilégiée sera l'approche sectorielle qui vise à établir, pour les principaux secteurs industriels, des accords de branche interdisant les technologies les moins efficaces afin de placer tous les sites d'un même secteur sur un pied d'égalité. L'idée est soutenue par les industriels qui y voient un moyen d'empêcher les délocalisations vers des pays n'imposant pas de restriction des émissions de GES. Cependant, le MEM n'a jamais donné de résultat concret car les pays émergents considèrent l'approche sectorielle comme une tentative pour leur imposer des réductions d'émissions masquées. Par ailleurs, pour les ONG, le MEM est perçu comme une tentative des Etats-Unis pour rompre l'isolement dans lequel ils se trouvent suite au refus de ratifier le protocole. Finalement, bien qu'opposée à la démarche onusienne, l'Administration Bush signera en 2007 le Plan d'action de Bali qui lance les négociations officielles pour l'accord post 2012.

L'arrivée au pouvoir de Barack Obama au début de l'année 2009 ne change pas foncièrement la donne. Le Forum des économies majeures (MEF) remplace le MEM de l'Administration Bush et réuni les mêmes acteurs autour du même objectif : nourrir les négociations onusiennes. Avec la création d'un Partenariat global sur les technologies décarbonées, l'angle technologique reste très marqué. La principale innovation, par rapport à l'initiative de George W Bush, est apparue en 2010, lorsque le FEM a invité cinq pays en développement, dont l'Éthiopie qui représente l'Afrique dans les négociations et le Bengladesh un pays particulièrement vulnérable, lors d'une réunion de préparation de Cancún.

Finalement l'échec de Copenhague illustre aussi bien les faiblesses du système onusien que l'incapacité des forums restreints à y remédier. Paradoxalement, cet échec a entraîné une multiplication de ces enceintes.

2010 marque l'apparition de nouveaux forums…

L'année 2010 a été marquée par l'émergence du Dialogue de Carthagène, une nouvelle enceinte de négociation officieuse. Elle a réuni, à l'occasion de trois rencontres, un nombre croissant d'Etats issus de l'ensemble des grands groupes de négociation à la CCNUCC autour d'un objectif commun : faciliter l'obtention d'un accord dans le cadre des négociations officielles. Réunissant actuellement environ 30 pays, le Dialogue cherche à obtenir un consensus autour des éléments clés du futur accord et laisse le soin au 195 parties à la Convention-cadre d'établir les détails. Plus représentatif de la diversité des pays impliqués dans les négociations climatiques, le Dialogue semble plus enclin à aborder l'ensemble des sujets importants tels que l'adaptation qui est laissée de côté dans les forums initiés par les Etats-Unis. Néanmoins, à la veille de Cancún, le Dialogue n'a abouti qu'à un consensus mou qui n'allait pas au-delà des bonnes résolutions de principe appelant à "des progrès substantiels à la COP 16, sous forme de décisions équilibrés."

De même, en réaction au sommet de Copenhague, la Bolivie a lancé une initiative visant à lutter contre les changements climatiques sur la base d'une remise en cause du capitalisme. Une position radicale et très peu partagée en dehors de certains pays d'Amérique du Sud. Après avoir été à la pointe de l'opposition à l'Accord de Copenhague, le président bolivien, Evo Morales, avait invité l'ensemble des parties prenantes à participer à une Conférence mondiale des peuples sur le changement climatique organisée à Cochabamba. Diamétralement opposée aux initiatives des Etats-Unis, la Conférence de Cochabamba a appelé la création d'un tribunal international, a défendu la notion de dette climatique et a milité pour un referendum mondial sur le climat. Là aussi, l'objectif était d'alimenter les négociations officielles et à Cancún la Bolivie a défendu, sans succès, les positions adoptées par les conférenciers.

… très spécialisés

Par ailleurs, des groupes restreints se sont créés autour de sujets précis. C'est notamment le cas du Partenariat REDD+, lancé en mars 2010 à l'initiative de la France et de la Norvège qui réunit une quarantaine d'Etats afin de progresser dans la lutte contre la déforestation tropicale. Les initiatives développées par le Partenariat vise à nourrir les négociations officielles en apportant des exemples concrets. Cependant, l'efficacité de la démarche est loin d'être prouvée. En effet, depuis les négociations onusiennes de Tianjin (Chine) en octobre 2010, les participants n'ont eu de cesse de s'affronter. Au cœur des tensions se trouvaient, les discussions concernant la place de la société civile. La Papouasie Nouvelle-Guinée, qui co-préside le partenariat avec le Japon, a semble-t-il été particulièrement virulente s'opposant à ce que les ONG participent activement aux négociations. Finalement, la rencontre du Partenariat s'est limitée à la réunion d'ouverture et les participants se sont quittés sans même avoir validé l'ordre du jour composé de deux uniques points. Pour certains observateurs, comme la Coalition for Rainforest Nations, la question de la participation des ONG serait instrumentalisée par les pays donateurs pour éviter d'aborder le sujet qui fâche : l'absence de versements financiers significatifs alors que le Partenariat devait être doté de 4 milliards de dollars pour la période 2010-2012. Au-delà des débats sans fin sur les financements, il semble que la négociation ne soit pas simplifiée par la limitation du nombre de participant et le Partenariat apparaît aujourd'hui comme un processus opaque et à l'arrêt.

De la même manière, l'ONU a créé un Groupe consultatif sur le financement des changements climatiques, chargé de réfléchir à des financements alternatifs qui pourraient être levés à partir de 2020 pour alimenter de 100 milliards de dollars par an le fonds prévu par l'Accord de Copenhague. Le rapport a été remis début novembre 2010 et préconise principalement de recourir à de nouvelles taxes et des investissements privés. Reste qu'il n'y a pas d'accord réel sur la portée de ce rapport : les pays industrialisés souhaitent qu'on en tienne compte, alors que les pays en développement rappellent qu'il travaille en dehors de la CCNUCC et regrettent qu'il s'appuie sur des financements privés difficilement prévisibles à long terme.

Philippe Collet

© Tous droits réservés Actu-Environnement
Reproduction interdite sauf accord de l'Éditeur.

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