
L'essor de l'éolien dépend toutefois encore étroitement des aides publiques. L'analyse du marché de l'éolien dans les années récentes laisse penser que cette filière s'étend dans le monde. Mais son développement repose encore sur les aides publiques, indique le rapport de l'Office Parlementaire des Choix Scientifiques et Technologiques réalisés par les députés, Christian Bataille et Claude Birraux dernièrement. Ainsi, aux États-Unis, il a suffi que la reconduction de l'aide fiscale à la production PTC prenne du retard en 2004 pour que l'augmentation annuelle de la puissance installée passe de 1.707 MW en 2003 à 448 MW en 2004. En revanche, la reconduction de cette taxe jusqu'en 2007 et dans un contexte de flambée des prix du pétrole et du gaz naturel a permis à l'énergie éolienne de connaître à nouveau une forte expansion aux États-Unis. La capacité totale de production électrique engendrée par la force du vent, même si elle ne représente encore moins de 0,5% du total d'électricité produit par le pays, a ainsi augmenté de 36% aux États-Unis en 2005 comparativement à 2004 pour atteindre 9.149 MW. En 2006, la capacité éolienne des États-Unis pourrait s'accroître de 50%, selon les prévisions du groupement professionnel American Wind Energy Association (AWEA).
En revanche en France la situation reste difficile. 7 projets terrestres (278,4 MW) et un projet offshore de 105 MW ont finalement été retenus, alors que les appels d'offres étaient ouverts pour 500 MW terrestres et 500 MW offshore, souligne le Baromètre de l'éolien. Alors que la situation actuelle voudrait que l'on encourage le développement des énergies renouvelables, le développement de l'éolien suscite souvent des contestations notamment en ce qui concerne le bruit.
Dans un rapport daté du 14 mars 2006, « le retentissement du fonctionnement des éoliennes sur la santé de l'homme » piloté par Claude Henri Chouard, l'Académie de médecine estime que le bruit constitue un vrai risque. Qu'il soit très intense, ou qu'il représente une pollution sonore plus modérée, le bruit est le grief le plus fréquemment formulé à propos des éoliennes. Il peut avoir un impact réel, et jusqu'ici méconnu, sur la santé de l'homme. Selon ce rapport, les vrais risques du fonctionnement des éoliennes sont liés à l'éventualité d'un traumatisme sonore chronique, dont les paramètres physiopathologiques de survenue sont bien connus, et dont l'impact dépend directement de la distance séparant l'éolienne des lieux de vie, ou de travail, des populations riveraines.
Pour faire la preuve de l'éventuelle nocivité du bruit éolien pour l'homme, l'Académie estime indispensable que soient entreprises des études comportant notamment la mise au point d'une procédure réalisant l'enregistrement, sur une période longue de plusieurs semaines, du bruit induit par les éoliennes dans les habitations, puis son analyse à différentes échelles temporelles, afin d'appliquer cette expertise aux populations intéressées et une enquête épidémiologique sur les conséquences sanitaires éventuelles de ce bruit éolien sur les populations.
En attendant les résultats de ces études, l'Académie recommande aux pouvoirs publics de suspendre à titre conservatoire la construction des éoliennes d'une puissance supérieure à 2,5 MW situées à moins de 1500 mètres des habitations.
Elle recommande également de modifier l'article 98 de la loi du 2 juillet 2003 pour que les éoliennes, dès qu'elles dépassent une certaine puissance, soient considérées comme des installations industrielles, et que leur implantation soit désormais soumise à une réglementation spécifique tenant compte des nuisances sonores très particulières qu'elles induisent.
À titre de comparaison, on peut se demander pourquoi l'Académie ne sollicite pas les autorités en vue de la suspension de la circulation des véhicules à moteurs et du trafic aérien lié aux aéroports qui s'avèrent pourtant responsables de nuisances sonores bien plus importantes !
Le groupe de travail estime en revanche que la production d'infrasons par les éoliennes est, à leur voisinage immédiat, bien analysée et très modérée, est sans danger pour l'homme et qu'il n'y a pas de risques avérés de stimulation visuelle stroboscopique par la rotation des pales des éoliennes. Les risques traumatiques liés à l'installation, au fonctionnement et au démontage de ces engins sont également prévus et prévenus par la réglementation en vigueur pour les sites industriels, qui s'applique à cette phase de l'installation et de la démolition des sites éoliens devenus obsolètes, selon eux.
Le lendemain de la publication de ce rapport, les Députés, Christian Bataille et Claude Birraux, membres de l'Office Parlementaire des Choix Scientifiques et Technologiques, constatent, dans leur rapport sur les nouvelles technologies de l'énergie et la séquestration du carbone que le bruit produit par une éolienne a longtemps été considéré comme une nuisance empêchant leur implantation mais que les bruits mécaniques des engrenages sont désormais quasiment inexistants. Avec les éoliennes modernes de puissance, dont les pales tournent à faible vitesse, le bruit de souffle des rotors n'est que de 100 décibels en pied de mât et inaudible à 200 mètres.
Profitant de la sortie de ces publications, les professionnels de la filière éolienne française réunie au sein du Syndicat des Energies Renouvelables (SER)* ont souhaité rappeler que les éoliennes émettaient un bruit de deux origines : aérodynamique et mécanique. Pour réduire le bruit aérodynamique, les pales sont conçues selon les mêmes méthodes que celles utilisées pour une aile d'avion, indique le SER dans un communiqué. Le bruit mécanique est, quant à lui, extrêmement réduit par rapport aux éoliennes de « première génération » : les constructeurs ont, en effet, mis au point depuis plusieurs années, des engrenages très silencieux, des arbres de transmission sur coussinets amortisseurs ou encore des nacelles capitonnées,explique t'il.
Au niveau du rotor, le niveau de bruit est proche de 100 décibels. Au pied d'une éolienne, le niveau sonore s'élève à 55 décibels. À 500 mètres, il atteint 35 décibels, soit le bruit d'une conversation à voix basse. De plus, ces sons sont généralement couverts par le bruit du vent lui-même, ajoute t'il.
Comme toute nouvelle construction, les émissions sonores des parcs éoliens ont été soumises à la réglementation des bruits de voisinage (décret du 18 avril 1995 et circulaire du 27 février 1996) qui repose sur l'évaluation de l'émergence chez le voisin du bruit particulier. Ce décret impose le respect d'un faible niveau d'émergence : l'émergence maximale tolérée, quelle que soit l'origine du bruit, est de 3 décibels la nuit et de 5 décibels le jour à l'extérieur.
Les études des acousticiens, qui interviennent lors du montage d'un projet de parc éolien, sont validées par la Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales, rappelle le SER qui souligne que compte tenu des niveaux d'émergence autorisés, impose systématiquement une distance de 500 mètres entre l'éolienne et la première habitation. Dans les pays européens les plus actifs dans le domaine de l'éolien, comme l'Allemagne, le Danemark ou l'Espagne, éolien et santé humaine n'ont jamais été opposés, bien au contraire, indique le SER.
De plus chaque projet d'implantation fait l'objet d'études paysagères grâce à des simulations pour inscrire les parcs éoliens dans l'environnement, en fonction des habitations, du relief, de la végétation et dans le respect des caractéristiques culturelles, historiques, touristiques de la région.
La Direction régionale de l'environnement (Diren) est amenée à se prononcer sur chaque projet et la commission départementale des sites et des paysages est également consultée en amont du permis de construire.
Par ailleurs, la
Devant les multiples protestations, actions en justice et autres manifestations, une meilleure concertation avec les habitants est sûrement nécessaire. Alors que la problématique paysagère peut se comprendre, même si une éolienne ne semble pas plus inesthétique qu'une ligne à haute tension, en soulevant une fois de plus la problématique du bruit, certains acteurs de la lutte anti-éolienne affichent une mauvaise foi avérée en « omettant » la réelle discrétion sonore des nouvelles installations...
* Baromètre de l'éolien – février 2006, EurObserv'Er, Systèmes solaires, n° 171
** Le Syndicat des Energies Renouvelables est une organisation professionnelle qui regroupe les industriels de l'ensemble des filières énergies renouvelables : biomasse, bois, biocarburants, éolien (France Energie Eolienne), géothermie, hydraulique, solaire thermique et photovoltaïque.