Quoi de plus simple que le principe du captage et stockage du CO2 (CSC) : récupérer le CO2 des fumées industrielles, le comprimer, le transporter et le stocker géologiquement. Une idée séduisante qui fait l'objet de nombreuses recherches depuis trois décennies mais qui peine à convaincre. Et pour cause. Selon un avis de l'Ademe sur cette technologie, la mise en œuvre du CSC est complexe et coûteuse. Pour l'instant, seuls une vingtaine de projets sont actifs dans le monde, dont une grande partie accompagne l'exploitation pétrolière. Le volume stocké à ce jour, 23 millions de tonnes de CO2 par an, reste donc anecdotique au niveau mondial. Et en France, le potentiel est très limité mais pas inexistant.
Trois zones industrielles potentielles dans le nord de la France
Au regard des contraintes techniques, géologiques et économiques, l'Ademe identifie trois zones industrielles où le CSC pourrait être mis en place grâce à la présence d'infrastructures favorables, comme des canalisations de transport, la concentration de sites industriels et des capacités de stockage géologique. « Une première estimation conduit ainsi à un gisement pouvant aller jusqu'à 24 MtCO2/an d'émissions qui pourraient être captées sur trois zones autour de Dunkerque, Le Havre et Lacq, dont 90 % seraient stockées en mer hors du territoire français », estime l'Ademe. Ce gisement sera cependant revu à la baisse avec la mise en place d'autres actions de réduction d'émissions de CO2, comme l'efficacité énergétique, l'électrification des procédés ou le développement des énergies renouvelables. Ce gisement paraît donc compatible avec les orientations de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), qui limite le CSC à 5 Mt CO2/an en 2050 dans son scénario de référence.

Un développement long et incertain
L'agence de la transition écologique estime que le procédé de CSC doit être envisagé en dernier recours, sur les émissions de CO2 incompressibles résultant d'une politique de réduction à la source. « Il faut commencer par les actions les plus matures et les plus performantes », rappelle l'Ademe. Surtout que le CSC est loin d'être compétitif avec un coût de 100 à 150 €/tonne de CO2 évité, contre 20-25 €/tonne pour les technologies les moins chères dans le secteur industriel. « Même en optimisant les technologies de captage (très consommatrices d'énergie), le CSC restera une solution coûteuse car elle n'est adaptée qu'aux sites très fortement émetteurs, en nombre limité, et nécessite des adaptations au cas par cas », estime l'Ademe. Tous les sites émetteurs inférieurs à 100 ktCO2/an sont écartés du gisement. Cela représente plus de 90 % des sites français.
Le dernier défi a trait à la temporalité : des efforts financiers importants doivent être consentis dès maintenant en matière de R&D pour le développement de projets CSC, qui nécessite un temps de développement et d'intégration d'une dizaine d'années, et donc pas de résultats concrets à moyen terme. Pour l'instant, en France, à part un projet de démonstrateur qui a permis de capter et stocker 60 000 tonnes de CO2, il n'y a aucun projet à l'échelle industrielle.