
Candidat à la Présidentielle 2017 pour le Parti socialiste
Actu-Environnement : Comment vous inscrivez-vous par rapport à la transition énergétique lancée par le précédent quinquennat ?
Benoît Hamon : Le précédent quinquennat a été marqué par plusieurs avancées pour la transition écologique et dans la lutte contre le dérèglement climatique. La loi de transition énergétique a été une étape nécessaire et a engagé la France dans une dynamique vertueuse (développement des énergies renouvelables, lutte contre le gaspillage et l'obsolescence programmée, rénovation énergétique du bâtiment, etc). La COP21, qui a débouché sur l'Accord de Paris, est également une réussite à souligner, avec un engagement des pays et d'acteurs non-étatiques (villes, entreprises). Le travail engagé est donc à féliciter.
Nous sommes encore malheureusement trop éloignés d'une trajectoire visant à limiter le réchauffement à 2 degrés d'ici 2100. Par ailleurs, la plupart des plans présentés par les pays en développement sont conditionnés à un soutien financier des pays riches bien supérieur à son niveau actuel. J'entends donc m'inscrire dans la continuité de l'engagement pris par le gouvernement précédent, tout en l'accélérant.
AE : La santé est une préoccupation majeure des Français. Que prévoyez-vous en matière de santé environnementale ?
BH : Notre santé est de plus en plus affectée par des maladies chroniques (cancers, maladies cardio-vasculaires, affections respiratoires, diabète, obésité, etc). Plus de quinze millions de nos concitoyens vivent chaque jour avec elles. Une alimentation déséquilibrée, la sédentarité, ainsi qu'un environnement pollué et toxique (diesel, pesticides, perturbateurs endocriniens, etc) en sont la cause. Face à cette transition épidémiologique, la prévention doit être au cœur de nos politiques publiques et notre système de santé doit être conforté pour l'adapter. Politique de soins pour soigner les pathologies. Politique de prévention pour chercher et combattre les causes des maladies.
J'interdirai les pesticides et les perturbateurs endocriniens pour prévenir les effets nocifs de ces substances sur la santé de nos enfants et de nos concitoyen(ne)s. J'appliquerai le principe de précaution : je retirerai les autorisations de tous les pesticides dangereux et j'interdirai l'importation des denrées alimentaires utilisant une substance interdite en France. Au niveau européen, nous labelliserons les pesticides pour conditionner les subventions de la politique agricole commune (PAC) au respect de hautes exigences en la matière.
Je ferai sortir la France du diesel à l'horizon 2025 pour lutter contre la pollution de l'air, responsable de la mort de 49.000 Français(e)s chaque année. Je mettrai fin à l'avantage fiscal accordé au diesel, je ferai installer des bornes de recharge électrique sur tout le territoire et je financerai la recherche pour l'autonomie des batteries pour voiture électrique.
AE : Comment envisagez-vous l'évolution du modèle agricole français ?
BH : Notre modèle agricole doit être repensé pour se tourner davantage vers l'agroécologie et des productions biologiques, paysannes et locales. Je soutiendrai l'agriculture biologique à prix accessibles, pour protéger la santé des consommateurs et des agriculteurs, et j'interdirai progressivement les pesticides et les perturbateurs endocriniens.
Je négocierai au niveau européen pour qu'une partie de la PAC soit consacrée au financement des agriculteurs prêts à adopter le modèle agroécologique. Ce modèle réduit l'usage des engrais et autres intrants, préserve les ressources naturelles et respecte l'animal.
Nous aiderons à la structuration des filières bio et équitables, pour une juste rémunération des agriculteurs. Je lancerai un programme d'investissements agricoles pour soutenir les projets durables, en circuits courts et coopératifs.
AE : L'arrivée du phénomène de ZAD complique l'aménagement du territoire. Comment concilier développement économique local avec le respect des milieux ?
BH : Lorsque l'existence d'un lourd impact écologique est établie dans le cadre d'un grand projet d'investissement local ou national, une Conférence de Consensus, réunissant experts, citoyens, élus, associations, sera organisée pour faire émerger des solutions alternatives, alliant le réalisme économique, le progrès social et la préservation de l'environnement.
AE : De quelle manière entendez-vous mettre en œuvre votre politique environnementale au sein de votre gouvernement ? Quel budget prévoyez-vous pour vos mesures et comment les financez-vous ?
BH : Pour réussir la transition écologique, tout en favorisant la justice sociale, il est nécessaire de remettre la politique au volant. Pour être écologique et sociale, la fiscalité verte doit être intégrée à une refonte plus globale du système fiscal. Je mettrai la finance au service de la transition écologique pour trouver les 60 milliards d'euros nécessaires sans attendre le bon vouloir du marché. J'instaurerai une TVA différenciée pour les produits à faible empreinte carbone afin de les rendre plus attractifs. Je rendrai la fiscalité incitative pour guider l'épargne des Français vers des investissements verts.
Je redonnerai une vision stratégique à l'Etat en faisant d'EDF un pilier de la transition énergétique. EDF sera ainsi incité à renforcer ses recherches sur la production et le stockage d'énergies renouvelables, plutôt que de privilégier le nucléaire. L'entreprise accompagnera également la décentralisation de la production d'énergies vertes.
Je construirai et proposerai un plan européen d'investissement de 1.000 milliards centré sur la transition écologique. Il nous appartient de reconstruire la légitimité de l'Union européenne sur cette thématique fondamentale à travers une contribution ambitieuse des Etats, le fléchage des financements privés vers les investissements verts grâce à des mécanismes incitatifs et la suppression de toutes les subventions aux énergies fossiles.