
Lundi 9 janvier 2012, l'Université de Corse, Helion, filiale d'Areva, et le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) ont inauguré sur le site de Vignola, près d'Ajaccio, une plateforme de recherche et développement qui a pour objectif de stocker l'énergie solaire sous forme d'hydrogène. Baptisée Myrte pour Mission hydrogène renouvelable pour l'intégration au réseau électrique, cette plateforme, unique en Europe par sa taille, permettra de développer un système et une stratégie de pilotage visant à améliorer la gestion et la stabilisation du réseau électrique corse. Ce projet doté d'un budget de 21 millions d'euros sur cinq ans a été financé à 50% par l'Etat, le fonds Feder et la Collectivité territoriale de Corse.
Un procédé adapté aux réseaux électriques insulaires
Sur l'île de Beauté, la configuration actuelle du réseau électrique présente toutes les caractéristiques des réseaux insulaires : de petite dimension, sensible aux variations de production, limité en capacité de nouveaux moyens de production, avec une forte augmentation de la demande en électricité. Pour répondre à cette dernière, le développement des énergies renouvelables (EnR), notamment le photovoltaïque dans les régions fortement ensoleillées, est particulièrement adapté au contexte îlien.
Mais, le caractère intermittent de ces EnR pose un véritable problème car il ne garantit pas un apport continu de puissance au réseau, ni son équilibre entre production et consommation d'électricité. D'où, la nécessité de développer un dispositif capable d'assurer la régulation et le stockage d'énergie afin de gérer au mieux les fluctuations de puissance des EnR intégrées dans le réseau. Ce projet Myrte représenterait ainsi une réponse à cette problématique.
Hydrogène comme vecteur énergétique
Après cinq années de recherche, la plateforme Myrte a enfin été connectée au réseau électrique corse le 16 décembre dernier. Encore qualifié de démonstrateur, ce dispositif est constitué d'une centrale photovoltaïque d'une puissance installée de 560 KWc sur 3.700 m2, reliée directement à une chaîne hydrogène qui joue le rôle d'un système de stockage d'énergie. Développée par Helion, cette chaîne intègre un électrolyseur, des stockages d'hydrogène et d'oxygène ainsi qu'une pile à combustible de 100 kW. Une seconde pile, de la même puissance, devrait venir doubler la puissance de Myrte d'ici un an. Pendant les heures de faible consommation, l'électrolyseur convertit donc l'électricité solaire en hydrogène - vecteur énergétique - et en oxygène. Cette énergie sera ensuite restituée via une pile à combustible, qui reconvertit l'hydrogène et l'oxygène en électricité sur le réseau pendant les heures de forte consommation, soit le soir quand les panneaux photovoltaïques ne produisent plus.
Ainsi, en stockant et déstockant l'hydrogène, il est possible de fournir de l'énergie propre, indépendamment du moment où elle est produite. Chaque transformation aboutissant à des pertes énergétiques, le rendement global de l'installation est de l'ordre de 40 %, mais il pourra être amélioré pour atteindre les 70 % en valorisant la chaleur produite par la pile à combustible. Cette chaleur pourra être utilisée pour fournir de l'eau chaude ou tout simplement pour chauffer des bâtiments annexes équipés de pompes à chaleur. Au final, la production du démonstrateur raccordé au réseau EDF devrait permettre d'alimenter environ 200 foyers insulaires.
Un test réel et des améliorations avant une commercialisation
Si la taille du projet Myrte est modeste au regard des enjeux énergétiques de la Corse, son objectif est avant tout de valider grandeur nature le couplage au réseau de distribution. "La plateforme Myrte nous permet de sortir du laboratoire et de tester notre technologie en environnement réel. C'est notre première installation à ce niveau de maturité, connectée au réseau électrique", indique Jérôme Gosset, président d'Helion. Cette phase de test qui débute tout juste, devra confirmer la capacité du système à "assurer un écrêtage des pointes de consommation appelé par le réseau électrique ainsi que le lissage de la puissance photovoltaïque produite".
Avant une commercialisation de ce procédé qui risque de séduire un grand nombre de territoires, notamment insulaires, Areva souhaite augmenter la puissance actuelle des systèmes à hydrogène d'ici 2013.