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Les actualités du cadre juridique du développement de l'hydrogène

Le cadre juridique du développement de l'hydrogène renouvelable a largement évolué en 2023, sous l'impulsion de textes européens et de textes législatifs en droit national.

DROIT  |  Étude  |  Energie  |  
   
Les actualités du cadre juridique du développement de l'hydrogène
Stéphanie Gandet
Avocate spécialiste en droit de l'environnement
   

I. Les deux règlements délégués de la Commission européenne

Pour rappel, l'Union européenne (UE) vise à atteindre les 10 millions de tonnes de production nationale d'hydrogène renouvelable et les 10 millions de tonnes d'hydrogène renouvelable importé, conformément au plan « REPowerEU ».

Deux règlements délégués de la Commission ont été adoptés en février 2023 en application des articles 27(3) et 28(5) de la directive sur les énergies renouvelables, définissant les carburants renouvelables d'origine non biologique (RFNBOs). Ces règlements s'inscrivent dans un vaste cadre réglementaire de l'UE pour l'hydrogène, qui comprend notamment des règles en matière d'aides d'État, ainsi que des objectifs législatifs pour l'hydrogène renouvelable dans les secteurs de l'industrie et des transports. Ils ont vocation à garantir que tous les carburants renouvelables d'origine non biologique soient produits à partir d'électricité renouvelable. Ils sont interdépendants et poursuivent l'objectif de permettre à ces carburants d'être comptabilisés aux fins de la réalisation de l'objectif des États membres en matière d'énergies renouvelables.

Le premier règlement permet de déterminer à quelles conditions l'électricité utilisée pour la production de ces carburants d'origine non biologique, notamment l'hydrogène, peut être considérée comme entièrement renouvelable. Selon la Commission, l'acte clarifie le principe d' « additionnalité » pour l'hydrogène énoncé dans la directive de l'UE sur les énergies renouvelables.

Ainsi, les situations suivantes peuvent permettre de comptabiliser l'hydrogène carburant comme entièrement produit à partir de sources renouvelables :

  • soit l'électricité utilisée pour les produire est d'origine renouvelable, et utilisée à partir d'installations directement raccordées, à certaines conditions supplémentaires (art. 3) ;
  • soit l'électricité est prélevée sur le réseau, via un contrat d'achat d'énergie renouvelable et remplit trois critères : corrélation géographie (art. 7), corrélation temporelle (art. 6), et additionnalité (art. 5) ;
  • soit l'électricité est prélevée sur le réseau, et est consommée dans une zone de forte proportion d'énergies renouvelables ;
  • soit l'électricité est prélevée sur le réseau et est consommée dans une zone de faibles émissions de gaz à effet de serre ;
  • soit l'électricité est prélevée sur le réseau et est consommée à un moment où cela soulage le réseau.

Le règlement délégué définit différents moyens par lesquels les producteurs peuvent démontrer que l'électricité renouvelable utilisée pour la production d'hydrogène est conforme aux règles d'additionnalité. Il instaure également des critères visant à garantir que l'hydrogène renouvelable n'est produit que lorsqu'une quantité suffisante d'énergie renouvelable locale est disponible (corrélation temporelle et géographique).

Ces exigences s'appliqueront aussi bien aux producteurs nationaux au sein des pays de l'UE qu'aux pays tiers. Un système de certification reposant sur des systèmes volontaires permettra aux producteurs, que ce soit dans l'UE ou dans des pays tiers, de démontrer de manière aisée et simple qu'ils respectent le cadre de l'UE et de commercialiser de l'hydrogène renouvelable au sein du marché unique(art. 9).

Le second règlement délégué fournit une méthode de calcul des émissions de gaz à effet de serre sur l'ensemble du cycle de vie des carburants renouvelables d'origine non biologique, dont l'hydrogène peut faire partie. La méthode précise également comment calculer les émissions de gaz à effet de serre de l'hydrogène renouvelable ou de ses dérivés s'il est coproduit dans une installation produisant des carburants fossiles.

II. Les apports de la loi d'accélération des ENR et la loi industrie verte

En droit national, deux principales lois intervenues en 2023 (1) ajustent également plusieurs dispositions relatives à l'hydrogène.

Ainsi, la loi d'accélération des énergies renouvelables du 10 mars 2023 comporte plusieurs articles intéressants du point de vue du déploiement de la production d'hydrogène de source renouvelable :

  • l'article 81 modifiant l'article L. 141-2 du code de l'énergie traite du volet de la PPE (2) relatif au développement de l'exploitation des énergies renouvelables et de récupération. Il concerne désormais également la production d'hydrogène renouvelable ou bas carbone ;
  • l'article 81 créant l'article L. 131-2-1 du code de l'énergie permet désormais à la CRE de « concourir au déploiement des installations de production d'hydrogène renouvelable ou bas carbone » ;
  • l'article 81 modifiant l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, prévoyant que les autorités « organisatrices d'un réseau de distribution » de gaz et d'électricité sont désormais habilitées à «concourir au déploiement des installations de production d'hydrogène renouvelable ou bas carbone » ;
  • enfin, l'article 37 de la loi consacre la possibilité de recourir à l'autoconsommation individuelle ou collective pour produire l'électricité issue de sources d'ENR nécessaire à la production d'hydrogène renouvelable au sens de l'article L. 811-1 du code de l'énergie.

La loi du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte comporte deux dispositions principales pouvant favoriser le développement de la production d'hydrogène. En premier lieu, l'article 16 modifie l'article L. 300-6 du code de l'urbanisme et prévoit que peuvent être reconnus d'intérêt général les projets d'installation de production d'énergie renouvelable, et la production d'hydrogène renouvelable ou bas carbone, et ce dans le cadre d'une procédure de mise en compatibilité avec les documents d'urbanisme. En second lieu, les nouvelles règles sur la concertation publique ou le débat public dans certaines zones sont de nature à accélérer le déploiement de projets de production d'hydrogène.

III. L'approfondissement du cadre juridique de l'hydrogène par le décret du 1er septembre 2023 relatif au dispositif de soutien à la production de certaines catégories d'hydrogène

L'apport majeur en droit national découle du décret du 1er septembre 2023 relatif au dispositif de soutien à la production de certaines catégories d'hydrogène, qui a créé un livre VIII dans la partie réglementaire du code de l'énergie, dédiée à l'hydrogène. En l'état, le livre VIII ne comporte que 26 articles, tous relatifs à la procédure de mise en concurrence prévue à l'article L. 812-2 du code de l'énergie.

Rappelons que l'ordonnance de 2021 relative à l'hydrogène avait prévu que l'autorité administrative pouvait favoriser le développement des capacités de production d'hydrogène renouvelable ou d'hydrogène bas carbone produit par électrolyse de l'eau, en ouvrant aux installations correspondantes le bénéfice d'un dispositif de soutien. Il prend la forme soit d'une aide au fonctionnement, soit d'une combinaison d'une aide financière à l'investissement et d'une aide au fonctionnement, sous des conditions et selon des modalités définies par l'autorité administrative compétente.

L'article L. 812-4 du code de l'énergie prévoit actuellement que l'aide accordée aux candidats retenus à l'issue de la procédure d'appel d'offres fait l'objet d'un contrat conclu entre le candidat qui en est bénéficiaire et l'État ou toute personne mandatée pour agir en son nom. Ce contrat précise le montant de l'aide accordée, qu'il s'agisse d'une aide au fonctionnement ou d'une aide à l'investissement et au fonctionnement. Il détermine notamment les modalités de versement de l'aide, leur durée, le rythme des versements et les conditions auxquelles elle est subordonnée. Il comporte les engagements du bénéficiaire, en termes économiques et environnementaux, sur la même période. Enfin, la durée maximale du contrat prévoyant une aide au fonctionnement ne peut dépasser vingt années.

Le décret du 1er septembre 2023 expose la procédure de mise en concurrence propres aux unités de production d'hydrogène, qui comporte :

-     une phase de sélection des candidats éligibles ;

-     éventuellement une phase de dialogue, par laquelle le ministre chargé de l'Énergie dialogue avec les candidats admis à participer à la procédure en vue de définir ou développer les solutions de nature à répondre à ses besoins et sur la base desquelles ces candidats seront invités à remettre une offre ;

-     une phase de désignation des candidats retenus pour bénéficier du soutien.

La première phase de sélection des candidats éligibles passe par l'élaboration par le ministre d'un document de consultation, qui précise notamment l'objet de la procédure de mise en concurrence, le calendrier prévisionnel de la procédure, les exigences concernant les capacités techniques et financières des candidats ainsi que les pièces justificatives attendues lors de la phase de sélection des candidatures, les modalités d'évaluation de ces capacités, les critères, par ordre décroissant d'importance, de sélection des offres à l'issue de la procédure.

La Commission de régulation de l'énergie (CRE) donne son avis sur le document de consultation (il est réputé donné au terme d'un délai d'un mois). Un avis d'appel public à la concurrence est publié à l'Office des publications de l'Union européenne en vue de sa publication au Journal officiel de l'Union européenne.

C'est ensuite l'Ademe (3) qui met en place un site de candidature en ligne, permettant notamment le téléchargement du document de consultation et de l'avis d'appel public à la concurrence, ainsi que le dépôt des candidatures. Les candidats peuvent adresser des demandes d'informations (4) .

Dans un délai fixé par le document de consultation (compris entre 1 et 2 mois à compter de la date limite de dépôt des dossiers de candidature), l'Ademe examine les dossiers de candidature recevables au regard des exigences fixées par le document de consultation, et, le cas échéant, des critères de réduction du nombre de candidatures. Elle adresse au ministre chargé de l'Énergie la liste des candidatures qu'elle propose de sélectionner ainsi que celle des candidatures qu'elle propose de ne pas sélectionner, assortie des motifs qui justifient les rejets. Il est à souligner que ces listes ne sont pas publiques. C'est au ministre de désigner les candidats sélectionnés pour participer, selon le cas, à la phase de dialogue ou à la phase de désignation, et d'aviser tous les autres candidats du rejet de leurs candidatures en précisant les motifs de ce rejet.

S'ouvre alors la deuxième phase « de dialogue » (5) conduite par le ministre. Elle débute par une invitation à la phase de dialogue comprenant notamment un projet de cahier des charges, les références de l'avis d'appel public à la concurrence, un règlement de consultation précisant les modalités de déroulement de la phase de dialogue, notamment l'obligation d'utiliser la langue française pendant toute la durée de la procédure, l'obligation, pour les candidats sélectionnés, de s'engager pendant toute la durée de la phase de dialogue sur le maintien de leurs capacités techniques et financières à un niveau au moins équivalent à celui exigé au stade de la sélection des candidatures. Par dérogation, le règlement précise les conditions et les modalités selon lesquelles la modification de la composition des candidats ou des groupements candidats peut être agréée par le ministre chargé de l'énergie, et enfin le calendrier prévisionnel de la phase de dialogue.

Il est intéressant de noter que le ministre peut associer à cette phase toutes les personnes qu'il estime nécessaires, notamment la CRE, les gestionnaires des réseaux publics d'électricité auxquels sont raccordés les installations objets de la procédure ou des établissements publics.

Enfin, lors de la troisième et dernière phase « de désignation » (6) , le ministre établit à nouveau un cahier des charges, soumis à la CRE pour avis, comportant notamment :

1. La description des installations faisant l'objet de la procédure et des conditions qui leur sont applicables, notamment :

a) Les caractéristiques énergétiques et techniques des installations concernées, ainsi que les usages auxquels l'hydrogène peut être destiné ;

b) Les conditions économiques et financières de leur exploitation, notamment la durée et les modalités financières du contrat d'aide ;

c) Les prescriptions de toute nature qui s'imposeront avant la mise en service de l'installation, pendant son exploitation ou lors de son démantèlement ou de la remise en état du site d'implantation, et, le cas échéant, l'obligation de constituer des garanties financières dont la nature et le montant sont précisés ;

d) Le délai de mise en service industrielle de l'installation ;

e) Le cas échéant, la zone géographique d'implantation de l'installation ;

f) La puissance recherchée ;

2. La liste exhaustive des critères de notation des offres, leur pondération ou leur hiérarchisation ; les critères quantitatifs doivent représenter au moins 70 % de la pondération totale ;

3. La liste exhaustive des indications et des pièces à produire par les candidats pour permettre l'appréciation des offres au regard de ces critères, notamment le bilan carbone mentionné à l'article L. 812-3 ; le cas échéant, sont indiquées celles des pièces qui doivent obligatoirement être rédigées ou traduites en français et celles dont l'absence entraîne l'élimination du dossier ;

4. Les informations relatives au déroulement de la procédure, notamment :

a) La date et l'heure limites de dépôt des demandes d'aide. Cette date laisse aux candidats un délai pour déposer leurs demandes d'au moins trente jours à compter de la notification du cahier des charges ;

b) L'adresse électronique à laquelle le candidat fait parvenir sa demande d'aide ;

c) Certaines dates limites et délai et, le cas échéant, le délai d'instruction des tiers mentionné au dernier alinéa de l'article R. 812-18.

En cas de changement de producteur, le contrat pour le nouveau producteur s'impose jusqu'à fin de la durée initiale.

C'est l'Ademe qui suit les dossiers de candidature, les examine et adresse au ministre chargé de l'Énergie la liste des offres conformes et la liste des offres non conformes assortie des motifs de non-conformité retenus ; ces listes ne sont pas publiques, le classement des offres avec le détail des notes et, à la demande du ministre, la fiche d'instruction détaillée de chaque offre justifiant les notes obtenues, la liste des offres qu'elle propose de retenir.

Sont également élaborés par l'Ademe un rapport de synthèse sur l'analyse des offres et, à la demande du ministre, les offres déposées (7) .

Le décret du 1er septembre 2023 précise en outre, via l'article R. 812-22 du code de l'énergie, que la remise d'une offre vaut engagement du candidat à respecter, s'il est retenu, l'ensemble des obligations et prescriptions de toute nature figurant au cahier des charges et à mettre en service l'installation dans les conditions de la procédure de mise en concurrence. Cela est une disposition très proche de ce qui est prévu pour les appels d'offres des ENR électriques.

IV. Des dispositifs communautaires en matière de carburants alternatifs et de REGRH

1. Le développement de carburants alternatifs

Des dispositions plus générales, mais incluant l'hydrogène, ont en outre été adoptées au niveau communautaire par le biais du règlement « Afir » du 13 septembre 2023.

Diverses dispositions sur le développement des carburants alternatifs aux carburants fossiles (électricité, biométhane, etc.) pour tous les modes de transports (véhicule lourds et léger, maritime, aviation) sont prévues, dont l'article 6, fixant un objectif pour les infrastructures de ravitaillement en hydrogène : les États déploient au minimum une station de ravitaillement hydrogène par nœud urbain au plus tard le 31 décembre 2030.

Aux points de recharge ouverts au public déployés à partir du 13 avril 2024, une recharge devra être possible au moyen d'un instrument de paiement largement utilisé dans l'Union (lecteurs de cartes de paiement, sans contact et permettant au moins de lire les cartes de paiement…).

Les États membres devront évaluer les possibilités de développement de technologies et de systèmes de propulsion au moyen de carburants alternatifs pour permettre au secteur ferroviaire d'abandonner les trains diesel, notamment l'électrification directe, les trains à batterie et les applications de l'hydrogène (art. 13).

La directive dite « RED III » a prévu, s'agissant de l'hydrogène, qu'afin « de réduire la dépendance de l'Union à l'égard des combustibles fossiles et des importations de combustibles fossiles, une stratégie de l'Union pour l'hydrogène importé et intérieur devrait être élaborée par la Commission sur la base des données communiquées par les États membres » (art. 22 bis). Des dispositions spécifiques en matière de garanties d'origine (qui doivent pouvoir être émises à partir de toutes les sources renouvelables, y compris les carburants gazeux renouvelables d'origine non biologiques tels que l'hydrogène, à condition que le producteur ne bénéficie pas du soutien financier des régimes d'aide) sont prévues à l'article 16 septies.

2. L'accord sur un organe de gestion du réseau d'hydrogène

Enfin, le Conseil et le Parlement européens sont parvenus, en novembre 2023, à un accord sur le futur marché intérieur de l'hydrogène. Puis, le 8 décembre 2023, les législateurs de l'Union ont conclu un accord sur le dernier élément de la politique européenne en matière d'hydrogène : il s'agira d'un organe de supervision des opérateurs de réseaux d'hydrogène, le « réseau européen des gestionnaires de réseau d'hydrogène » (REGRH).

1. L. n° 2023-175, 10 mars 2023 : JO 11 mars, relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables ; L. n° 2023-973, 23 oct. 2023 : JO 24 oct., relative à l'industrie verte2. Programmation pluriannuelle de l'énergie3. Agence de la transition écologique4. C. énergie, art. R. 812-65. C. énergie, art. R. 512-10 à R. 812-136. C. énergie, art. R. 812-14 à R. 812-21

7. C. énergie, art. R. 812-19

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