La locomotive solaire semble inarrêtable. Pour la toute première fois, le nombre d'installations photovoltaïques déployées durant une année a dépassé une puissance cumulée de trois gigawatts (GW). Le parc a désormais dépassé le seuil des 20 GW installés. Les nouveaux raccordements au dernier trimestre de l'année 2023 (1) ont atteint l'équivalent de 955 mégawatts (MW), avec un nombre de petites installations (moins de 10 kilowatts) en hausse. Ce chiffre constitue un nouveau record, battant ceux établis lors des précédents trimestres – et ce, alors même que leurs résultats ont été réévalués à la hausse par le Service des études statistiques (Sdes) du ministère de la Transition écologique. Près de 5 000 projets se sont ajoutés à la file d'attente, représentant un autre gigawatt supplémentaire. Au total, 30 000 projets de plus qu'à la fin de l'année 2022 sont en instruction.
Accélération encore insuffisante
L'éolien terrestre (2) a, lui aussi, le vent en poupe. Sa production annuelle s'est accrue de dix térawattheures (TWh) en 2023, par rapport à l'année précédente. En outre, le nombre de projets en cours, marqueur de l'intérêt de la filière, reprend des couleurs : ils sont cent de plus qu'en 2022, dont trente de plus en trois mois. Cela étant, cette filière n'a pas renouvelé la performance de l'année 2022. En un an, seulement 1,2 GW de nouvelles installations éoliennes a été raccordé (dont 254 MW au dernier trimestre), au lieu de 1,7 GW en 2022 (dont 656 MW à la fin de l'année).
Par ailleurs, deux des trois premiers parcs marins ne sont pas encore à la hauteur des attentes. « D'après le bilan électrique de RTE, au 31 décembre 2023, les capacités connectées au réseau et mises réellement en service représentent environ 224 MW, pour le parc de Fécamp, et 136 MW, pour le parc Saint-Brieuc (soit respectivement 45 % et 27 % de leur capacité totale à venir). » Notons que le calcul du Sdes ne prend pas en compte ces puissances effectives, mais seulement les puissances prévisionnelles. Une autre précision a malgré tout été appliquée, en ce qui concerne l'éolien en mer. Après l'avoir pris en compte dans son calcul pour le trimestre précédent, le parc éolien « ZI PAM » de 10 MW à Fos-sur-Mer a été déclassé. Plus côtière que marine, cette installation « est passée d'éolien en mer à éolien terrestre du fait de la précision d'une règle de classification de cette catégorie », précise le service du ministère.
Le biométhane sur une pente descendante ?
Quant au biogaz (3) , le dernier trimestre de l'année 2023 a été celui d'une légère décélération. Si celui-ci correspond au raccordement de quarante nouvelles installations, ajoutant un térawattheure par an (TWh/an) de capacité supplémentaire, il n'est pas parvenu à renouveler les records annuels des années 2021 (+ 2,5 TWh/an) et 2022 (+ 2,6 TWh/an), avec une puissance supplémentaire de « seulement » 2,3 TWh/an. En outre, malgré une augmentation de 42 % du nombre de projets listés dans le registre d'instruction en un an, ce dernier trimestre n'en a pas accueilli de nouveaux. Le Sdes note néanmoins que « douze installations de biométhane hors méthanisation (méthane de synthèse obtenu par pyrogazéification) sont (également) en projet, pour une capacité maximale de production de 776 gigawattheures par an (GWh/an) ». Enfin, s'agissant des installations de biogaz en cogénération (4) , la lente érosion du nombre de projets en cours se poursuit. D'autant que « la puissance des installations de biogaz pour la production d'électricité a été révisée à la baisse à la suite du reclassement d'une installation biogaz en installation biomasse », indique le Sdes.
Bons et mauvais élèves de la PPE
Et les autres ENR ?
Ces quatre filières renouvelables ne sont pas les seules à être soumises à des objectifs par la PPE. Dans la production d'électricité, le parc hydraulique l'est également. Avec ses 25,9 GW de puissance totale en 2022, il avait déjà légèrement franchi le seuil de 25,7 GW fixé pour la fin de l'année 2023. S'agissant de la production de chaleur renouvelable, toutes les filières n'en sont pas au même point. Le bois-énergie (qui comprend aussi bien le chauffage domestique au bois que les centrales à biomasse) se situait, toujours en 2022, à une capacité d'environ 108 TWh, pour un objectif de 145 TWh à la fin 2023. La filière de la géothermie profonde, avec ses 2,1 TWh de chaleur, peine encore à atteindre les 2,9 TWh prévus par la PPE pour la fin 2023. Le solaire thermique est dans la même situation : avec 1,3 TWh au compteur en 2022, la filière reste à une certaine distance de son objectif 2023 de 1,75 TWh. À l'inverse, le domaine des pompes à chaleur, aérothermiques comme géothermiques, dépasse déjà son objectif fixé pour fin 2023 (39,6 TWh) et arrive presque à leur « fourchette basse » envisagée pour la fin 2028, à savoir 44 TWh (pour 43,6 TWh de capacité fin 2022). Même résultat, enfin, du côté des réseaux de chaleur qui livraient déjà 26,3 TWh de la chaleur renouvelable en 2022, pour un objectif fixé à 24 TWh à la fin 2023.
Bien qu'insatisfaits, les objectifs pour l'éolien et le solaire photovoltaïque ne devraient être atteints qu'avec un léger retard. Le premier est à un peu plus de 2 GW de la cible prévue en 2023 pour l'éolien terrestre (24,1 GW) et à un peu moins de 1 GW pour son pendant offshore (2,4 GW). Avec un rythme annuel de nouvelles installations oscillant autour de 1,5 GW, le résultat attendu à terre pourrait ne pas être réalisé avant le début de l'année 2025. En mer, les prochaines mises en service ne sont prévues au large de Courseulles-sur-Mer (Calvados) (448 MW) et des îles d'Yeu et de Noirmoutier (Vendée) (496 MW) qu'en 2025 et de Dieppe (Seine-Maritime) (496 MW) qu'en 2026. Le solaire, quant à lui, est à seulement 100 MW de la cible et devrait déjà y être parvenu pendant ce premier trimestre de l'année 2024.