L'Inra vient de publier les résultats d'une étude sur l'évaluation des services rendus par les écosystèmes agricoles. Cette étude fait partie d'un plus vaste programme, lancé en 2012 par le ministère de l'Environnement, sur l'évaluation des écosystèmes et des services écosystémiques (Efese).
Réduire l'apport de fertilisants azotés en s'appuyant sur l'écosystème
L'étude distingue les services rendus à l'agriculture et ceux rendus à la société. "Au cours du cycle de production (cycle cultural), un certain nombre de [services écosystémiques (SE)] interviennent dans l'élaboration du rendement en agissant sur le niveau d'expression des facteurs qui le pénalisent (manque d'eau, carences en nutriments, déficit de pollinisation, dommages causés par les bioagresseurs)", indique la synthèse de l'étude au sujet des services rendus aux agriculteurs. Ceux-ci peuvent jouer le même rôle que des intrants "exogènes", comme l'irrigation, la fertilisation…
"L'écosystème agricole peut assurer à lui seul, en moyenne, la moitié des besoins en eau et en azote de la culture", explique Olivier Thérond. De fait, l'agriculteur peut réduire ses apports d'intrants. En adaptant ses pratiques, il peut également optimiser les apports provenant de l'écosystème. "Il y a un potentiel de progrès important en matière d'apport de fertilisants azotés", estime Olivier Thérond. Car globalement, la quantité d'azote minéral disponible dans l'écosystème est supérieure aux besoins des cultures. Il s'agit alors de "mieux transformer la capacité de l'écosystème à fournir de l'azote (SE potentiellement rendu par l'écosystème) en une fourniture effective d'azote minéral aux plantes cultivées (niveau de SE effectivement exploité par l'agriculteur) se traduisant in fine en une réduction significative des apports d'azote exogènes". Cela passe notamment par le recours à des outils de pilotage de la fertilisation ou un épandage d'engrais azotés optimisé.
Changer les pratiques pour stocker du carbone dans les sols
L'écosystème agricole permet aussi de participer à la régulation du climat, en stockant du carbone ou en régulant les émissions grâce à l'activité microbienne des sols. Cependant, l'étude révèle qu'en France, "en moyenne, les systèmes de grandes cultures sont très légèrement en situation de déstockage carbone", souligne Olivier Thérond. Et les valeurs obtenues pour les systèmes qui stockent du carbone sont majoritairement inférieures à 0,2% et très rarement supérieures à 0,3%. "On est bien loin du 4 pour mille promu par la France". Cette initiative, lancée au moment de la COP 21, vise à promouvoir des systèmes et pratiques agricoles qui permettent chaque année un stockage additionnel de carbone dans le sol de quatre pour mille (soit +0,4%). "Il y a donc un enjeu de conservation du stockage existant et de développement d'un stockage additionnel, explique Olivier Thérond. Il faut trouver des voies qui font entrer un maximum de biomasse dans les sols. Les couverts intermédiaires ou certaines rotations sont favorables au stockage carbone". Et sachant que ces pratiques permettent aussi d'enrichir le sol en azote organique, c'est un système gagnant/gagnant pour l'agriculteur et la société.