L'Assemblée nationale a adopté le 15 avril 2014 une proposition de loi visant à interdire la culture de maïs transgénique en France. L'ensemble de la majorité a voté en faveur de cette interdiction, tandis que l'UDI, partagée, a choisi de laisser ses députés libres de faire leur choix. Seule l'UMP a choisi de voter massivement contre.
"C'est un texte anticonstitutionnel et contraire au droit européen. C'est un texte pour faire plaisir aux Verts. On se moque du monde", estime Christian Jacob, président du groupe UMP à l'Assemblée. Toutefois, la voix discordante de Nathalie Kosciusko-Morizet affirme que "la France n'a rien à gagner à [pratiquer cette] culture".
Tout maïs génétiquement modifié est interdit de culture
Le texte approuvé par la majorité des députés reprend le projet de loi soutenu par Alain Fauconnier, sénateur PS, rejeté par le Sénat le 17 février dernier. Il interdit la mise en culture de variétés de maïs génétiquement modifiés et confère aux autorités administratives le pouvoir de décider de la destruction des cultures enfreignant ce moratoire.
Cette interdiction est assez large puisqu'elle concerne tout type de maïs transgénique. Les variétés MON810 de Monsanto et Pioneer TC1507 sont donc toutes deux concernées.
Pour le groupe écologiste de l'Assemblée nationale, "cette adoption est toutefois assombrie par le rejet des amendements écologistes qui visaient à étendre l'interdiction de culture à toutes les plantes OGM". En effet, les écologistes craignent l'adoption d'une directive dite des "OGM à la carte" permettant leur circulation sur le territoire européen. Selon eux, "ce risque apparait d'autant plus grand que, dans le cadre des négociations du Traité transatlantique (TAFTA) chacun réalise le danger de voir l'Europe ouverte aux importations massives de produits américains génétiquement modifiées".
L'association France nature environnement (FNE) insiste pour sa part sur le fait que les "OGM ne répondent à aucune demande des consommateurs et risquent de confiner l'agriculture dans un modèle agro-industriel dont on connaît les limites et qui est à l'opposé du modèle agro-écologique promu par la France".
Sécuriser l'interdiction avant les semis
La majorité entend sécuriser l'interdiction avant la saison des semis, en application du principe de précaution. Malgré l'arrêté interdisant la culture du MON810, le risque d'introduction de la culture d'OGM subsiste, le risque d'annulation de ce règlement par le Conseil d'Etat étant particulièrement élevé. En effet, la haute juridiction administrative a déjà annulé par deux fois des arrêtés semblables pour non-respect de la réglementation européenne. L'Union française des semenciers (UFS) et l'association générale des producteurs de maïs (AGPM) ont attaqué le dernier.
Le député UMP Bernard Accoyer a qualifié cette décision de refus du progrès scientifique, annonçant la saisine du Conseil constitutionnel de "la primauté du droit européen sur la loi française", une fois le texte adopté définitivement. Les règles européennes sont actuellement à l'avantage des pro-OGM puisqu'elles requièrent, pour la mise en place d'une interdiction, qu'il soit apporté des preuves scientifiques "d'un risque important mettant en péril de façon manifeste la santé humaine, la santé animale ou l'environnement".
Des risques de contamination illégale
Des risques de contamination illégale existent également. Ainsi, le 15 avril, Greenpeace a révélé que "des semences de maïs « certifiées sans OGM » vendues en 2013 et 2014 par le semencier espagnol Semillas Fitó à des agriculteurs français, contiennent jusqu'à six OGM différents". Selon l'association, le cabinet de Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, a pris contact avec elle le 16 avril pour avoir plus de renseignements et mener son enquête.
L'association a en effet fait tester par le laboratoire indépendant Eurofins trois échantillons de trois kilos de semences de maïs choisis aléatoirement commercialisées en 2013 et 2014. Des traces d'au moins 3 OGM différents ont été retrouvées dans chaque échantillon. "Ces OGM ont été vendus, semés et cultivés dans les champs, on ne sait où en France, à l'insu d'agriculteurs qui ne souhaitaient pas planter d'OGM mais qui ont été trompés par ce semencier", explique Anaïs Fourest, chargée de campagne agriculture à Greenpeace. "Ce maïs contenant des OGM se retrouve donc potentiellement dans notre alimentation".