Au 1er janvier 2024, le tri à la source des biodéchets sera étendu à tous les acteurs, y compris aux collectivités territoriales. L'obligation est connue de longue date, puisqu'elle est inscrite dans la loi depuis près de dix ans. En 2015, la loi de transition énergétique fixait déjà un objectif de généralisation du tri à la source des biodéchets avant 2025. Cette date a depuis été alignée sur la législation européenne et ramenée à janvier 2024 par la loi Antigaspillage et économie circulaire (Agec) de 2020.
Très concrètement, la loi Agec étend une obligation qui portait, depuis 2012 déjà, sur les gros producteurs (plus de 5 tonnes par an depuis janvier) à « tous les producteurs ou détenteurs de biodéchets, y compris aux collectivités territoriales dans le cadre du service public de gestion des déchets et aux établissements privés et publics qui génèrent des biodéchets ».
Peu de progrès depuis 2015
Force est de constater que peu a été fait depuis 2015. Une étude de l'Agence de la transition écologique (Ademe), publiée en septembre 2022, constate qu'entre 2015 et 2020-2021, la part de la population desservie par un dispositif de tri des biodéchets n'a progressé que de 0,9 point, pour atteindre un maigre 6,3 % de la population. L'Ademe a recensé 101 collectivités proposant une collecte séparée et 815 ayant mené des actions de gestion de proximité. Une mobilisation qualifiée de « limitée ».
Absence de règles claires
Si les chiffres sont si flous, c'est aussi parce que personne ne sait exactement ce que signifie « généraliser le tri à la source des biodéchets ». Aucun décret ne précise ce que les collectivités doivent faire. La situation pourrait changer, puisque les pouvoirs publics ont lancé cet été les travaux sur un texte (probablement une circulaire) qui fixerait des critères précis. L'objectif étant notamment de pouvoir rendre des comptes à Bruxelles, puisqu'en juin dernier le rapport d'alerte de la Commission européenne pointait le sujet.
Deux grandes options sont envisageables. La première serait de fixer un objectif de résultats : la proportion de biodéchets dans les ordures ménagères devrait descendre sous un certain seuil ou diminuer dans certaines proportions. La seconde serait de fixer un objectif de moyens : population couverte par une collecte, densité en points d'apport volontaire ou encore nombre de composteurs mis à disposition.
Quoi qu'il en soit, l'enjeu est clair : à terme, il s'agit autant que possible de réduire d'environ un tiers le volume des ordures ménagères résiduelles (OMR) en sortant les quelque 83 kg par habitant et par an (kg/hab/an) de déchets de cuisine et de restes alimentaires qui s'y trouvent encore. D'autant que l'enfouissement, comme l'incinération (les biodéchets sont essentiellement composés d'eau), sont de piètres manières de les valoriser comparativement au retour au sol de la matière organique qui est la priorité affichée par la loi.
Inquiétude sur les coûts de collecte
Et pour y parvenir, la loi liste deux grandes options de gestion de biodéchets : une valorisation in situ ou une collecte séparée afin de permettre un retour au sol « de qualité élevée ». La valorisation in situ est essentiellement le compostage de proximité, qu'il soit domestique, partagé ou autonome en établissement pour les professionnels.
Quant à la collecte séparée, c'est le « gros » sujet de cette généralisation du tri à la source. Son coût constitue sans conteste un frein que les associations de collectivités territoriales mettent régulièrement en avant. Amorce, par exemple, l'évalue à près de 700 millions d'euros par an sur les dix prochaines années.
Une étude commandée par la Fédération nationale des activités de la dépollution et de l'environnement (Fnade) l'évalue entre 15 et 30 euros par habitant (€/hab). Les deux tiers correspondent à la collecte et 10 % au traitement. Le solde se répartit entre la communication et la précollecte. Bien sûr, cette facture peut aussi être réduite, notamment grâce aux économies de taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) générées par la baisse des volumes d'OMR éliminés et à la réduction de la fréquence de collecte des OMR.