On sait que les pollinisateurs, et en premier lieu les insectes, jouent un rôle incontournable dans la production végétale mais l'évaluation économique du service de pollinisation n'est pas chose facile. Le Commissariat général au développement durable (CGDD) a pourtant mené à bien l'exercice dans le cadre d'un premier volet de l'Evaluation française des écosystèmes et des services écosystémiques (Efese). Les résultats de cette évaluation ont été publiés le 21 novembre.
Cette analyse fait écho aux travaux internationaux réalisés par la plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) qui a publié un rapport d'évaluation sur les pollinisateurs en février 2016. La version française du résumé à l'intention des décideurs de ce rapport est rendue publique ce 22 novembre. L'évaluation menée par le CGDD vise également à appuyer le plan national d'action France Terre de pollinisateurs lancé en mai 2015.
12% de la valeur totale des productions végétales
"La part de la production végétale destinée à l'alimentation humaine que l'on peut attribuer à l'action des insectes pollinisateurs représente en France une valeur comprise entre 2,3 et 5,3 milliards d'euros (2010). Ainsi, c'est entre 5,2% et 12% de la valeur totale des productions végétales françaises destinées à l'alimentation humaine qui dépendent des pollinisateurs", conclut l'étude du CGDD.Il faut dire qu'en Europe, 84% des espèces cultivées dépendent directement des insectes pollinisateurs. Or, leurs populations sont menacées tant en quantité que dans leur diversité, du fait principalement des pratiques d'agriculture intensive, comme le montrent maintenant de nombreuses études scientifiques.
"La vulnérabilité des productions végétales vis-à-vis du déclin des populations d'insectes pollinisateurs dépend des espèces cultivées et donc varie très fortement d'un département à l'autre", expliquent les contributeurs de l'étude. Les départements les plus vulnérables sont ceux situés dans le sud de la France en raison de la proportion élevée de cultures de fruits et légumes très dépendants de la pollinisation. A titre d'exemple, la production de melons dépend à 90% des pollinisateurs alors que celle de céréales n'en dépend pas du tout.
D'autres valeurs non prises en compte
La valeur monétaire du service de pollinisation ainsi mesurée ne représente qu'une des valeurs associées à la pollinisation, avertissent toutefois les auteurs. En premier lieu, elle ne représente qu'une partie de la valeur marchande associée. Ne sont en effet pas prises en compte les cultures énergétiques, celles destinées à la production de fibres ou à l'alimentation animale, ni les productions des jardiniers amateurs, ni encore les productions importées qui rendent la France dépendante des pollinisateurs dans le reste du monde.
Ensuite, explique le CGDD, ne sont pas pris en compte les effets indirects de la consommation des productions végétales dépendantes de la pollinisation, comme par exemple une alimentation équilibrée contribuant à la santé humaine. Enfin, les auteurs rappellent que la pollinisation par les insectes sauvages est aussi "une fonction écologique majeure" qui permet "la reproduction du vivant, le maintien de nombreux écosystèmes, de la diversité génétique, spécifique et des paysages et, par voie de conséquence, la délivrance de très nombreux autres biens et services associés". Mais ceux-ci restent difficilement mesurables.