La plateforme sur la chaleur et le froid solaire vient de publier un rapport sur les priorités stratégiques de recherche en matière de technologie solaire thermique (1) . L'objectif du document est de décrire le potentiel des technologies solaires thermiques ainsi que les priorités en matière de recherche et développement (R&D) qui permettrait un large déploiement des technologies.
Par ailleurs, le document relève que le développement du solaire thermique pâtit de la crise. Il fait état d'une chute de 25%, à 25 gigawatts thermiques (GWth), des capacités installées annuellement entre 2008 et 2011. Ce plaidoyer en faveur du solaire thermique est relayé en France par Tecsol dont le vice-président, Daniel Mugnier, a participé à la rédaction.
De l'ECS à la climatisation
S'agissant des installations individuelles pour l'eau chaude sanitaire (ECS) et le chauffage des bâtiments, le rapport mise sur le développement des "maisons solaires actives" qui permettent d'atteindre des consommations énergétiques quasi-nulles.
Les technologies solaires pourraient répondre à plus de 50% des besoins de chaleur de tels bâtiments, avance le document qui présente les approches possibles. Parmi celles-ci figurent notamment les moyens de chauffage de l'ECS classiques pour un à deux foyers via 2 à 3 m2 de capteurs solaires et 150 l de liquide caloporteur qui permettent de fournir 50 à 60% de l'énergie nécessaire à l'ECS. Un système similaire à circulation forcée est plus adapté aux pays du nord de l'Europe. Dans ce domaine l'une des pistes de recherche proposées est le développement de "façades multifonctionnelles" qui intègre des capteurs solaires. Cette approche est notamment défendue dans le cadre de la rénovation des bâtiments.
Il est possible de produire une partie du chauffage du bâtiment en augmentant la taille de l'installation. La surface des capteurs est portée à 10 ou 15 m2 (voire jusqu'à 30 m2 dans certains exemples autrichiens) pour 600 à 1.000 l de liquide caloporteur. L'apport solaire représente alors 25% du total des besoins en ECS et chauffage. Quant aux bâtiments collectifs (hôtels, hôpitaux, logements collectifs…), le rapport évoque un besoin de 0,5 à 1 m2 par résident et 50 l de liquide caloporteur par m2 de capteur.
Par ailleurs, les réseaux de chaleur ne sont pas délaissés par l'étude qui plaide pour leur développement lorsque les bâtiments ne disposent pas d'une surface suffisante pour installer les capteurs. Dans les pays pionniers, l'Allemagne, le Danemark et la Suède, de tels réseaux incorporent parfois des systèmes de stockage saisonnier. Parmi les priorités de recherche figure le développement de capteur solaire permettant de répondre aux besoins industriels ou d'alimenter des réseaux de chaleur dont la température est comprise entre 95 et 400°C.
Quant à la climatisation à partir de l'énergie solaire thermique, le rapport évoque "plusieurs centaines de systèmes pilotes installés en Europe dont la fonctionnalité est prouvée". Mais il s'agit d'un des secteurs nécessitant le plus de recherche pour améliorer les systèmes existants. Il s'agit notamment d'améliorer le rendement des capteurs (comme pour la plupart des techniques solaires thermiques) et des échangeurs de chaleurs. Autre aspect clé, la R&D doit permettre d'obtenir des systèmes fiables fonctionnant à des températures et des niveaux d'humidité très variés.
Augmenter la puissance installée pour abaisser les coûts
En matière de performance économique, le document déplore que les clients potentiels n'aient pas d'idée précise du coût de la chaleur solaire du fait de la multiplicité des systèmes et des variations de coût en fonction de l'ensoleillement.
Un autre facteur bloquant est la comparaison erronée avec les systèmes équivalents utilisant les énergies fossiles ou l'électricité. "Etant donné que les prix du gaz et du pétrole varient beaucoup, la comparaison des coûts dépend grandement des hypothèses de hausse des prix réalisées sur une période de 20 ans, ce qui est hautement imprédictible", explique le rapport.
Selon les calculs réalisés par la plateforme sur la chaleur et le froid solaire, le coût moyen de revient dans l'Union européenne pour la production de chaleur irait de 2,76 à 11,65 centimes d'euro par kilowattheure (c€/kWh) pour le gaz et de 8,74 à 29,75 c€/kWh pour l'électricité. A titre de comparaison, la production d'ECS à partir d'une installation à circulation forcée en Europe du nord serait de l'ordre de 8 à 19 c€/kWh et la production d'ECS à partir d'une installation à thermosiphon en Europe du sud serait comprise entre 3 et 11 c€/kWh.
En réalité les coûts de l'énergie solaire thermique sont avant tout déterminés par l'investissement initial. Or, celui-ci peut varier grandement de moins de 300 euros par kilowatt thermique (kWth) pour les grandes installations desservant un réseau de chaleur à 1.700 euros pour les systèmes combinant production d'ECS et de chaleur. Quant au coût d'entretien ils sont eux aussi variable selon le type d'installation.
Concernant l'avenir, le rapport estime que le développement de la puissance installée permettrait de réduire de 23% les coûts entre 2010 et 2015 si la capacité installée doublait sur le même période (elle passerait de 23 gigawatts thermiques (GWth) à 49 GWth). Sur dix ans la baisse serait de 43% si la capacité installée en Europe quadruplait, pour atteindre 102 GWth en 2020.