Faire entrer dans la loi la responsabilité pour troubles anormaux de voisinage, qui résulte d'une construction jurisprudentielle, mais aussi répondre aux préoccupations des agriculteurs qui souhaitent réduire les contentieux liés aux nuisances générées par leur activité. Tel est l'objet de la proposition de loi (1) relative au droit de la responsabilité civile que le Sénat a adoptée en séance publique mardi 12 mars, après l'Assemblée nationale le 4 décembre dernier.
La principale modification du texte par la Chambre haute est l'intégration d'un amendement (2) de la rapporteure Françoise Gatel (UC – Bretagne), qui insère une clause exonératoire spécifique aux activités agricoles. Cette disposition vise à étendre l'exonération de responsabilité de l'auteur des nuisances, prévue dans le cas où le voisin s'est installé postérieurement à l'activité de ce dernier, au cas où l'agriculteur modifie ensuite son activité. « Dès lors qu'une exploitation agricole modifierait les conditions d'exercice de son activité pour mettre celles-ci en conformité aux lois et règlements, le trouble anormal en résultant serait insusceptible d'engager la responsabilité de l'exploitant. Une telle exonération me paraît devoir être explicitement prévue par le législateur », a expliqué la rapporteure en commission.
Les sénateurs sont allés plus loin en séance publique en adoptant l'amendement (3) du sénateur Laurent Duplomb (Haute-Loire) et de ses collègues LR qui exonère de responsabilité les exploitants agricoles lorsque le trouble anormal provient d'activités qui se sont poursuivies postérieurement à l'installation du voisin « dans des conditions telles qu'il n'en résulte pas une aggravation substantielle du trouble par sa nature ou son intensité ». « L'amendement vise à sécuriser juridiquement l'évolution naturelle de la vie d'une exploitation agricole, c'est-à-dire une activité qui peut être amenée à évoluer, se diversifier ou bien s'accroitre, dans la limite où cette évolution n'entraîne pas une aggravation substantielle du trouble préexistant », expliquent ses signataires.
Le texte, auquel le Gouvernement avait indiqué apporter son soutien dans le cadre de sa réponse aux revendications agricoles, doit maintenant faire l'objet d'un examen en commission mixte paritaire.