La Haute Juridiction administrative n'a finalement pas suivi son rapporteur public. Par une décision rendue ce jeudi 9 novembre, elle a annulé le décret du 21 juin 2023 par lequel l'exécutif avait dissous « le groupement de fait » Les Soulèvements de la Terre. Le texte avait été suspendu le 11 août dernier, à la demande de plusieurs associations.
Depuis 2021, rappelle le Conseil d'État dans un communiqué, la loi permet de dissoudre une association ou un groupement de fait qui provoque des agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens. Avec cette nouvelle décision, accompagnée de trois autres portant sur d'autres organisations dissoutes, il vient préciser les critères qui permettent de déterminer si un telle dissolution peut être justifiée. Elle l'est si l'organisation « incite des personnes, par propos ou par actes, explicitement ou implicitement, à se livrer à des manifestations armées ou à des agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens, de nature à troubler gravement l'ordre public ». Le fait de légitimer publiquement des agissements violents présentant une gravité particulière constitue une provocation au sens de ces dispositions, de même que celui de ne pas modérer sur les réseaux sociaux des incitations explicites à commettre des actes de violence.
Concernant Les Soulèvements de la Terre, mouvement organisant des actions militantes en vue d'alimenter le débat public sur des sujets d'intérêt général tels que la lutte contre la consommation excessive des ressources naturelles, le Conseil d'État estime qu'aucune provocation à la violence contre les personnes ne peut lui être imputée. Le fait d'avoir relayé « avec une certaine complaisance » des images d'affrontements de manifestants avec les forces de l'ordre, notamment contre la construction de retenues d'eau à Sainte-Soline, ne permet pas de dire que l'organisation a « revendiqué, valorisé ou justifié publiquement de tels agissements », estiment les conseillers d'État.
Ceux-ci jugent en revanche que le groupement s'est bien livré à des provocations à des agissements violents à l'encontre des biens. Cependant, ils estiment que sa dissolution ne constituait pas une mesure « adaptée, nécessaire et proportionnée à la gravité des troubles susceptibles d'être portés à l'ordre public » au regard « des effets réels » qu'ont pu avoir ces provocations.