Un avis favorable, mais assorti de recommandations : c'est la position rendue par le Comité de bassin Rhin-Meuse sur le projet de schéma d'aménagement et de gestion des eaux (1) (Sage) de l'un des principaux aquifères du bassin Rhin-Meuse, la nappe des grès du Trias inférieur (GTI). La constitution de ce document – qui vise un retour à l'équilibre de la nappe - est sensible. Les différents acteurs impliqués (les collectivités du secteur, les industriels utilisateurs d'eau notamment Nestlé Waters et la fromagerie L'Ermitage ou encore les associations environnementales) défendent, en effet, des chemins bien différents pour y arriver.
Pour pallier un manque d'eau dans les secteurs de Vittel et de Contrexéville, un premier scénario de transfert d'eau par canalisation à partir des ressources voisines (Removille et Valfroicourt) avait initialement été envisagé. Non-respect de la hiérarchie des usages de l'eau, non-prise en compte des répercussions sur les autres aquifères, mais également contradiction avec les objectifs de retour à l'équilibre de la nappe du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (Sdage) 2016‐2021 (2) , ou encore de bon état de la directive-cadre sur l'eau : de nombreuses critiques ont alors été formulées contre cette option.
Après de multiples rebondissements, cette piste avait été finalement abandonnée pour privilégier une rationalisation de l'utilisation des ressources locales. Dans cette optique, les différents acteurs se sont engagés, à travers un protocole d'accord, (3) notamment à substituer certains prélèvements dans un secteur particulier de la nappe en déséquilibre, le gîte C, par des prélèvements sur d'autres zones du secteur, comme le gîte B, qui ne semble pas en tension, ainsi qu'à élaborer des contrats de territoire. L'objectif avec ces derniers serait de cadrer les actions de lutte contre les fuites comme des économies d'eau ainsi que les financements.
Consolider le scénario de retour à l'équilibre
Le projet de Sage en cours d'élaboration concrétise l'ensemble de ces réflexions et ces objectifs. « Je tiens à saluer le travail important réalisé pour arriver à ce projet, a indiqué Claude Gaillard, président du comité de bassin. Les recommandations que nous formulons de manière détaillée ont vocation à consolider le scénario de retour à l'équilibre avant 2027. »
Parmi les principales préconisations du comité de bassin : la mise en place rapide de l'observatoire hydrogéologique. Ce dernier sera chargé des données sur l'évolution quantitative de la nappe et du suivi des prélèvements. « D'après l'étude diagnostic du Sage GTI actualisée, l'économie à réaliser serait, en ordre de grandeur, de 1 million de mètres cubes par an », souligne le comité de bassin. Celui-ci pointe également la nécessité de mener des études sur la nappe des Muschelkalk, qui intègre les gîtes A (exploités par Nestlé Water pour Hépar et Contrex) et B (Vittel et Contrex). Cette demande fait écho à une autre requête du comité : l'instauration d'un mécanisme de sécurisation de la réduction des pressions sur la nappe des GTI. Le projet de Sage prévoit, en effet, que Nestlé rétrocède à la ville de Vittel le gîte B notamment, en échange de quoi la ville abandonnerait ses prélèvements dans le gîte C. « Au cas où cette substitution ne pourrait aboutir, il est suggéré une révision à due proportion des volumes maximum prélevables de la société Nestlé Waters dans la nappe des GTI, dès 2024 », complète le comité de bassin.
Des associations environnementales comme Vosges Nature Environnement souhaitent, quant à elles, des évolutions encore plus marquées dans le projet de Sage. « Il est nécessaire de fixer un objectif d'économie de prélèvements dans les GTI secteur SO [sud-ouest] plus ambitieux», indiquent-elles.
Reste à voir quelles seront les options retenues. Après enquête publique, le projet de Sage sera soumis à délibération définitive de la commission locale de l'eau.