A en croire de récentes études, les rapports entre les Français et la voiture changent. Longtemps marqueur social, la voiture est désormais considérée comme une contrainte en raison des coûts qu'elle génère. Une tendance qui se confirme à Paris : selon l'enquête globale transport réalisée par l'Institut aménagement et urbanisme (IAU) d'Ile-de-France, entre 2001 et 2010, les déplacements en voiture se sont stabilisés, malgré la croissance démographique, ce qui traduit une baisse de la mobilité automobile individuelle.
"Avec d'un côté des contraintes toujours plus fortes pour circuler et stationner en ville avec une voiture particulière, et un coût de plus en plus prohibitif, le glissement vers une vision purement utilitaire de la voiture, déconnectée de la propriété, va s'accentuer. Ces tendances favorisent donc l'autopartage, intéressant financièrement sous la barre des 3.700 kilomètres par an", analysait Xerfi, dans une étude sur l'autopartage, publiée en mai dernier.
Ainsi, en milieu urbain notamment, de nouveaux services apparaissent, promouvant un autre usage de la voiture. A l'instar d'Autolib' qui, un an après l'apparition de ses premières voitures électriques en libre-service dans les rues de Paris, affiche plus de 5 millions de kilomètres parcourus au compteur. Le concept a déjà séduit 37.000 personnes (dont 13.000 abonnés annuels), qui ont réalisé plus de 550.000 déplacements.
Il est trop tôt pour dire si la Bluecar remplace l'acquisition d'un véhicule personnel, argument des partisans du développement d'Autolib', ou si elle crée de nouveaux besoins, argument des opposants. Mais de premières tendances se dégagent. L'Autolib' est utilisée principalement par les habitants de Paris intra-muros (60% de la clientèle et les deux-tiers des abonnés annuels), où la voiture ne compte que pour 7% des déplacements. Ce service semble s'ancrer dans les pratiques des abonnés annuels, qui l'utilisent en moyenne 10 fois par mois.
Qui sont les utilisateurs d'Autolib' ?
Le profil des utilisateurs d'Autolib' semble finalement peu éloigné du profil des automobilistes de la capitale. Les hommes comptent pour 69% des utilisateurs de ce service, ce qui est assez représentatif des comportements de déplacement des Parisiens : "En moyenne, les hommes et les femmes se déplacent autant.En revanche, ils se différencient par leurs modes dedéplacement :les femmes se déplacent davantage à pied, les hommes utilisent davantage la voiture et sont plus adeptes des deux-roues motorisés ou du vélo", observe l'IAU.
De plus, 67% des abonnés Autolib' sont âgés entre 25 et 49 ans, un chiffre peu surprenant : "Les actifs occupant un emploi sont les plus mobiles", note l'IAU. En revanche, les pratiques changent selon les générations : alors que les plus de 35 ans optent pour un abonnement annuel, les moins de 35 ans choisissent des abonnements courts, d'une semaine voire d'une journée. Est-ce parce que le réflexe voiture est moins ancré dans les pratiques des plus jeunes ?
Près de 91% des trajets effectués en Autolib' sont des One way, particularité de ce service par rapport aux autres offres d'autopartage : l'utilisateur a en effet la possibilité de déposer la voiture dans une station différente de celle de départ. La durée moyenne de location est de 40 minutes, pour des trajets moyens de 9km, ce qui ne s'éloigne pas des habitudes des automobilistes traditionnels parisiens (6,7 km en moyenne).
La moitié des locations sont réalisées après 15h. Le pic d'utilisation se situe entre 19h et 20h et entre le vendredi et le dimanche. L'utilisation serait donc davantage consacrée aux loisirs ou aux emplettes. Mais au fil des mois, la part des locations en semaine augmenterait, indique Autolib'.
L'essayer c'est l'adopter ?!
Pour l'heure, le nombre d'utilisations augmenterait de 5% par semaine. A ce rythme-là, le service pourrait être rentable bien plus tôt que prévu, dès 2014. Mais la rentabilité de ce libre-service n'est pas le seul enjeu pour l'exploitant Bolloré. Autolib' est aussi une formidable vitrine pour sa Bluecar. Quel Parisien ne croise pas régulièrement une des 1.750 Autolib' déployées dans Paris et ses villes limitrophes ou n'a pas, à deux rues de chez lui, une des 670 stations de libre-service ? Outre l'avantage d'habituer les consommateurs à la voiture électrique, Autolib' permet aussi d'essayer ce type de voiture … et pourquoi pas de la posséder ! Bolloré lance en effet un contrat de location longue durée pour sa Bluecar. "Les 50 premiers véhicules seront livrés dans les 15 jours et notre ambition est d'en livrer 1.000 dans les mois qui viennent", a indiqué Vincent Bolloré, lors du Salon de l'automobile la semaine dernière. Des offres destinées aux entreprises seront également développées prochainement. Enfin, les Autolib' pourraient être déployées avant la fin de l'hiver dans une autre ville européenne.
D'autres constructeurs cherchent une telle vitrine. Ainsi, Renault a lancé, en juin dernier à Saint-Quentin-en-Yvelines (78), une expérimentation d'autopartage pour sa Twizy. Citroën a de son côté inauguré en septembre, sur le même concept qu'Autolib, un réseau de véhicules électriques C-Zéro en libre-service à Berlin (Allemagne).