L'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) persiste et signe : « Le lien entre exposition aux radiofréquences et risques sanitaires pour les fréquences d'intérêt pour le déploiement de la technologie 5G est, en l'état des connaissances, comparable à celui pour les bandes de fréquence utilisées par les générations précédentes. » Telle est la conclusion définitive de ses travaux, comprenant un avis et un rapport d'expertise, publiés le 17 février dernier. Parus initialement en avril 2021, ces derniers ont été actualisés à la suite d'une consultation publique ouverte du 20 avril au 1er juin 2021. La prise en compte de plus de 200 contri-butions et d'une récente étude de l'Agence nationale des fréquences (ANFR) « confortent les conclusions initiales de l'expertise », affirme l'Anses. Certaines associations ne l'entendent pas de cette oreille.
Un objet d'étude encore trop précoce
Pour rappel, la 5G est déployée commercialement depuis novembre 2020. En septembre 2021, seulement 1,6 million de Français disposaient d'un forfait et d'un téléphone compatibles avec cette nouvelle technologie, selon l'Autorité de régulation des communications (Arcep). La 5G se distribue sur trois bandes de fréquence : de 700 à 2 100 mégahertz (MHz), à l'instar des téléphonies 3G et 4G, autour de 3,5 GHz, pour le haut débit, et autour de 26 GHz, à l'avenir, pour certains objets connectés.
Comme l'attestait déjà l'Anses en avril 2021, la 5G est relativement jeune. Ainsi, aucune étude scientifique s'intéressant aux effets éventuels sur la santé de l'exposition aux champs électromagnétiques associés à ces bandes de fréquences n'est « actuellement disponible ». L'agence s'est donc uniquement basée, d'une part, sur sa connaissance des infrastructures 5G et de leur fonctionnement et, d'autre part, sur les données existantes concernant les bandes de fréquences partagées avec les générations précédentes ou sur des bandes de fréquences plus larges.
La similitude avec les 3G et 4G se confirme
Cette mesure, comme toutes celles réalisées par l'ANFR, a été effectuée au niveau d'antennes-relais. Selon l'association Alerte Phone Gate, ce n'est pas suffisant. « Qu'en est-il des mesures d'exposition pour l'utilisation de ces fréquences depuis des téléphones portables ? Nous ne le savons pas, car nous ne savons pas les mesurer, alors que les téléphones sont la source principale d'exposition », avance Marc Arazi, médecin et président de l'ONG. Quoi qu'il en soit, atteste l'Anses, « les niveaux globaux d'exposition aux champs électromagnétiques seront comparables ou légèrement supérieurs à ceux des technologies existantes ».
Une nouvelle donnée sur le haut débit 5G
Concernant la bande de fréquences de 3,5 GHz, l'Anses considère qu'il est « peu vraisemblable » qu'elle constitue un « nouveau risque pour la santé ». Selon l'étude de décembre 2021 de l'ANFR, reprise aujourd'hui par l'Anses, la contribution de cette seule bande aux niveaux d'exposition relevés sur les sites opérationnels en 5G n'est que de 0,11 à 2,1 V/m. Lors d'une simulation basée sur un trafic généré artificiellement pour solliciter davantage une antenne 5G, le niveau d'exposition moyen augmente de 0,3 V/m. Et à terme, cela pourrait représenter une augmentation de 20 %, soit 0,42 V/m en se basant sur la valeur maximale de 2,1 V/m. Là encore, ce relevé ne constitue pas un « nouveau risque pour la santé », garantit l'Anses.
Pourtant, pour les associations Priartem et Agir pour l'environnement, ce n'est pas assez. « L'Anses comptabilise cinq études seulement sur la bande de fréquences 3,5 GHz et est dans l'incapacité de conclure sur l'existence ou non de risques pour la bande de 26 GHz, remarquent les ONG. Le manque d'anticipation et l'instrumentalisation politique de l'Anses a permis au gouvernement d'imposer la 5G, en l'absence complète de certitudes scientifiques. »
Manque crucial de données
Si l'Anses assure que l'exposition à la bande de fréquence 26 GHz « se différencie par une pénétration beaucoup plus faible des ondes », et donc ne présente, a priori, pas ou peu de risques pour la santé, elle atteste qu'en effet les données à ce sujet sont « à l'heure actuelle trop peu nombreuses pour conclure à l'existence ou non d'effets sanitaires ». L'agence souhaite s'appuyer sur les résultats, attendus cette année, des 14 sites d'expérimentation suivis pendant trois ans par l'Arcep.
Plus largement, l'Anses voit la production de données comme une véritable nécessité, « en particulier pour suivre l'évolution de l'exposition des populations au fil de l'extension du parc d'antennes et de l'augmentation des réseaux 5G ». Autrement dit, elle ne voit pas la version finale de ses derniers travaux comme les travaux définitifs en la matière. « S'il n'existe pas à ce jour de preuve d'effet sanitaire lié aux usages numériques courants, d'autres effets comme le développement de cancer, l'altération du fonctionnement cérébral ou de la fertilité continuent de faire l'objet de travaux », précise-t-elle.