Le projet est ambitieux, par sa taille mais aussi par son objectif : décarboner le chauffage de 3,7 millions de foyers britanniques vivant dans le nord du Royaume-Uni et de 40.000 entreprises. Les réseaux de chaleur de Liverpool, Manchester, Leeds, Newcastle sont notamment ciblés.
L'idée : produire de l'hydrogène à partir de gaz naturel et stocker le CO2 issu de ce procédé de transformation.
Rien de très nouveau d'un point de vue technique, mais la société Equinor, qui porte le projet H21 en partenariat avec le distributeur Nothern gas networks, a une approche très pragmatique : "Nous souhaitions utiliser une technologie qui existe déjà et a été éprouvée, pas une innovation, explique Henrik Solgaard Andersen, le responsable du projet H21. Nous avons donc analysé les différentes solutions existantes : l'électrolyse, le reformatage autotherme du gaz naturel (ATR)...".
Stocker le CO2 dans 56 cavités naturelles
Et finalement, le choix s'est porté sur la deuxième technique : "La difficulté de l'électrolyse est de mettre en adéquation production et demande, il faut développer des moyens de stockage importants. Alors que l'ATR engendre une consommation de gaz naturel supplémentaire de seulement 3 %". Autre avantage : utiliser les infrastructures gazières existantes, notamment celles du transport et de la distribution.
Concrètement, il s'agit de produire de l'hydrogène en faisant réagir du gaz naturel au contact de l'oxygène et de la vapeur. Problème : ce procédé
Equinor planche aujourd'hui sur plusieurs projets de stockage de CO2 à grande échelle en Europe : "Plusieurs sites sont envisageables, au Royaume-Uni, en Norvège". Le projet H21 prévoit un stockage en aquifère dans 56 cavités naturelles, pour un volume de 8 TWh. "C'est le plus gros défi", admet Henrik Solgaard Andersen. 94 % du CO2 produit devrait être capté ou stocké. "12,5 Mt de CO2 seront économisés", avance le responsable d'H21.
Un démarrage en 2028 ?
Pour couvrir la consommation de 3,7 millions de foyers et 40.000 entreprises, la production devra atteindre 12,1 GW, avec le déploiement de douze modules ATR. Equinor estime pouvoir en développer un par an, en démarrant en 2028, pour un déploiement total en 2035. "Ces délais sont importants mais nous souhaitons avoir un projet robuste, qui fonctionne à 100 % même en cas de grand froid", explique le responsable d'H21.
Le gaz naturel produit 70 % de la chaleur au Royaume-Uni. Et le pays connaît les mêmes problématiques que la France rencontre avec l'électricité, avec des demandes très différentes selon les saisons et des pics de consommation journaliers. Au printemps ou en été, seulement deux ou trois ATR seraient sollicités. En revanche, dans les cas de températures négatives, le demande sera très forte. "L'avantage de notre choix technique est que l'on pourra remplacer l'hydrogène par du biogaz ou intégrer l'électrolyse", estime Henrik Solgaard Andersen. Les porteurs du projet sont encore plus ambitieux : ils estiment qu'ils pourraient couvrir, d'ici 2050, l'ensemble des besoins en chauffage du Royaume-Uni.
Coût de la première phase : 23 milliards de livres sterling (soit 26 Md€). Ce qui engendrerait une augmentation des factures de gaz de 7 %. Mais avant de prendre toute décision d'investissement, plusieurs étapes doivent encore être franchies. L'ingénierie doit encore être approfondie et la sécurité du système garantie. Plusieurs démonstrateurs pourraient être lancés à petite échelle pendant l'hiver 2022-2023.