Les services préfectoraux n'aiment pas que les maires jouent avec les frontières de leur pouvoir, expliquait Thomas Dubreuil, avocat spécialisé en droit de l'environnement. Les faits lui donnent raison : le préfet de Loire-Atlantique a décidé de déférer l'arrêté anti-pesticides d'un nouveau genre signé le 11 janvier par le maire de La Montagne, Fabien Gracia.
Après la décision du Conseil d'État du 31 décembre 2020 déniant toute compétence aux maires pour réglementer les pesticides, le premier édile de cette petite commune a pris un arrêté s'appuyant sur un tout autre fondement que celui utilisé par ses prédécesseurs : la police des déchets et le trouble de voisinage. L'arrêté vise en effet « les dépôts sauvages de déchets et ordures ». La réaction des services préfectoraux ne s'est pas fait attendre pour autant. Dès le 3 février, le représentant de l'État dans le département adressait un courrier au maire lui demandant de retirer cet arrêté illégal dans un délai de 48 heures, sous peine de le déférer devant le tribunal administratif de Nantes.
La motivation du préfet ? D'une part, la méconnaissance de la qualification juridique de déchets, qui implique selon lui l'intention de s'en défaire. D'autre part, le fait que les produits phytopharmaceutiques sont des substances « créées à une fin particulière » et qui ne peuvent dès lors être qualifiées de déchets. Deux arguments que réfute le maire en se fondant sur la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes dans l'affaire de l'Erika, le code de l'environnement et l'arrêté interministériel du 4 mai 2017.
La balle est maintenant dans le camp du juge administratif, dont la décision sera scrutée de près par les différentes parties prenantes : maires, services de l'État mais aussi associations de protection de l'environnement et syndicats agricoles.