L'outarde canepetière va-t-elle conduire à une condamnation pénale du maître d'ouvrage de la retenue de substitution de Sainte-Soline (Deux-Sèvres) qui a défrayé la chronique en octobre 2022 ? Le 3 janvier 2024, dix associations (1) ont en effet déposé une plainte pour destruction de 17 hectares d'habitat d'une espèce protégée en l'absence de la dérogation exigée par la réglementation. La réalisation de travaux en l'absence de la dérogation requise constitue un délit qui peut être puni de trois ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende au maximum.
Les plaignantes s'appuient sur l'avis (2) du Conseil national de la protection de la nature (CNPN) en date du 22 novembre 2023. Dans le cadre d'une autosaisine, l'instance consultative a estimé que les arrêtés préfectoraux d'autorisation de la retenue auraient dû être précédés d'une demande de dérogation Espèces protégées compte tenu des impacts directs et indirects de l'aménagement sur l'outarde canepetière. Or, « le porteur de projet, la Société coopérative anonyme de l'eau des Deux-Sèvres, a toujours refusé de déposer une telle demande. Les préfectures ne l'ont pas non plus imposé », rappellent les associations.
« Lors du recensement national de 1978-1979, [la] population [d'outardes] était évaluée à 6 800 mâles sur les terres agricoles céréalières du centre-ouest à l'est de la France. Vingt-deux ans plus tard, lors du recensement de 1999-2000, seulement 460 mâles ont été dénombrés, soit un déclin de 94 % », rappellent les associations. La réserve de substitution, ajoutent-elles, se situe dans une zone de protection spéciale (Natura 2000) désignée pour la protection de l'avifaune de plaine et pour l'outarde canepetière, et les suivis GPS de cette dernière attestent de sa fréquentation de la zone d'emprise.
Cette procédure pénale vient s'ajouter aux actions engagées par les associations devant les juridictions administratives qui, quant à elles, sont fondées principalement sur les impacts sur la ressource en eau.