La tendance à l'amélioration de la qualité de l'air en Île-de-France enregistrée ces dernières années s'est confirmée en 2020. Cette réduction de la pollution atmosphérique a été renforcée par l'impact conjoncturel des mesures de restriction d'activité durant les confinements. Pour autant, la pollution de l'air reste supérieure aux recommandations de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et la pollution à l'ozone (O3) suit une tendance inquiétante. Telles sont les principales conclusions du bilan de la qualité de l'air en Île-de-France pour l'année 2020 présenté ce jeudi 20 mai par Airparif.
Viser les recommandations de l'OMS
Le bilan de l'association agréée pour la surveillance de la qualité de l'air met d'abord en lumière une baisse « conséquente » des niveaux de pollution pour le dioxyde d'azote (NO2). Ainsi, certains axes routiers sont passés sous la valeur limite annuelle (identique à la recommandation de l'OMS pour ce polluant). Mais les niveaux moyens en NO2 restent « largement supérieurs » à cette valeur sur les axes les plus fréquentés, tels que le boulevard périphérique, ainsi qu'à proximité du trafic dans le cœur dense de l'agglomération parisienne. Cette baisse « a entraîné une forte diminution du nombre de personnes potentiellement exposées au dépassement de la valeur limite réglementaire pour ce polluant, qui est passé de près de 500 000 habitants en 2019 contre plusieurs dizaines de milliers en 2020 », explique Airparif.
Pour les particules (PM10 et PM2,5), l'amélioration est moins marquée. Toutefois, les valeurs limites réglementaires sont respectées aux stations de mesure, même si des points noirs persistent le long d'axes routiers très fréquentés. Par ailleurs, « la quasi-totalité de l'Île-de-France ne respecte pas la recommandation de l'OMS en matière de qualité de l'air concernant les particules PM2,5 ». Celle pour les PM10 est dépassée pour un Francilien sur deux. Les critères de l'OMS pour les particules, plus strictes que ceux retenus par l'Union européenne, tendent à devenir une référence depuis que la Commission a annoncé vouloir réviser le cadre règlementaire européen. En effet, l'exécutif européen affiche sa volonté d'aligner, d'ici 2023, la réglementation sur les recommandations de l'OMS, explique Jean-Felix Bernard, le président d'Airparif.
L'essentiel des pics de pollution causés par l'ozone
Reste la pollution à l'ozone qui progresse. « L'objectif réglementaire de qualité de l'air et le seuil recommandé par l'OMS [légèrement inférieur, ndlr] sont toujours largement dépassés en tout point de la région ». Preuve de l'enjeu croissant posé par ce polluant, il est à l'origine de neuf des 14 épisodes de pollution comptabilisés en 2020.
Cette progression de la pollution à l'O3 s'explique essentiellement par deux facteurs. Tout d'abord, si les émissions d'oxydes d'azote (NOx) ont tendance à baisser en ville du fait de la réduction des émissions du trafic routier, les émissions de précurseurs à l'ozone (les composés organiques volatils (COV) et le NO2) progressent globalement à l'échelle européenne. Cette progression accroît donc les risques de pic de pollution à l'O3. Ensuite, pour que la présence de précurseurs débouche sur un pic de pollution, il faut que l'ensoleillement permette la formation d'ozone. Or, l'été 2020, comme plusieurs étés précédents, a été très ensoleillé. Ce problème de pollution à l'ozone est globalement constaté dans tout l'hémisphère Nord, précise Airparif.
Le confinement a accentué la tendance baissière
Bien sûr, les restrictions de déplacement liées à la Covid-19 ne sont pas totalement étrangères aux résultats de 2020. Airparif s'est livré à un exercice de modélisation de la qualité de l'air sans les mesures de restriction d'activité liée à la pandémie. L'exercice a porté sur le NO2 et les particules. En effet, justifie Airparif, les pics d'ozone sont généralement observés en juin-juillet-août, « trois mois qui n'ont pas (ou peu) été concernés par les restrictions d'activité en lien avec la crise sanitaire ».
L'impact des confinements est particulièrement visible sur la pollution au NO2, les émissions étant principalement liées au trafic routier. « À titre d'exemple, les concentrations en dioxyde d'azote ont baissé de 30 % sur Paris, deux tiers de cette baisse s'explique par les mesures de restriction d'activité dans le cadre de la lutte contre la pandémie », explique Airparif. En petite couronne, la réduction de la pollution, de l'ordre de 20 %, s'explique pour moitié par les restrictions sanitaires. En grande couronne, l'effet Covid est largement estompé.
L'impact des restrictions est plus contrasté pour la pollution aux particules, les sources d'émissions étant dorénavant moins liées au trafic routier, en particulier en hiver. Airparif a notamment étudié le carbone suie pour distinguer la part de la pollution liée au trafic de celle liée à la combustion de la biomasse. L'association montre que la proportion de la population exposée à un dépassement de la recommandation annuelle de l'OMS en PM10 passe de 30 % en 2019 à 10 % en 2020. Ce gain de 20 points s'explique pour les trois quarts par l'évolution tendancielle et pour le quart restant par les restrictions sanitaires. D'ailleurs, Airparif signale aussi que l'Île-de-France a connu un épisode de pollution aux PM10 le 28 mars 2020. « Malgré le fort ralentissement de nombreux secteurs d'activités, [ce pic] s'explique par des émissions de particules provenant de secteurs non concernés par le confinement : notamment le chauffage au bois et le secteur agricole, avec des épandages d'engrais azotés caractéristiques du début du printemps », explique l'association, ajoutant que « cet épisode aurait néanmoins été plus conséquent avec un trafic normal ».