Maîtrise du foncier et des déplacements urbains avec les PLU, service public de l'eau si la commune décide du passage en régie, entretien des parcs et jardins, les compétences des communes en matière d'aménagement de l'espace sont nombreuses. Les maires ne manquent pas de leviers d'action dès lors que les municipalités entendent initier des politiques environnementales.
Elles peuvent favoriser la restauration des espaces naturels et inciter à des pratiques respectueuses de l'environnement. Grâce aux schémas de cohérence territoriale (SCOT) et aux Plans locaux d'urbanisme (PLU), le maire peut prendre les dispositions qui s'imposent pour préserver les terres agricoles périurbaines, en particulier celles consacrées aux productions maraîchères (légumes). Les communes et les collectivités locales en général ont la faculté d'introduire des critères de qualité et de traçabilité pour approvisionner les cantines municipales.
Compte tenu de leurs prérogatives en matière d'aménagement du territoire et de développement économique, les communes disposent d'alternatives énergétiques possibles dans le choix des modes de transports, l'utilisation du potentiel solaire, la valorisation des sous-produits forestiers, le traitement et la valorisation énergétique des déchets et des eaux usées. Le maire a la faculté de choisir les équipements publics de la commune. Il peut introduire une clause environnementale dans les appels d'offre.
Des leviers nombreux
Les communes et les communautés urbaines doivent assurer la gestion des déchets ménagers sur leur territoire : collecte, transport, stockage, tri et traitement. Elles peuvent instaurer une redevance incitant au tri, mettre en place des plans de réduction des déchets à la source en concertation avec les habitants et mener des campagnes d'information. Faciliter l'installation d'entreprises de réinsertion centrée sur la réparation et le recyclage en s'appuyant sur les acteurs locaux de la formation est également de leur ressort ou de celui de l'intercommunalité.
Pour autant, dans un contexte de crise des ressources financières se pose la question des moyens de l'action publique locale. La réforme territoriale donnera-t-elle davantage de soutien aux intercommunalités sur la base des transferts de compétences (urbanisme, transports, eau) et d'une répartition financière équilibrée ? Renforcera-t-elle la démocratie locale ? Permettra-t-elle de mieux contrôler l'étalement urbain, de limiter l'artificialisation des sols ?
De l'avis de Catherine Hervieu, vice-présidente (EELV) du Grand Dijon chargée des mobilités alternatives et co-auteure du Manifeste pour la transition écologique des territoires publié par la Fédération des élus verts et écologistes, il y a encore du chemin à parcourir vers des logiques de solidarité et de péréquation et non de compétition. Quant à la réforme territoriale en cours, "personne n'y comprend grand chose". La loi est en arbitrage à Matignon. La fiscalité locale instaurée par Nicolas Sarkozy, qui a mis en œuvre des péréquations horizontales et verticales pour compenser la suppression de la taxe professionnelle, est compliquée. "Même les services fiscaux ne s'y retrouvent pas".
Démocratisation en cours
Pour autant, la démocratisation des instances locales fait son chemin. Pour la première fois, les électeurs vont pouvoir connaître le nom des délégués qui siègent dans les intercommunalités, puisque celui-ci figurera sur les listes municipales, même s'ils ne sont pas encore élus par le suffrage universel direct, "qui aurait l'avantage de faire valoir un projet communal auprès des habitants", souligne Mme Hervieu. Selon les écologistes, il reste du chemin à faire sur la voie du renforcement de la démocratie locale : "L'appropriation du fait intercommunal doit se poursuivre tout au long du mandat avec la création de commissions extra-communautaires thématiques, conseils décentralisés dans les communes, compte-rendu d'actions tout au long du mandat", notent-il dans le Manifeste pour la transition écologique des territoires.
"Le fait qu'il y ait 36.000 communes dans ce pays est une spécificité française, c'est le fruit de l'histoire institutionnelle. Les communes ont été crées suite à la Révolution pour remplacer les paroisses de l'Ancien Régime. Il y a ainsi quelque 705 communes de moins de 100 habitants en Côte d'Or", note Catherine Hervieu, qui observe "un mouvement où la place des communes va être renforcé". Face à cet émiettement, les intercommunalités s'imposent naturellement comme des espaces de mise en cohérence géographique et politique, mais doivent affronter les réticences des maires à transférer une partie de leurs prérogatives.
Des expérimentations partout
Les enjeux environnementaux sont liés aux sensibilités locales. En Ardèche comme dans le Languedoc, là où les concessions de gaz de schiste ont mobilisé les foules, un terreau citoyen fait émerger des maires qui accordent une importance centrale à ces thématiques. En Côte d'Or, les grands céréaliers financés par la PAC donnent une place importante à la FNSEA, qui pèse sur les orientations politiques locales. Dans l'Eure, à une centaine de kilomètres à l'ouest de Paris, la commune de Saint-Pierre de Vauvray (1.345 habitants) a vu sa sociologie évoluer. Celle-ci est caractérisée par de l'habitat périurbain rural au milieu de monocultures céréalières et par l'interdiction, dans certaines communes, de boire de l'eau du robinet en raison du fort taux de nitrates. Les urbains viennent s'y installer comme à la campagne. Sensibles à la qualité de vie, ils font émerger un candidat sensibilisé à la pollution de l'eau, président du syndicat de l'eau Seine-Aval.
Dans le Pas-de-Calais, à Loos-en-Gohelle, cité minière en déshérence, la désindustrialisation a inspiré au maire Jean-François Caron et son équipe un défi : impliquer les habitants dans une expérimentation de la durabilité à l'échelle de la commune, en faire une ville-pilote : "Considérant la commune comme un écosystème complexe (naturel, patrimonial, humain et culturel) lui-même intégré dans un écosystème plus vaste, les élus ont clairement choisi de s'orienter vers un modèle de développement qui tire les leçons du passé et n'oublie personne". Le projet de ville est défini avec les habitants. Son point d'orgue sera la « co-construction » d'un éco-quartier « Rifkin », du nom du promoteur américain de la Troisième Révolution industrielle, selon trois piliers : énergies renouvelables, bâtiments producteurs d'énergie, stockage internet de l'énergie et mobilité douce.
A Saint-Nolff, village de 3.887 habitants dans le Morbihan, un plan zéro-phyto a été mis en œuvre, résultant d'un Agenda 21 adopté par la commune en 2006. Celui-ci engage la commune à n'utiliser aucun produit phytosanitaire ou anti-mousse sur l'intégralité du territoire communal, cimetière et terrains de sport inclus. "Tout n'a pas été facile... Un important travail pour faire évoluer les pratiques et les mentalités a été entrepris", témoigne l'adjointe à l'environnement Anne-Laure Coudal. Le chemin reste long, mais tout reste ouvert.