La seconde phase de consultation sur la prochaine feuille de route Economie circulaire entre dans une nouvelle étape. Après avoir mis sur la table le retour de la consigne, Brune Poirson dévoile les mesures pour "mieux produire". La secrétaire d'Etat du ministère de la Transition écologique a profité d'une visite dans l'usine de recyclage de la société Machaon (Marne) pour livrer son objectif : systématiser et inciter économiquement à l'éco-conception des produits, "vecteur d'innovation et d'emplois".
Des Assises de l'éco-conception des emballages
Pour développer la pratique de l'éco-conception, le gouvernement propose le lancement d'Assises de l'éco-conception des emballages. Il veut faire le lien avec les Etats généraux de l'alimentation pour encourager la conception d'emballages biodégradables, compostables, biosourcés ou recyclables. La question de la mise sur le marché de nouveaux matériaux sans étude sur leur recyclabilité sera sans doute abordée.
Pour l'instant, le ministère mise sur la signature d'accords volontaires avec les entreprises pour encourager la pratique de l'éco-conception, en particulier celles qui mettent sur le marché des produits non couverts par un dispositif de type "responsabilité élargie du producteur" (filière REP). Ces produits représentent environ un tiers des déchets jetés. Il n'exclut pas la création d'un soutien économique ad-hoc, fiscal ou autre. Ce soutien pourrait être un bonus récompensant les entreprises qui joueraient le jeu.
Des objectifs d'intégration de matières recyclées
L'éco-conception pourrait créer un appel d'air pour l'intégration de matières recyclées. Là aussi, le gouvernement compte sur des accords volontaires de l'ensemble des acteurs (fournisseurs de matières vierges, fabricants de produits, metteurs sur le marché, collecteurs et gestionnaires de déchets), assortis d'objectifs d'incorporation de matières recyclées. "En l'absence de tels accords avant un an, des obligations réglementaires pourront être imposées sous forme de taux minimaux d'incorporation et/ou de marché de certificats d'incorporation", prévient le gouvernement.
Mais l'utilisation de matières recyclées se heurte parfois à des problèmes de taille : disponibilité de la matière en quantité et en qualité, contamination éventuelle des matières au fil de leurs utilisations, ce qui les rend incompatibles avec certains usages comme l'emballage de produits alimentaires.
Pour accroître les volumes et la qualité des matières recyclées disponibles, le gouvernement envisage un accompagnement à l'investissement productif. Il s'agira "d'utiliser les leviers économiques ou fiscaux pour créer de nouvelles usines de recyclage. Le choix des projets soutenus pourrait être fonction des tonnes de CO2 évitées", précise le ministère.
Création d'une programmation pluriannuelle des ressources
En parallèle à l'utilisation renforcée de matières recyclées, l'Etat veut développer la conscience d'une ressource finie. Il propose de fixer des objectifs de réduction de consommation de matières par secteur / produit / équipement sous la forme d'engagements volontaires. La France pourrait également mettre en place un premier "plan ressources France" selon une "programmation pluriannuelle des ressources (PPR)" pour les ressources jugées les plus stratégiques. A l'image de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), la PPR programmerait les besoins et les approvisionnements en matières.
Le gouvernement travaillerait avec les filières industrielles pour développer une démarche d'approvisionnement soutenable en matières premières (ressources minérales et métalliques, biomasse) d'ici à 2019. Elle s'accompagnerait "d'une politique industrielle ambitieuse de valorisation du stock de matières (et notamment de métaux critiques) contenues dans les déchets en s'appuyant sur les propositions du comité des métaux stratégiques (COMES)". Dans cette optique, la réforme du code minier serait initiée en 2018.
Pour appuyer cette politique, le ministère propose la création de nouveaux outils d'aide à la décision. France stratégie établirait par exemple des trajectoires de "valeurs de référence associées à la disponibilité des ressources", en commençant par les plus critiques (cobalt, cuivre, lithium), pour intégrer ce risque dans l'évaluation des politiques publiques. Il mise sur l'utilisation de la norme ISO 26000 sur la responsabilité sociétale des entreprises pour développer les pratiques d'achats durables. Il faudra aussi développer des outils pour permettre aux industriels volontaires d'établir un "bilan matières", sur le modèle des "bilans de gaz à effet de serre".