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Gaz de schiste : la France ne sera jamais l'Amérique !

Dans le cadre du débat sur la transition énergétique, six experts des gaz de schiste ont échangé. Les pro comme les anti s'accordent sur un point : l'exploitation des gaz de schiste en France ne créera pas de "renouveau" à l'américaine.

Energie  |    |  P. Collet
Environnement & Technique N°334
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°334
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L'exploitation des gaz de schiste en France, si exploitation il y a, n'aura pas le même impact qu'aux Etats-Unis. Tel est l'un des points forts partagés par l'ensemble des participants à la table ronde sur les gaz de schiste organisé mercredi 3 juillet dans le cadre du débat national sur la transition énergétique (DNTE). Bien sûr, ce constat ne revêt pas le même sens selon les acteurs. Pour les "pro gaz de schiste", il faut comprendre que les éventuels impacts environnementaux constatés outre-Atlantique ne se reproduiront pas en France. La France peut donc se lancer dans l'aventure. Côté opposants, il faut entendre que l'embellie économique attribuée aux gaz de schiste n'aura pas lieu ici. La France n'a donc rien à y gagner.

Néanmoins, au-delà de ces sous-entendus divergeants, le constat est partagé : "on ne peut pas s'attendre à une révolution de type américaine", a synthétisé Jean-Marie Chevalier, économiste à Paris Dauphine.

Cette table ronde, qui réunissait trois partisans et trois opposants à l'exploitation des hydrocarbures non conventionnels, a été l'occasion d'échanges mesurés. Ainsi, le climatologue Philippe Ciais, du Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE), et de Jérôme Courcier, représentant d'intermédiaires financiers, qui, bien que classés parmi les opposants, ont présenté autant d'arguments pour que d'argument contre. Dans le camp adverse les "pro gaz de schiste" ont été d'une grande prudence concernant les impacts positifs escomptés. Si l'affrontement est loin d'être clos, certains consensus apparaissent.

Ce n'est pas LA solution

S'il y a bien un point sur lequel se sont entendus l'ensemble des participants c'est que l'enjeu des gaz de schiste n'est pas central dans le débat sur la transition énergétique. Si le gaz a un rôle à jouer dans cette transition, Christian Besson, de l'Agence international à l'énergie (AIE), considère néanmoins que ce rôle n'est pas suffisant pour limiter la hausse des température à 2°C.

A ce sujet, Bruno Courme, directeur de Total Shale Gaz Europe, a synthétisé les grandes lignes des impacts climatiques. Si le gaz se substitue au charbon, l'impact est bénéfique, s'il se substitue à des importations, l'impact est neutre et s'il s'ajoute aux autres sources énergétiques, l'impact devient alors négatif.

Quant à Philippe Ciais, il a lui aussi tempéré la place du gaz dans la décarbonation de l'économie mondiale. Le climatologue se réjouit de la baisse des émissions des Etats-Unis, liée à la substitution du charbon par du gaz, mais il la relativise et considère que "ce n'est pas l'embellie dont on a besoin". Cela d'autant plus que les gains d'émissions de gaz à effet de serre sont très controversés et dépendent en grande partie des niveaux de fuite retenus dans les statistiques nationales. A 3% de taux de fuite le gaz de schiste est "relativement compétitif" sur le plan climatique par rapport au charbon, mais à 7 % "ça fait très mal" prévient le climatologue qui déplore que le taux retenu actuellement, proche de 2%, ne soit qu'une estimation sans réelle base scientifique. Or les premiers travaux plaident pour une révision à la hausse de ce taux à 4%, estime Jérôme Courcier.

Les chimistes montent au créneau

Deux représentants de l'Union des industries chimiques (UIC) ont interpelé les participants sur les enjeux de compétitivité associés au prix du gaz, cet hydrocarbure étant à la fois une source d'énergie et une matière première pour le secteur. Ils ont notamment mis en avant un renouveau de l'industrie chimique aux Etats-Unis où près d'une vingtaine de vapocraqueurs sont en construction.
A ce sujet, Christian Besson a été particulièrement prudent bien qu'étant plutôt favorable au gaz de schiste. Il a ainsi évoqué un "début de renaissance" de l'industrie chimique ajoutant qu'"on verra dans quelques années si cela continue". En cause, notamment, les doutes sur le maintien à long terme d'une production élevée. En effet, "le déclin [des volumes produits par chaque puits] est extrêmement rapide" a expliqué Bruno Courme, évoquant une chutent de 60 à 70% dès la deuxième année après la mise en production. D'où la grande prudence des observateurs quant aux niveaux de production à long terme. Ainsi, si l'AIE prédit une forte production de gaz aux Etats-Unis, l'analyse de l'Agence se limite à l'échéance 2018…
Impact économique modéré

Sur le plan économique, si, Jean-Marie Chevalier, a évoqué quelque 1,5 millions de créations d'emplois directs, indirects et induits aux Etats-Unis, aucun des intervenants n'a promis monts et merveilles. Bien au contraire. En cause, notamment, l'absence d'étude économique portant sur la France, a expliqué Thomas Porcher, chercheur à l'ESG Management, jugeant que "l'évaluation sérieuse de l'impact économique est nécessaire pour dissiper le mirage du gaz de schiste".

Bruno Courme a été très clair : "ce n'est pas une industrie qui crée des centaines de milliers d'emplois (…) il ne faut pas s'illusionner". Pour le responsable de Total, il y aurait tout au plus quelques milliers d'emplois à attendre. Un niveau faible mais qui mérite d'être pris en compte à l'heure ou les plans sociaux se succèdent, estime-t-il.

Quant à Jérôme Courcier, il a non seulement confirmé ce point, mais a aussi averti sur la nature des emplois créés : les deux tiers sont temporaires et peu qualifiés. Le tiers restant est constitué d'emplois itinérants, qualifiés et réservés aux spécialistes nord-américains de la fracturation hydraulique.

De même, tous les participants ont estimé que le prix du gaz français ne baisserait pas sensiblement avec l'exploitation des gaz de schiste, compte tenu des rigidités du marché européen du gaz. Seuls 30 à 40% de l'approvisionnement se fait au prix du marché (qui pourrait baisser si la production était conséquente), quand les 60 à 70% restant sont fixés par des contrats à long terme, a expliqué Thomas Porcher.

Réactions6 réactions à cet article

En dehors que l'article, comme les journalistes français continuent à confondre gaz de schiste (disons du méthane pas pur) et les huiles dites non conventionnelles exploitées en ALABAMA, il y a en FRANCE une mauvaise foi, qui en dehors de ceux pour qui cela les dépassent et qui sont excusables) proche de l'escroquerie.
En effet, on va continuer à faire tourner des voitures qui vont émettre du CO2 qui utiliserons de l'essence ayant pour origine les huiles non conventionnelles. Le surplus de CO2 émis pour exploiter ces huiles (grosso modo au moins autant que quand on les brûle c'est à dire 2,6 kg par litre d'essence) a bien poour cause et origine celui qui le consomme et non celui qui le produit.
On se veut moralisateur mais in fine, on est producteur de pollution sur la terre.

zaravis | 05 juillet 2013 à 11h15 Signaler un contenu inapproprié

Comme géologue pétrolier et ingénieur de forage je sais que la production de fracture est très importante au début mais chute très rapidement. D'autre part, ce gaz pourrait être un appoint aux autres sources d'énergie, s'ajouter à la production d'hydocarbures en déclin et permettre d'attendre qu'une solution fiable et suffisante en energie soit trouvée...ce qui est loin d'être le cas !

aventurier | 05 juillet 2013 à 11h26 Signaler un contenu inapproprié

50% du gaz naturel en France est utilisé pour le chauffage résidentiel et tertiaire.

Pour l'année 2007, le chauffage (donc l'eau chaude sanitaire) a représenté environ 50% du gaz naturel utilisé (énergie primaire) en France. Soit 20,8 millions de TEP (tonne équivalent pétrole) pour 41 millions de TEP de gaz naturel.

En 2007, le chauffage a aussi utilisé 11,6 millions de TEP de fioul et 9,6 millions de TEP (111 TWh) d'électrique.

La priorité, c'est l'isolation, les pompes à chaleur et les chaudières biomasses. Afin d'en finir avec le chauffage au fioul, avec le chauffage au gaz et avec le chauffage électrique.

Si les bâtiments basse consommation (BBC) avaient été généralisés après 1973 (le premier choc pétrolier), nous n'en serions pas là.

laurent | 05 juillet 2013 à 12h16 Signaler un contenu inapproprié

revolution c'est vite dit...

On va continuer à faire bruler du combustible avec de l'oxygène de l'air pour produire de la chaleur. quand le réservoir sera vide que pourra t'on faire après?

La c'est la révolution.

audaces | 08 juillet 2013 à 10h33 Signaler un contenu inapproprié

Tant que les comparaisons des solutions et des impacts se feront sur une base monétaire, les conclusions seront erronées. Il faut faire un bilan purement énergétique : combien investit-on en énergie vs quelle production d'énergie ?
Les autres aspects, tel le réchauffement climatique, sont à évaluer avec d'autres critères.

Jean-Claude HERRENSCHMIDT | 09 juillet 2013 à 09h11 Signaler un contenu inapproprié

Les chimistes "monte" au créneau ...

Pascal | 09 juillet 2013 à 10h26 Signaler un contenu inapproprié

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