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« Nous rencontrons de plus en plus de difficultés à maintenir la profondeur maximale dans nos canaux »

Voies navigables de France gère 6 700 km de voies navigables et près de 4 000 ouvrages d'art. Les conditions rencontrées cet été, et plus largement la baisse des débits annoncés, impliquent des adaptations. Explication de Guy Rouas, expert eau de VNF.

Interview  |  Eau  |    |  D. Laperche
   
« Nous rencontrons de plus en plus de difficultés à maintenir la profondeur maximale dans nos canaux »
Guy Rouas
Expert eau auprès du directeur général de VNF
   

Actu-Environnement : Comment Voies navigables de France a-t-il géré le contexte de stress hydrique rencontré cet été ?

Guy Rouas : Grâce à nos aménagements, une grande partie de notre réseau – 85 % - a pu rester ouvert à la navigation. Nous disposons de 4 300 km de canaux artificiels à l'échelle de la France et de 2 400 km de rivières moyen et grand gabarits. Cet été, par exemple, compte tenu des débits faibles de la Loire, nous avons arrêté d'alimenter le canal qui longe le fleuve.

Nous avons également, pour certains canaux, réduit le mouillage, la profondeur d'eau garantie, de 2 à 1,8 mètre, pour maintenir une navigation pour la plaisance, car ces canaux ne reçoivent plus beaucoup de péniches de transport.

Concernant les grands fleuves, grâce à nos barrages et à nos écluses, nous n'avons pas rencontré de difficultés majeures. Le réseau grand gabarit est resté ouvert, à l'exception de la Moselle amont.

Jusqu'à présent, nous avons réussi à stocker de l'eau pour assurer la navigation, mais nous nous rendons compte, ces dernières années, en particulier cet été, que nous rencontrons de plus en plus de difficultés à assurer la quantité d'eau suffisante pour maintenir la profondeur maximale de nos canaux.

AE : Pouvez-vous venir en soutien à des usages prioritaires de l'eau dans un contexte de sécheresse ?

GR : C'est déjà le cas en fonctionnement « normal ». Nos barrages en rivières peuvent constituer un soutien d'étiage. Sur la Seine, avec les débits de cet été, il n'y aurait quasiment pas eu d'eau à Paris, sans les barrages. Par exemple, celui de Meaux, en maintenant le niveau d'eau dans son cours, joue sur celui de la nappe et permet à des puits de captage d'être mieux alimentés. Nous avons de plus en plus d'accords de ce type avec des collectivités, notamment pour l'alimentation en eau. Un certain nombre d'acteurs, y compris des entreprises ou des agriculteurs, peuvent avoir des prises d'eau dans nos cours d'eau. Ils bénéficient d'une autorisation accordée par l'État que nous mettons en œuvre sous la forme d'une convention d'occupation temporaire passée entre les usagers et VNF.

Nos barrages réservoirs représentent, quant à eux, 160 millions de mètres cubes. Nous avons des accords pour plusieurs d'entre eux, qui contribuent à l'alimentation en eau de certaines villes. Par exemple, nous réservons une tranche de l'eau de nos barrages pour l'alimentation de Langres. Nous gérons notre eau pour assurer l'alimentation des différents usages. Lors d'événements extrêmes, les arbitrages sont opérés en cellule de crise. Lors de périodes de trop basses eaux ou, à l'inverse, lors d'inondations, le préfet réunit les directions départementales des territoires, les agences de l'eau, Voies navigables de France, EDF, des représentants des collectivités, etc., pour discuter sur les arbitrages et décisions qui doivent être rendus ainsi que sur les actions de gestion à mettre en œuvre. Ces cellules sont à l'échelle locale, territoriale, départementale, voire, dans certaines crises, à celle du bassin.

AE : Ces accords disposent-ils de contreparties pour VNF ?

GR : Nous sommes une entreprise publique au service de l'État. Nous n'avons pas d'indemnisation au titre des interdictions ou restrictions imposées sur les usages en période de crise. L'État considère que cela fait partie de notre travail. De la même manière, lorsque nous ne pouvons pas mener à bien notre activité d'exploitation pour la navigation - si nous sommes dans une situation de manque d'eau -, nous n'aurons pas à indemniser les navigants : c'est un cas de force majeure. Si c'est de notre fait, c'est différent, il existe des principes d'indemnisation pour les usagers de la voie d'eau.

AE : Réalisez-vous des exercices nationaux de gestion de crise ?

GR : Un exercice de crise de type sécheresse a été organisé par les services de l'État au début de cette année, le long du Rhin. Mais nous sommes plus associés à ce genre d'événements pour la prévention des inondations que pour les situations de sécheresse. Ce risque nécessite une grande coordination avec les services de l'État, de la sécurité civile, les collectivités territoriales, etc.

Concernant l'étiage, nous réalisons un certain nombre d'exercices en interne. Les mesures prévues avant l'arrêt d'un canal sont, par exemple, de demander le regroupement de bateaux pour passer une écluse, afin de réduire les consommations d'eau, ou encore de baisser un peu le mouillage.

AE : Comment VNF se prépare-t-il à la réduction des débits des fleuves ?

GR : Tout d'abord, pour éviter les pertes en eau, nous devons entretenir, restaurer et maintenir le réseau au meilleur niveau possible. Éviter notamment que des ouvrages conduisent à des pertes d'eau inutiles. Nous envisageons également, pour certains d'entre eux, en particulier des barrages réservoirs, de remonter un peu les cotes d'eau, dans le cadre, bien entendu, de demandes d'autorisations et dans une vision de gestion intégrée par bassin : en vérifiant la stabilité de l'ouvrage, la capacité à augmenter le volume stocké et en regardant les conséquences sur le milieu. S'il faut aller plus loin dans les règles de gestion de l'eau, cela se fera avec les acteurs chargés de celle-ci, les préfets de département, de région, les collectivités territoriales, les chambres consulaires, etc. Nous commençons à discuter avec le ministère de l'Agriculture au sujet de l'utilisation de l'eau à des fins agricoles, dans l'intérêt général. Ce qui impliquera de la concertation, des études pour connaître les capacités possibles du système à satisfaire les besoins, mais aussi des conventions passées avec l'ensemble des acteurs pour régir les règlements d'eau et de partage de la ressource.

Un réseau fluvial régulé

Les 6 700 km du réseau des voies navigables se composent de fleuves et rivières ainsi que de canaux artificiels. Dans les deux cas, le niveau d'eau est ajusté par l'intermédiaire d'ouvrages, que ce soient des barrages mobiles sur des cours d'eau ou des barrages réservoirs pour les canaux. Au total, les retenues de VNF représentent environ 165 millions de mètres cubes de réserve.
Nos 4 000 km de canaux à bief de partage (1) pourraient être concernés par de nouvelles règles de partage de l'eau. Nous n'exclurons rien. D'ailleurs, nous souhaitons participer au chantier de la planification écologique consacré à l'eau.

Un autre élément important, c'est d'avoir des outils de mesure des hauteurs et les débits en temps réel, mais aussi des prévisions pour anticiper les crises et donc la gestion sur un bassin versant donné. Nous travaillons sur ce point avec Météo-France et nous suivons de près les avancées du projet Explore 2, qui donnera une vision de l'hydrométéorologie à l'horizon 2100. Un certain nombre d'armateurs réfléchissent, par ailleurs, à des bateaux moins gourmands en profondeur d'eau, pour s'adapter à la réduction des débits.

AE : Existe-t-il une bonne entente entre les pays frontaliers concernant la gestion des réseaux, par exemple le Rhin, dans un contexte de sécheresse ?

GR : Des commissions internationales existent depuis longtemps et des traités fixent des règles de fonctionnement sur les grands axes européens, par exemple sur le Rhin, la Meuse ou la Moselle. Nous discutons de l'usage de l'eau de façon ouverte et transparente.

Par exemple, sur l'axe du Rhin franco-allemand, des aménagements français et allemands ont été construits : cela montre bien que nous sommes sur une réflexion commune.

1. Point le plus haut d'un canal de jonction, entouré par des écluses pour permettre aux bateaux de franchir le dénivelé. Ils sont alimentés par des barrages-réservoirs.

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