Depuis leur retour sur le sol français, constaté en 1993, la population de loups a largement progressé pour atteindre une population estimée à 530 individus à la sortie de l'hiver 2018-2019. Le taux de reproduction de cette espèce protégée est d'environ 20 % par an. Elle est désormais présente dans 42 départements français, même si les 80 meutes identifiées en sortie d'été 2019, se trouvent toutes dans les Alpes et le Jura, rapporte l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae). L'établissement public a établi une synthèse, rédigée par Michel Meuret, directeur de recherche, et Élodie Régnier, à partir des chiffres de l'Office français pour la biodiversité (OFB) et de la mission loup de la Dreal Auvergne-Rhône-Alpes.
« Le Sud-Est de la France, avec son étendue et une quasi-contiguïté de parcs nationaux et régionaux, est un espace favorable à la dispersion des loups en Europe. Mais ces espaces sont aussi, et depuis des siècles, occupés et entretenus par l'élevage agropastoral qui contribue à façonner les paysages et fournit des habitats favorables à beaucoup d'autres espèces sauvages également protégées », explique Michel Meuret.
La prédation occasionne la mort, directe ou indirecte, de plus de 15 000 animaux (ovins, caprins, bovins, équins, etc.) par an dans les élevages de plein air. « Le nombre de victimes est en croissance linéaire quasi-constante depuis douze ans, avec 1 000 animaux tués en plus chaque année », relèvent les représentants de l'Inrae. Ceux-ci concluent à un échec de la protection des troupeaux malgré les moyens déployés : chiens de protection, clôtures sécurisées, présence humaine renforcée, enclos de nuit systématiques. Ces protections représentent, avec l'indemnisation des animaux tués, un coût de 38 millions d'euros par an. Or, sur l'arc alpin, plus de 90 % des attaques réussies se déroulent dans des élevages dotés des moyens de protection préconisés.
Les auteurs de la synthèse suggèrent de réapprendre au loup la crainte des humains, déplorant que, pendant plus de deux décennies, ceux-ci n'aient pas été autorisés à les repousser activement « y compris à l'aide d'un fusil ». Ils préconisent par conséquent la possibilité d'utiliser des moyens létaux, tels que le tir ou le piégeage, « avant, pendant ou juste après une attaque, pour éliminer les individus ou groupes trop insistants et associer la présence d'humains travaillant avec les troupeaux à un réel danger ». Une préconisation que le Gouvernement semble avoir déjà fait sienne en autorisant une augmentation du taux de prélèvement de l'espèce pouvant atteindre 19 % de sa population. « L'efficacité des moyens de protection et de répulsion non létaux devrait s'en trouver améliorée », estime Michel Meuret.