Saisie par la Commission européenne à la suite de la publication de l'étude sur le maïs transgénique NK603 et le Round-Up, l'Agence européenne de sécurité des aliments (Efsa) juge l'étude du professeur Séralini "d'une qualité scientifique insuffisante pour être considérée comme valable pour l'évaluation des risques". A la lumière de ces données, l'Efsa ne juge pas nécessaire de réexaminer se précédente évaluation sur l'innocuité de cet OGM, ni de tenir compte de ces conclusions dans l'évaluation du glyphosate, substance active contenue dans l'herbicide Round-Up.
L'agence a demandé aux auteurs des informations supplémentaires sur la conception et la méthodologie de l'étude, jugées pour l'heure insuffisantes, tout comme sur les objectifs de recherche, qui ne sont pas précisés. Une liste de questions leur a été adressée. Cette première analyse sera donc suivie d'un autre examen, dont les conclusions seront publiées d'ici la fin du mois d'octobre, après avoir pris connaissance des nouvelles données fournies par les auteurs. Ce deuxième examen prendra également en compte les contributions des États membres (comme la Belgique, la France, l'Allemagne et les Pays-Bas) et l'analyse des autorités allemandes chargées de l'évaluation du glyphosate.
"Certains pourront être surpris que la déclaration de l'Efsa se concentre sur la méthodologie de cette étude plutôt que sur ses résultats, mais c'est le cœur même du problème, observe Per Bergman, qui a dirigé les travaux de l'Efsa. Lors de la réalisation d'une étude, il est essentiel d'assurer qu'un cadre approprié est mis en place. Seuls des objectifs clairs et une conception correcte permettent de créer une base méthodologique solide à partir de laquelle des données précises et des conclusions valides peuvent être tirées".
Principaux défauts méthodologiques
La première observation de l'Efsa concerne l'espèce de rats utilisée par l'étude. Celle-ci est naturellement sujette à développer des tumeurs au cours de sa vie (deux ans), ce qui "signifie que la fréquence observée des tumeurs est influencée par la fréquence naturelle des tumeurs typiques à cette espèce, indépendamment de tout traitement. Or ce point n'est ni pris en compte ni discuté par les auteurs".
De plus, note l'agence, les deux cents rats utilisés ont été divisés en 10 groupes de traitement, avec un seul groupe témoin par sexe. "Cela signifie qu'il n'y avait pas de contrôle approprié pour quatre séries - environ 40% des animaux - qui ont tous été nourris de maïs GM traités ou non traités avec un herbicide contenant du glyphosate".
Ainsi, l'étude n'a pas respecté les protocoles standard reconnus internationalement et principalement élaborés par l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), qui imposent un minimum de 50 rats par groupe de traitement. "Le nombre d'animaux utilisés est insuffisant pour distinguer l'incidence des tumeurs dues au hasard plutôt qu'à des effets thérapeutiques spécifiques", note l'Efsa.
En outre, aucune information n'est donnée sur la composition de la nourriture donnée aux rats, sur son stockage et l'éventuelle présence de substances nocives - comme les mycotoxines - qu'elle pourrait ainsi contenir. Sans ces indications, il n'est pas possible d'évaluer l'exposition des rats au glyphosate.
Enfin, l'Efsa s'interroge sur la validité de la méthode statistique utilisée, qui n'est pas spécifiée par les auteurs.