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Économiser l'eau dans l'industrie (5/5) : Michelin fixe un prix interne de l'eau pour encourager à la sobriété

Michelin a choisi de se doter d'un indicateur qui prend en compte les risques de tension hydrique pour orienter ses décisions d'investissement. Cette initiative s'inscrit dans un objectif de réduction des prélèvements d'ici à 2030.

TECHNIQUE  |  Eau  |    |  D. Laperche
Économiser l'eau dans l'industrie (5/5) : Michelin fixe un prix interne de l'eau pour encourager à la sobriété
Environnement & Technique N°396
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°396
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« Si nous considérons que l'eau n'est pas chère, les investissements ne seront pas réalisés », affirmait Armelle Balvay, responsable des affaires publiques du groupe Michelin (1) à l'occasion d'un colloque organisé par l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse en octobre dernier. Pour prendre en compte les périodes de tensions (2) et orienter ses usines vers la sobriété, le groupe a donc établi un prix de l'eau en fonction du contexte local de la ressource dans chacune de ses usines. « La décision d'un prix interne de l'eau a été prise en avril 2022 par la gouvernance de l'environnement, explique Claire Moura, responsable du programme eau chez Michelin. Sur nos factures, le prix de l'eau se situe autour de 0,90 euro le mètre cube. Pour réaliser des projets avec un retour sur investissements entre six et vingt ans, face aux enjeux croissants et à nos objectifs de réduction des prélèvements pour 2030, nous avions besoin de mettre en place ce prix interne de l'eau. » Les projets sont désormais envisagés en prenant en compte un tarif de 5 euros le mètre cube, multiplié par un coefficient de stress hydrique propre à chacune des zones d'activité.

De l'eau pour quoi faire ?

Pour la fabrication de ses pneumatiques, Michelin utilise l'eau comme un fluide caloporteur. La vapeur d'eau et l'eau chaude assurent la cuisson, et l'eau froide le refroidissement des différents équipements, par exemple des machines d'extrusion ou directement la gomme, à la température nécessaire à la qualité des produits.
Au préalable, en 2020, le groupe avait effectivement établi les risques de tension pour les sites sur lesquels il est implanté. « Nous avions regardé la question du stress hydrique à travers plusieurs angles : l'épuisement de la ressource, la sécheresse, la compétition des prélèvements sur la disponibilité », explique Claire Moura. Il s'est reposé pour cela sur différentes bases de données, comme le Water Risk Filter du WWF, ou Aqueduct du Water Ressources Institute (WRI). Résultats ? Trois niveaux de coefficient de risque (1 ; 1,25 ; 1,5) ont été définis et attribués à chacun des sites. Ils sont mis à jour tous les trois ans pour prendre en compte l'évolution des pressions sur la ressource (3) .

« Cette approche a débouché sur une prise de conscience des enjeux liés à l'eau et a fixé la priorité des investissements au niveau des sites les plus sensibles », détaille Claire Moura. Le groupe a ainsi acté un investissement de 3 millions d'euros dans l'usine de Gravanches, à Clermont-Ferrand, pour réduire les prélèvements nécessaires aux opérations de refroidissement dans la chaîne de fabrication des pneumatiques. « Nous allons remplacer en 2024 nos tours de refroidissement classiques par des tours adiabatiques, développe Claire Moura. Cela réduira de 60 % les prélèvements d'eau du site. »

Réduire l'intensité des prélèvements

Cette initiative s'inscrit plus globalement dans un objectif de réduire l'intensité des prélèvements entre 2020 et 2030. Le groupe veut en effet diminuer de 33 % les prélèvements d'eau - un chiffre pondéré du stress hydrique propre à chaque site et rapporté à la production de semi-finis et produits finis. « Le niveau fixé pour cet objectif résulte d'une combinaison des enjeux de déficit hydrique mondiaux, mais également d'une analyse de faisabilité lorsque nous avons établi cette feuille de route en 2019 et 2020, indique Claire Moura. Nous sommes sur la bonne trajectoire pour y parvenir : nous en avons aujourd'hui réalisé plus de 13 % sur les 33 %. »

Michelin a également lancé des groupes de travail pour réfléchir à des moyens de résilience lors d'épisodes de sécheresse. « Nous nous sommes posé les questions pour connaître, en situation de sécheresse, ce que nous pouvons réduire, jusqu'à quel niveau pouvons-nous descendre par rapport à un plan de production ? Ou encore pouvons-nous produire différemment, profiter de certains ralentissements de l'activité en été pour baisser les prélèvements d'eau ? » énumère Claire Moura.

Le groupe a également cartographié les risques liés au stress hydrique de ses principaux fournisseurs. Il a en outre soumis ces derniers à un questionnaire qui vise plusieurs enjeux environnementaux, dont l'eau, pour évaluer leurs performances sur ces sujets. « En dessous d'une certaine note, nous les invitons à s'améliorer l'année suivante, détaille Claire Moura. Cet axe est toutefois à consolider. Nous sommes en réflexion - notamment par rapport à la directive sur les rapports développement durable des entreprises (CSRD) qui demande plus de transparence sur l'ensemble de la chaîne de valeur – sur la façon d'engager davantage les fournisseurs sur cette question de l'eau. »

Limiter les risques de fuite

La firme clermontoise prévoit aussi d'amplifier ses actions pour réduire les risques de fuites d'eau. « Pour le moment, nos opérations sont en réaction à des fuites avérées. Les fuites enterrées sont compliquées à gérer en pleine activité. Nous souhaitons davantage anticiper cette recherche : c'est l'un de nos axes de travail pour l'année prochaine, projette Claire Moura. Nous allons choisir des sites pilotes et, avec des entreprises spécialisées, sectoriser, cartographier, se servir des compteurs existants, et peut-être en ajouter pour mieux comprendre les consommations et localiser les fuites. »

Par ailleurs, Michelin souhaite réduire sa consommation de vapeur d'eau et compte notamment pour cela passer par l'électrification de certains postes de cuisson. L'entreprise est également en train d'élaborer un guide de bonnes pratiques des usages de l'eau à destination de ses usines. « Nous détaillons comment mieux gérer une tour de refroidissement, réaliser une purge sur une chaudière, mieux piloter une unité de déminéralisation ou d'osmose inverse… », illustre Claire Moura.

Michelin réfléchit enfin à des opportunités de recyclage de l'eau en interne, notamment à l'international. « Par exemple, est-ce que l'eau de purge des tours aéroréfrigérantes a la qualité suffisante pour servir en entrée à un autre procédé ? s'interroge Claire Moura. Nous avons franchi le pas dans des sites en Chine et en Thaïlande. On suit l'évolution des textes en France pour accélérer les investissements sur le recyclage de l'eau. »

1. Les prélèvements d'eau de Michelin s'élevaient à 26,1 millions de mètres cubes en 2022.

2. Lire Comment se préparer aux futures sécheresses ?
https://www.actu-environnement.com/dossier-actu/-secheresse-retenues-substitutions-plan-actions-chantier-planification-ecologique-eau-96
3. Lors de la sécheresse de l'été dernier, sur les 17 sites français de Michelin, 16 ont été soumis à des arrêtés de restriction d'eau dont un à un niveau de crise.

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