Robots
Cookies

Préférences Cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site. Certains sont essentiels, d'autres nous aident à améliorer le service rendu.
En savoir plus  ›
Actu-Environnement

Changement climatique : le bassin Rhône-méditerranée-Corse ajuste sa stratégie d'adaptation

Afin que le bassin Rhône-Méditerranée-Corse, très exposé au changement climatique, s'adapte, l'agence de l'eau révise sa stratégie de 2014. Lors d'un colloque, début octobre, elle a aussi ouvert la réflexion sur les leviers et difficultés à surmonter.

Eau  |    |  D. Laperche
Changement climatique : le bassin Rhône-méditerranée-Corse ajuste sa stratégie d'adaptation

« Avec une température moyenne de 21,1 °C, soit 3,6 °C au-dessus de la normale, septembre 2023 a été le mois de septembre le plus chaud que la France ait connu depuis le début du XXe siècle, constate le dernier bulletin national de situation hydrologique (1) d'octobre. En moyenne sur la France et sur le mois, la pluviométrie a été déficitaire de 20 %. » Si les moyennes ne sont pas rassurantes pour la période automnale, la situation s'avère contrastée sur le plan national, avec des territoires pour lesquels les effets du changement climatique et ses conséquences sur les ressources en eau sont plus marqués que pour d'autres. Notamment le secteur Rhône-Méditerranée.

« Le bassin Rhône-Méditerranée est l'un des plus exposés au niveau national », a ainsi rappelé Fabienne Buccio, préfète de la région Auvergne-Rhône-Alpes, à l'occasion d'un colloque organisé par l'agence de l'eau, début octobre. Ainsi, dans le bassin, une hausse de 1,8 °C a déjà été constatée sur la période 1960 à 2020. De la même manière, les sols se sont asséchés en moyenne annuelle de 18 à 37 %, selon les secteurs. Autre constat : la réduction de 10 % des chutes de neige et l'avancée de la fonte d'environ quatre semaines, depuis les années 1970. Les glaciers devraient, quant à eux, disparaître d'ici à la fin du siècle. Et les suivis hydrométriques montrent une baisse des débits estivaux.

Pour s'adapter à ces évolutions, un premier plan d'adaptation au changement climatique a été lancé à l'échelle du bassin en 2014. Mais ce dernier nécessitait une actualisation. « De plus en plus d'études montrent que les évolutions du climat ont des impacts sur le cycle de l'eau et que ces changements vont s'accélérer à l'horizon 2050, a indiqué Hélène Michaux, directrice du département du programme et des interventions à l'agence RMC. Il y a urgence à agir. »

Un plan d'adaptation révisé en décembre

Les six principes du nouveau plan d'adaptation du bassin RMC

1. Consommer moins d'eau ;
2. Préserver et restaurer des écosystèmes sains et fonctionnels ;
3. S'appuyer sur les services rendus par les sols ;
4. Établir des stratégies locales concertées ;
5. Planifier les solutions de demain ;
6. Le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux et le plan de gestion des risques d'inondation comme préalables.
Une révision du plan de bassin de 2014 a donc été engagée en 2022. Ses orientations ont été validées par le comité de bassin, fin septembre, et son adoption est prévue pour la fin de l'année. « Ce plan de bassin donne une stratégie, a développé Hélène Michaux. C'est un plan de mobilisation de tous les usagers de l'eau : il permet de répartir l'effort attendu de réduire de 10 % les prélèvements d'ici à 2030. » À l'occasion de son colloque, l'agence de l'eau a dévoilé les grandes lignes des nouvelles orientations. Le prochain plan dresse en effet les principes à respecter et les enjeux sur lesquels le bassin doit agir en priorité : la baisse de la disponibilité de la ressource en eau, l'assèchement des sols, la détérioration de la qualité des eaux, la perte de la biodiversité aquatique, humide et littorale et l'amplification des risques naturels liés à l'eau.

En regard, le plan propose 30 défis pour 2030, comme préserver 17 000 km de ripisylves ou tripler les surfaces de déconnexion des eaux pluviales. En complément, le plan mettra à disposition un nouveau diagnostic de la vulnérabilité des sous-bassins. « Certains territoires sont plus sensibles au risque d'inondation ou de détérioration de la qualité des masses d'eau, d'autres à l'asséchement des sols, a constaté Hélène Michaux. Le diagnostic permet d'identifier les vulnérabilités et appelle à mettre en place une stratégie locale adaptée. »

L'actualisation du plan d'adaptation bénéficie, depuis le début de l'été, des résultats de l'étude des impacts climatiques sur les ressources françaises en eau « Explore 2 ».

Les premiers pas vers une adaptation

Certains acteurs commencent déjà à réorienter leurs actions pour faire face à des tensions sur la ressource. C'est le cas de l'exploitation agricole des Perris, à Savigna dans le Jura. Les pratiques y ont été adaptées au changement climatique. « On a un second hiver par rapport au fourrage, il faut le prévoir », souligne Didier Juillard, éleveur de 150 brebis. Ce dernier a donc réduit les cultures estivales consommatrices d'eau, comme le maïs, au profit de cultures plus adaptées, semées à l'automne et récoltées en mai (méteil : mélange de céréales et de légumineuses). Autres initiatives pour faire face au manque d'eau : le remplacement de l'orge de printemps par l'orge d'automne et la récupération de l'eau de pluie des toitures pour abreuver le bétail. L'agriculteur utilise également des cultures fourragères d'été pour améliorer la structure des sols.

Autre exemple, cette fois dans le secteur industriel, celui du groupe Michelin. Le fabricant de pneumatiques utilise de l'eau pour chauffer et refroidir ses moules de cuisson. Il a besoin de 16 m3 d'eau par tonne de matériaux produite. Il s'est engagé d'ici à 2030 à réduire ses prélèvements de 33 %.  « Sur nos 17 sites de production en France, 16 sont sous arrêtés de restriction d'eau, dont un en situation de crise », a souligné Armelle Balvay, responsable des affaires publiques du groupe Michelin. Depuis deux ans, nous avons fixé un prix interne de l'eau, propre à chaque site, plus cher que le prix public et qui dépend du stress hydrique. » Cette approche permet de raisonner différemment, notamment pour engager des investissements en faveur de la sobriété. Le groupe demande également à ses fournisseurs des audits, assortis de plans d'action si besoin.

Des progrès restent à engager

Toutefois, les acteurs appellent à des évolutions pour mieux s'adapter aux nouvelles conditions. « Si nous voulons co-investir ensemble, par exemple pour réutiliser nos eaux usées traitées, il faut que nous ayons les mêmes obligations de réduire nos consommations, a pointé Armelle Balvay. Ce qui nous manque également, ce sont des données synthétiques concernant la ressource : nous avons des éléments par bassin, mais pas au niveau du territoire. »

Un manque de données que constatent également les associations. « Il faut des chiffres publics par bassin, par région, par département, pour voir ce qui conduit la demande en eau », a réagi Florence Denier-Pasquier, juriste environnement spécialisée dans le droit de l'eau et des milieux aquatiques et administratrice de France Nature Environnement (FNE). La transmission des informations de la planification passe par beaucoup de filtres et, à la fin, l'effort collectif est mal partagé. »

La juriste de la fédération d'associations a également mis l'accent sur les données nationales du recensement agricole réalisé en 2020 : celles-ci montrent qu'entre 2010 et 2020 les surfaces irriguées ont augmenté de 14,6 % et les prélèvements pour l'irrigation de 13,4 %. Cette progression est plus marquée dans les régions des Hauts-de-France, du Grand Est, de Bourgogne-France-Comté et d'Auvergne-Rhône-Alpes. La majeure partie des surfaces irriguées l'est pour la culture du maïs. « Il y aura besoin d'irrigation sur certaines cultures stratégiques, mais il faut donner des priorités », se positionne-t-elle.

Si le mode d'irrigation majoritaire reste l'aspersion (87 % des surfaces irriguées), une progression de 120 % est à noter pour la micro-irrigation et de 42 % pour l'irrigation gravitaire. L'aspersion progresse également de 17 %.

Autre point à faire évoluer, mis en avant lors du colloque : la connaissance autour des forages individuels domestiques. Normalement, les particuliers doivent déclarer leur réalisation en mairie. « La déclaration est obligatoire, mais n'est pas faite dans tous les cas, les contrôles nécessaires excèdent ceux qui sont disponibles aujourd'hui », a constaté Jean-Philippe Deneuvy, directeur de la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) Auvergne-Rhône-Alpes (Aura). Reste à voir les évolutions qui seront engagées. Le Plan eau prévoit en effet de renforcer, en 2024, leur encadrement et de donner pouvoir aux maires de sanctionner l'absence de déclaration.

« La contrainte est une façon d'accélérer les changements alors qu'un comportement volontaire crée un contrat entre la personne et son comportement, a quant à lui souligné Nicolas Fieulaine, professeur en psychologie sociale à l'université de Lyon. Tant que les environnements de vie n'auront pas changé, les comportements ne changeront pas… Changer les environnements de vie est le rôle de l'action publique. »

1. Consulter le bulletin national de situation hydrologique d'octobre
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-42844-bulletin-national-situation-hydrologique-octobre.pdf

RéactionsAucune réaction à cet article

Réagissez ou posez une question à la journaliste Dorothée Laperche

Les réactions aux articles sont réservées aux lecteurs :
- titulaires d'un abonnement (Abonnez-vous)
- inscrits à la newsletter (Inscrivez-vous)
1500 caractères maximum
Je veux retrouver mon mot de passe
Tous les champs sont obligatoires

Partager

Up-Flo Filter, dépollution d'eaux de ruissellement par filtration inversée STRADAL
DDSELECT : la nouvelle génération de décantation hydrodynamique STRADAL