Promise par la loi de transition énergétique, l'ordonnance encadrant l'autoconsommation d'énergie renouvelable a été publiée au Journal Officiel du 28 juillet 2016. Elle vise à lever les freins au développement d'installations destinées à consommer tout ou partie de leur production électrique en instaurant un cadre réglementaire. Pour les professionnels elle pose des "principes innovants" à même de développer un nouveau marché de proximité notamment pour l'énergie solaire.
"Ces dispositions vont démocratiser davantage la production décentralisée renouvelable. Par ailleurs, ce texte s'inscrit, pour le secteur, dans une démarche d'économie circulaire qui permet de répondre à une demande électrique locale par une offre électrique locale", commentent Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER) et Arnaud Mine, vice-président du SER et président de SER-Soler. "De nouveaux horizons s'annoncent pour la filière photovoltaïque, un verrou a sauté", selon Richard Loyen délégué général du syndicat solaire Enerplan. Ce nouveau terrain de jeu va redynamiser le marché et ouvrir de nouveaux business models", déclarait-il en juin dernier lors de la présentation du projet d'ordonnance.
Déclaration obligatoire des installations existantes
Toutes les technologies de production d'énergie renouvelables sont admises (solaire, petite-hydro, moulins, ...). L'appel d'offres portera sur des installations de 100 à 500 kW, pour un volume alloué de 40 MW. Les annonces ministérielles précédentes promettaient un volume de 50 MW dont 10 MW en outre-mer.
En cas de surplus de production, plus de soucis. Le producteur ne devra plus conclure obligatoirement un contrat de vente avec un tiers. Cette dérogation supprime par conséquent le besoin d'installer un second compteur. L'ordonnance prévoit que le surplus de production soit cédé gratuitement au gestionnaire de réseau pour combler les pertes techniques. Mais cette dérogation sera réservée aux petites installations. Un décret à venir devrait fixer le plafond à 3 kilowatts.
Cette dérogation n'est pas du goût de la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Dans un avis sur le projet d'ordonnance rendu le 20 juillet dernier, la CRE souhaitait que ce dispositif de cession des surplus "soit mis en place pour une période transitoire d'expérimentation d'une durée déterminée et fasse l'objet d'une évaluation". Rien de tout ça n'est prévu.
Cette dérogation est toutefois assortie d'une obligation de déclaration de toute installation de production d'électricité participant à une opération d'autoconsommation au gestionnaire du réseau public d'électricité, préalablement à leur mise en service. Les installations existantes devront être déclarées avant le 31 mars 2017.
Bientôt de nouvelles tarifications d'utilisation du réseau
Le fait de consommer une partie de sa production d'énergie modifie le rythme de sollicitation du réseau électrique et la coïncidence avec la pointe locale du réseau pourrait être différente pour un utilisateur participant à une opération d'autoconsommation individuelle et un consommateur qui n'y participerait pas. L'ordonnance demande donc à la CRE de créer une nouvelle tarification qui reflète cette utilisation particulière du réseau. De même, elle devra réfléchir à de nouveaux tarifs pour les opérations d'autoconsommation collective. En effet, aujourd'hui le tarif d'accès au réseau est le même quelle que soit la distance parcourue par l'électricité. En autoconsommation locale, l'électricité ne va pas aller très loin, d'où la nécessité d'adapter ces tarifs. Ce régime spécifique sera réservé aux installations d'une puissance inférieure à 100 kilowatts.
Dans son avis sur le projet d'ordonnance, la CRE avait pourtant fait part de sa réticence à créer des tarifs spécifiques à l'autoconsommation sachant qu'elle travaille actuellement à la refonte des tarifs en vigueur. Elle aurait souhaité que l'autoconsommation soit prise en compte dans l'établissement de ces futurs tarifs qui reflèteront davantage l'horosaisonnalité des consommations, avec quatre plages temporelles (hiver, été, heure pleine, heure creuse).
La CRE souhaitait également que le projet d'ordonnance soit modifié pour préciser que le producteur-vendeur d'une opération d'autoconsommation collective ne soit pas soumis aux mêmes obligations que les fournisseurs d'énergie. Ces derniers doivent par exemple disposer de garanties de capacités d'effacement de consommation et de production, et mettre en œuvre la tarification spéciale dite "produit de première nécessité". L'ordonnance ne précise à aucun moment que les producteurs ne seront pas soumis au régime des fournisseurs.