La nouvelle loi sur l'énergie, soutenue par le gouvernement et le Parlement suisse, a été acceptée hier par référendum. La loi entrera en vigueur au 1er janvier 2018 et sa mise en œuvre est prévue par étapes jusqu'en 2035. "Pour tous les écologistes, qu'ils soient politisés ou non, c'est un jour historique dans le pays", a affirmé la députée des Verts Adèle Thorens Goumaz à la télévision suisse publique RTS.
Une loi élaborée suite à la catastrophe de Fukushima
Quelques semaines après la catastrophe de Fukushima en 2011, le Parlement suisse avait adopté un texte sur la sortie du nucléaire indiquant que les cinq réacteurs en activité ne seraient pas remplacés à la fin de leur période d'exploitation, soit en 2034 pour le dernier.
Depuis cette décision, le gouvernement suisse a travaillé à l'élaboration d'une stratégie énergétique, dont la mise en oeuvre est prévue par étapes d'ici 2050. En septembre 2016, le Parlement a adopté une loi sur l'énergie constituant le premier volet de cette stratégie. Tous les partis ont soutenu cette loi, à l'exception du premier parti de Suisse, l'UDC (Union démocratique du centre) qui a obtenu l'organisation d'un référendum. Les Suisses ont accepté la loi à 58,2%.
La loi vise la réduction de la consommation d'énergie
La loi fixe des objectifs de réduction, par rapport à l'an 2000, de la consommation énergétique (16% d'ici à 2020, 43% d'ici à 2035) et électrique (de 3% d'ici à 2020, de 13% d'ici à 2035).
Elle met l'accent sur l'amélioration de l'efficacité énergétique dans le secteur du bâtiment. Le programme Bâtiment, initié en 2010, est reconduit et les possibilités de déduire fiscalement les travaux sont étendues.
La loi met en place un nouveau système de soutien aux énergies renouvelables
La loi instaure un dispositif d'aides aux énergies renouvelables (EnR) aligné sur le marché, qui ressemble fortement au complément de rémunération créé en France par la loi relative à la transition énergétique.
En Suisse, les EnR sont encouragées depuis 2009 par la rétribution de l'injection d'électricité renouvelable. Désormais, les exploitants d'installations dépassant une certaine taille devront vendre eux-mêmes leur électricité sur le marché, afin de renforcer l'incitation à injecter de l'électricité lorsque la demande est soutenue. La rétribution de l'injection versée se composera du revenu que l'exploitant obtiendra sur le marché et d'une prime d'injection.
Afin de soutenir les filières d'EnR qui ne sont pas encore mûres, la loi prévoit une contribution publique aux investissements pour les installations photovoltaïques, hydroélectriques et de biomasse. L'accent est mis sur l'hydroélectricité en raison de la topographie de la Suisse et de son niveau de précipitations moyen important : les grandes installations hydroélectriques existantes pourront bénéficier pendant cinq ans d'une prime de marché rétribuant l'électricité vendue sur le marché en dessous du prix de revient.
Ce dispositif de soutien est limité dans le temps. Un nouveau modèle d'encouragement devra ensuite prendre le relais.
Ces soutiens seront financés, en grande partie, par l'augmentation du supplément que les consommateurs suisses paient sur chaque kilowattheure (kWh) consommé (hausse de 1,5 à 2,3 centimes par kWh). D'après le gouvernement suisse, un ménage de quatre personnes ayant une consommation électrique moyenne devra payer 40 francs suisses (36,5 euros) par an de plus qu'aujourd'hui.
La loi organise la sortie du nucléaire
La loi interdit la construction de nouvelles centrales nucléaires. La part de l'énergie nucléaire dans la production d'électricité suisse s'élève aujourd'hui à 39% en moyenne, avec des pointes pouvant atteindre 45% en hiver, d'après les chiffres de l'Office fédéral de l'énergie.
Conformément au souhait des Suisses de ne pas fixer de dates butoirs pour arrêter l'exploitation des cinq centrales existantes, ces dernières pourront rester en service aussi longtemps que leur sûreté sera garantie. Après leur mise à l'arrêt, elles ne pourront toutefois pas être remplacées.
La loi entrera en vigueur au 1er janvier 2018. Elle constitue la première pierre de la stratégie énergétique suisse. Certains considèrent que les financements actuels ne sont pas suffisants et que de nouveaux leviers financiers devront être trouvés. Le gouvernement avait initialement prévu un deuxième volet de la stratégie énergétique 2050, portant sur l'introduction de taxes incitatives en matière climatique et énergétique. Ce volet ayant été enterré en mars dernier par le Conseil national, la chambre basse du Parlement, la concrétisation de la transition énergétique suisse est incertaine.