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Actu-Environnement

Tempête Xynthia : les trois failles françaises

Mauvais état des digues, zones inondables urbanisées et faiblesse de la prévention du risque inondation. La France a pris conscience de ces failles dans la douleur après le passage de la tempête Xynthia. L'efficacité du ''plan digues'' en dépend.

Risques  |    |  V. Roux-Goeken
Plusieurs digues de la côte atlantique se sont rompues pendant le passage de la tempête Xynthia du week-end dernier. C'est donc à leur renforcement que va s'atteler le ''plan digues'' présenté mercredi 3 mars en Conseil des ministres par le ministre de l'environnement Jean-Louis Borloo.

Le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et l'Inspection générale de l'administration devront remettre sous dix jours ''un pré-rapport sur les causes de la catastrophe, y compris la rupture de certaines digues indiquant les travaux à entreprendre de toute urgence'', selon le compte-rendu de l'Elysée. Des propositions devront être rendues d'ici deux mois pour recenser les digues et les lieux menacés, ainsi que déterminer les maîtres d'ouvrage exploitants de toutes les digues dans les zones à risque. Un plan de financement sur cinq ans destiné à la réfection prioritaire de digues existantes devrait être mis sur pied.

Vieillissement des ouvrages

Pour Nicolas Gérard-Camphuis, directeur du Centre européen de prévention du risque inondation (Cepri), ''la première difficulté de ce plan va être d'identifier les propriétaires des digues. Pour un tiers du linéaire de digues (3.000 à 3.500 km), soit le propriétaire n'existe pas, soit ne remplit pas son rôle d'entretien des digues''. L'enjeu est d'importance, car la protection contre les inondations relève de la responsabilité des propriétaires riverains. C'est donc à eux que revient la réalisation de digues de protection contre les inondations ainsi que leur maintien et leur contrôle. Ce cadre juridique est fixé par une loi napoléonienne de 1807 sur le dessèchement des marais. Puis, il va falloir demander leur avis à tous ces propriétaires, qu'ils cèdent leur propriété, avant de trouver une collectivité qui accepte de s'en saisir. ''Cela va prendre du temps, comme pour toutes les grosses infrastructures. Il suffit de voir le temps que prend la construction d'une autoroute, par exemple''. Le Cepri devrait proposer des solutions sur ce point à la fin du mois.

Le gouvernement va aussi buter sur l'identification des digues. Le ministère chargé de l'environnement (Meeddm) estime le linéaire de digues entre 8.000 et 10.000 kilomètres. 7.600 kilomètres d'entre elles atteignent plus de un mètre de hauteur. Parmi elles, 1.000 kilomètres sont considérées à risque.

Faiblesse de la prévention

''Les digues donnent une fausse impression de sécurité, tempère Benoît Hartmann, coordinateur du pôle aménagement durable du territoire chez France nature environnement (FNE). On ne pourra pas protéger tout le littoral français car cela coûterait beaucoup trop cher. Il va falloir une gestion d'un risque dynamique, qui évolue, et qui va être de plus en plus fort avec la montée annoncée des eaux liée au changement climatique''.

La tempête Xynthia permet aussi de rappeler l'insuffisance des plans de prévention du risques inondations (PPRI), prévus parmi d'autres plans de prévention des risques naturels par une loi de 1995. 12.000 communes devraient être dotées de PPRI, selon le Meeddm. Elles n'étaient que 7.600 à en être dotées fin 2009. Là aussi, les PPRI ne règlent pas tout. ''Il ne suffit pas de dire aux gens : 'vous êtes en zone inondable'. Il faut leur rappeler qu'il existe un risque sur les personnes, les biens, voire les deux''. La concrétisation d'un PPRI peut passer notamment par des travaux de réduction de la vulnérabilité du bâti existant. Or la lenteur et la complexité des travaux ont déjà été pointées par la Cour des comptes dans son rapport annuel 2009.

Urbanisation mal contrôlée

La hausse impressionnante du nombre de constructions nouvelles en zones inondables est à nouveau mise en exergue. L'inondation constitue le premier risque naturel en France. Le cas de La Faute-sur-Mer (Vendée), qui concentre la moitié des 52 personnes mortes noyées le week-end dernier, est frappant. Selon un rapport de la Direction départementale de l'Equipement (DDE) de Vendée rendu public en octobre 2008, et relayé par Reuters, ''la conjonction de deux phénomènes, de crue dans l'estuaire du Lay (la rivière qui sépare L'Aiguillon-sur-Mer de La Faute-sur-Mer) et de submersion marine, pourrait avoir un impact très important sur les zones densifiées à l'arrière d'un réseau de digues vieillissant''. Or plus de 3.000 maisons auraient été construites dans les années 1980 derrière une digue en terre créée après de précédentes tempêtes en 1926 et 1929, selon ce rapport… De 1999 à 2006, ce sont près de 100.000 logements qui ont été construits en zone inondable dans 424 communes françaises, selon le Service de l'observation et des statistiques (SOeS) du ministère de l'environnement.

Une tendance confortée au plus haut niveau de l'Etat. Dans une interview accordée à l'hebdomadaire Le Marin le 13 avril 2007, l'alors candidat à la présidentielle Nicolas Sarkozy estimait que la loi Littoral de 1986 devrait être renforcée ''pour mieux lutter contre les cas de détournement qui ont été constatés'', tout en étant assouplie ''pour ne pas entraver le développement normal des communes''… Rétropédalage lundi 1er mars. En déplacement en Vendée et Charente-Maritime, les deux départements les plus dévastés par la tempête, le chef de l'Etat ne pouvait pas faire autrement que de mettre en cause leur politique d'urbanisme.

Enfin, la lumière faite sur l'urbanisation du littoral en dépit du bon sens trouve une certaine résonance en terme d'adaptation au changement climatique. Dans son rapport sur le coût des impacts du réchauffement climatique de septembre dernier, l'Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (Onerc) chiffrait à plusieurs dizaines de milliards d'euros d'ici 2100 la destruction de logements causée par le recul de la côte (érosion ou submersion marine) pour la seule région Languedoc-Roussillon ! Solution envisagée par l'Onerc : construire en retrait des côtes. Mais les communes littorales soumises à de très fortes pressions résidentielle et touristique l'entendront-elles de cette oreille ?

Réactions7 réactions à cet article

Encore une histoire de di(n)gues

Pourquoi construit-on en zone inondable ?
Pourquoi construit-on dans les couloirs d'avalanches ?
Pourquoi les assurances remboursent-elles dans ces conditions ?
Pourquoi les gens victimes de tels sinistres s'empressent-ils de se réinstaller au même endroit ?
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Vorlat | 03 mars 2010 à 23h28 Signaler un contenu inapproprié
Evacuation de la population

Vous oubliez dans votre article l'insuffisance de gestion de crise de la part du Préfet et des maires qui auraient dû faire évacuer préventivement la zone.
L'alerte rouge de Météo France était claire. Des Plans communaux de sauvegarde sont ils élaborés alors qu'ils sont obligatoires quand un PPRinondation est prescrit.Il y a effectivement des responsables dans l'absence de décisiondes responsables de la sécurité des biens et des personnes que sont les Préfets et les maires.

pjr | 04 mars 2010 à 09h27 Signaler un contenu inapproprié
Re:Encore une histoire de di(n)gues

Peut être parcequ'on nous a vendu cette bicoque comme une réussite sociale, et que comme j'ai de l'argent et en plus je vis dans un monde de bisounours il ne peut rien m'arriver.
Mais l'argent ne calme pas les tempêtes, bien au contraire, j'ai bien peur que l'on rentre dans les exercices pratiques de Mr Nicholas Stern, ca risque de couter cher et malheureusement pas que en argent ...

chocard | 04 mars 2010 à 10h28 Signaler un contenu inapproprié
marais poitevin poldérisé : retour aux sources NL

il aura fallu attendre 7 jours pour qu'un grand
média s'interroge publiquement sur les solutions
entreprises par le peuple batave depuis son désastre
de 1953 ;
rappelons que ce marais poitevin, après des moines
(dont Rabelais) assécheurs, bénéficia de Bataves :
- "canal de ceinture des Hollandais"
- fermes baptisée Hollande , La Haye, etc ...
Comment dit-on RESPONSABILITE en langue flamande ?
voilà un terme méritant d'être importé illico !

HGc | 07 mars 2010 à 23h47 Signaler un contenu inapproprié
zones inondables et sinistres : la faute à qui ?

Le coût matériel des inondations survenues sur le littoral sera doublement supporté par les citoyens par le biais des primes d'assurances et par le prélèvement des impôts. Sur ce dernier poste, c'est autant d'argent qui n'ira pas à la rénovation de l'existant (bâti, routes....). Tout cela par la faute d'élus locaux qui accordent des permis des construire dans des zones inondables, situées en-dessous du niveau de la mer (ou des fleuves) avec l'accord de certains préfets peu scrupuleux. Les élus passent, les citoyens restent.....Quant aux pertes humaines nous n'évoquerons même pas les vies brisées et le coût social engendrés par le drame.
La même chose peut se produire au bord des fleuves, (comme la Loire) dans des bassins versants situés en point bas (en dessous du niveau du fleuve comme le bassin maraîcher de la Baratte à Nevers 58 ). Actuellement, à cette saison de l'année, nous composons avec les remontée de nappes phréatiques qui lorsqu'elles sont trop importantes envahissent les caves du faubourg de la Baratte.....Et pourtant, cela n'empêche pas les élus locaux de projeter l'urbanisation de ces terres de premières qualité car le secteur est divisé en trois zones (fort, moyen et faible aléas). L'expérience Xinthia n'empêchera rien malheureusement. Seuls les citoyens et les associations doivent veiller à préserver le littoral, les zones humides et inondables....

Saint-Fiacre Loire-Baratte | 08 mars 2010 à 15h44 Signaler un contenu inapproprié
Re:Evacuation de la population

Parfaitement d'accord sur ce point. même si l'absence de PPRi approuvé dispense de fait de la réalisation du PCS (plan communal de sauvegarde)l'existance du travail de Mr Raison ainsi que "l'alerte" précédente de Mars 2008 aurait dû conduire la commune et la préfecture à établir /adapter leur plan de crise au risque de submersion marine et donc prévoir l'évacuation dans des situations prévisibles. Reste à savoir si le bulletin de Météo France était explicite en ce qui concerne le risque de submersion et si le COD en préfecture avait les compétences pour interpréter ce bulletin et prendre la bonne décision à l'avance. S'agissant de l'Etat, il ne peut être jugé responsable selon la loi. Les responsabilités ne peuvent être recherchées que sur les personnes si elles sont avérées, ce qui est du domaine du subjectif pour un juge ...

jmr | 20 mars 2010 à 14h37 Signaler un contenu inapproprié
La tempête Xynthia, révélatrice de notre société

La tempête Xynthia est un révélateur => la vérité est que les digues n'ont pas été entretenues depuis des années. La DDE a tiré la sonnette d'alarme depuis au moins 1998, et à nouveau, dans un rapport en 2008. Mais cela n'intéressait personne; il fallait "réduire le poids des dépenses publiques". Aussi la raison essentielle de la catastrophe n'est-elle pas la construction en zones inondables, mais l'assèchement des budgets, la casse de la DDE maritime reversées aux collectivités locales sans moyens, et à cette situation va s'ajouter la dégradation des finances locales par la suppression de la Taxe Professionnelle. Pour moi, il y des responsables politiques au plus haut niveau, qui ont le sang de 54 victimes sur les mains; car c'est le fruit de leur politique, et pas celle des petits maires sur lesquels on tape aujourd'hui. Oui, la destruction de milliers de maisons est un scandale qui s'ajoute à ce scandale. Moi qui n'ai jamais mis les pieds dans la région et qui n'ai aucun intérêt à y défendre, qui ne travaille pas à la DDE, je suis scandalisé que personne de dise cela, ne le crie, ne le hurle !!! En France, aujourd'hui, la vérité est qu'à cause de ces politiques irresponsables, entièrement tournées vers la satisfaction des intérêts des plus riches, on n'est plus en sécurité nulle part !!!

Gilles P. | 10 avril 2010 à 11h22 Signaler un contenu inapproprié

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