A l'instar des 300.000 compteurs Linky installés par ERDF, les compteurs intelligents (smart meters) autres qu'électriques se développent pour optimiser la gestion du gaz, de l'eau et/ou des réseaux d'assainissement. Opérateurs et collectivités étendent ces systèmes qui permettent de télé-relever à distance les compteurs des particuliers, de proposer des plans tarifaires plus flexibles et de mieux gérer les pics de consommations via l'utilisation des communications. Objectif : contrôler et agir sur le réseau comme pour l'électrique.
Comment ? Des solutions de communication radio sont alors utilisées par les opérateurs permettant d'optimiser la batterie qu'il faut mettre dans le compteur.
Suez et Veolia sur le marché de la ''smart water''
Concrètement, ''la télé-relève à distance s'appuie sur des transmetteurs radio installés sur les compteurs, pendant 15 ans avec leur propre batterie, qui vont transmettre les informations de comptage vers des récepteurs disséminés en ville. Ceux-ci sont utilisés pour récupérer les données en provenance de chacun des émetteurs'', explique Pierre Sacareau, responsable innovations chez Ondeo Systems, filiale de Lyonnaise des eaux (Suez), qui depuis 2009 développe ces compteurs communicants notamment à Paris. Le groupe s'appuie sur une technologie de radio VHF de longue portée (plus de 1km). Ces mêmes récepteurs vont ensuite être raccordés par un autre réseau GSM à un système de collecte d'informations. Les données envoyées par voie hertzienne sont récupérées sur un fichier central, ce qui permet une gestion des dossiers beaucoup plus rapide. Puis une fois toutes ces informations collectées, l'opérateur met à disposition un service d'alertes en cas de surconsommations ou de fuites.
Un tel suivi des compteurs permet donc de détecter rapidement des consommations anormalement élevées en raison de fuite et/ou de matériels défectueux. Pour l'usager, le télé-relevé vise à lui permettre de mieux maîtriser sa facture au quotidien en suivant sa consommation via le Net et faire des économies. Il lui dispense par la même d'être présent lors des deux relevés annuels du compteur…
La solution de télé-relevé optimise ''les coûts'', affirment les gestionnaires de réseaux. Cette économie ''de temps et d'argent'' ne serait pas répercutée sur la note du client. Cependant, les compteurs communicants soulèvent certaines questions notamment sur le coût d'installation et la sécurisation des données personnelles.
''Près de 700.000 points de comptage intelligents sont déployés'' par le groupe dont plus de la moitié en France, a précisé le 25 mai le directeur d'Ondeo Systems Farrokh Fotoohi, à l'occasion du congrès SG Paris 2011 dédié aux smart grids. La filiale de Suez a également été retenue en mai 2010 par la société IBM pour mettre en place 250.000 compteurs d'eau intelligents sur l'île de Malte d'ici à 2013. ''Le groupe a atteint un chiffre d'affaires de 50 millions d'euros en 2010 pour cette activité et son objectif est de le multiplier par 4 d'ici 2016'', a souligné M. Fotoohi, et ce en installant 3 millions de compteurs intelligents en 2015. Outre sa filiale, Suez Environnement entend également accélérer la R&D dans la gestion intelligente de l'eau en proposant de solutions notamment aux grandes métropoles mondiales (dont la Chine), après avoir signé le 26 mai un accord avec General Electric (GE Energy, Power et Water).
Face à Suez, l'autre opérateur historique Veolia Eau généralise aussi les compteurs intelligents : plus de 200.000 ont été installés par le groupe en France comme à Metz (57). Le 28 mars dernier, Veolia a voulu se renforcer sur le marché et a créé avec l'opérateur de télécoms Orange la joint-venture baptisée m2o city, spécialisée dans les services de télé-relevé à destinations des collectivités. M2o city vient notamment d'obtenir un contrat avec le Sedif pour installer dans la région Ile-de-France 550.000 compteurs communicants. La nouvelle entreprise vise un objectif de près de 5 millions de compteurs d'ici à 10 ans.
Le ''smart water'' prend également de l'ampleur autour de consortiums internationaux. Schneider Electric ainsi qu'une quinzaine d'autres entreprises (Derceto, i2O Water, TaKaDu et Telven, Itron…) ont lancé mi-mai 2011 une alliance mondiale pour le développement de réseaux d'eau intelligents, le Swan (Smart Water Networks) qu'il s'agisse de la distribution d'eau potable ou du traitement des eaux usées.
Des compteurs communicants développés par GRDF
Comme pour l'électricité et l'eau, les compteurs communicants s'appliquent doucement aux réseaux gaziers et gagnent du terrain en France. La démarche est similaire. Ondeo Systems a été retenu pour l'une des quatre expérimentations menées par GRDF de février 2010 à juin 2011. L'expérimentation est également pilotée en partenariat avec trois autres équipementiers (Elster, Itron et Panasonic). Le déploiement des compteurs concerne les villes d'Auch (32), de Saint-Genis Laval et de Pierre-Bénite (69), d'Etampes (91) et de St-Omer (62).
GRDF a opté pour un système de type AMR (Automated Meter Reading), par radio à partir d'un réseau fixe. L'énergéticien a testé trois fréquences (169, 433 et 868 Mhz), avec un module radio installé sur les compteurs.''Les ondes radio émises sont très brèves, leur impact est équivalent à celui d'une télécommande de parking'', affirme-t-il.
Au total, 18.500 compteurs gaziers intelligents ont été installés au cours de l'expérimentation, a indiqué Patrick Dardoise, directeur du projet Compteurs communicants chez GRDF. Cela représente un coût de 3 millions d'euros pris en charge par l'énergéticien. La décision d'une éventuelle généralisation devrait être prise par la Commission de régulation de l'énergie (CRE ) ''cet été 2011''. La généralisation sur le terrain pourrait alors intervenir à partir 2014 avec ''d'abord 100.000 compteurs puis 1 million'', a-t-il estimé.