
Depuis, fortes de la jurisprudence, plusieurs dizaines de procédures judiciaires ont été lancées. De son côté, Bouygues Telecom, débouté en appel, vient de décider de se pourvoir en cassation. Alors qu'un ''Grenelle des antennes'' est prévu le 23 avril prochain, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) a organisé le 6 avril, à l'initiative du député de la Somme Alain Gest (UMP), une audition publique rassemblant parlementaires, scientifiques, associations et opérateurs sur les dangers potentiels des téléphones mobiles.
Rappelons qu'Alain Gest a été chargé le 4 février 2009 par l'OPECST d'une étude sur ''les conséquences éventuelles sur la santé de la téléphonie mobile''. A l'ouverture de cette audition, le Président de l'Assemblée Nationale Bernard Accoyer a souligné le contraste entre la place importante prise par la téléphonie mobile en France et l'inquiétude d'une certaine fraction de la population devant la multiplication des antennes souvent perçue comme anarchique. Alors que des études ont montré l'innocuité des antennes relais, ces inquiétudes concernent le risque de développement de cancers et de troubles fonctionnels, tels que les difficultés d'attention, les troubles de l'humeur ou du comportement, a-t-il expliqué.
Polémique autour de l'impact sanitaire des champs électromagnétiques
Cette audition publique a de nouveau illustré les divergences de points de vue entre les parties prenantes. Si les associations estiment que les normes de rayonnements électromagnétiques doivent être revues à la baisse et que les enquêtes épidémiologiques sont insuffisantes, les experts scientifiques affirment qu'en l'état actuel des connaissances, aucun risque sanitaire n'a été mis en évidence. Ainsi, pour le Professeur André Aurengo, chef de service à l'hôpital Pitié-Salpêtrière, les effets associés à l'exposition aux antennes relais étaient soit faibles, soit inexistants. S'agissant de l'électrohypersensibilité, le professeur considère que les maux invoqués par certaines personnes étaient de nature psychosomatique. Une position partagée par le Docteur Eric van Rongen, membre du conseil de santé des Pays-Bas mais aussi le Professeur Denis Zmirou-Navier, professeur à la faculté de médecine de Nancy.
En revanche, contestant ces analyses, le Docteur Pierre Souvet, président de l'association santé environnement de Provence (ASEP), a notamment souligné la nécessité de prendre en compte la pollution permanente subie du fait de l'exposition aux antennes relais. Plusieurs membres de l'association Robin des toits ont notamment cité des études mettant en avant des troubles pour la santé. De nombreuses études ont établi des effets biologiques des ondes sur les protéines de stress, le système immunitaire, les marqueurs d'inflammation et sur la mélatonine, une hormone impliquée dans le cycle veille/sommeil, a ajouté Pierre Souvet. De son côté, Stephen Kerckhove, délégué général d'Agir pour l'environnement, a plaidé en faveur d'un débat public plus transparent, reposant davantage sur le doute et l'incertitude et débouchant sur des décisions de fond. En effet, on l'aura compris : les pours et les contres ne sont pas prêts de s'entendre!
Vers un abaissement des normes?
L'ASEP et Agir pour l'environnement réclament, au nom du ''principe de précaution'', un abaissement de la norme à 0,6 volts par mètres (au lieu des 41 volts/ mètre actuels). Le Conseil de Paris demande également au gouvernement que les normes nationales d'exposition soient reconsidérées, notamment en zone dense, dans un vœu adopté par le Conseil le 7 avril.
Mais du côté de l'Union européenne, le Chef d'unité à la Direction générale de la santé et de la consommation de la Commission européenne, Bernardo Delogu, présent lors des tables rondes, a rappelé que l'UE n'envisageait pas de réviser la recommandation des valeurs limites soumises aux états membres, estimant qu'il n'existait pas d'éléments scientifiques de nature à justifier leur révision. Le 2 avril, le Parlement européen a pourtant adopté une résolution en faveur de la révision du seuil actuel et de la reconnaissance de l'électro-hypersensibilité comme handicap.
Quoi qu'il en soit en France, le 23 avril, le ''Grenelle'' des antennes relais devrait permettre de faire un nouveau point sur les connaissances scientifiques ainsi que sur les réglementations en vigueur, a précisé le Ministère de la santé. Une synthèse utile sachant que les études scientifiques se succèdent et restent contradictoires.
La dernière en date est celle de Jean-François Viel, chercheur au CNRS, publiée le 30 mars sur le site de la revue ''Occupational and environmental medicine'', qui souligne qu'il ne suffit pas de s'éloigner de l'antenne pour être hors de sa portée. Le taux d'exposition aux ondes serait plus fort à environ 280 mètres de distance en zone urbaine et à un kilomètre en zone périurbaine, que lorsque l'on est situé en dessous.