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Dans les Alpes, l'agropastoralisme serait le premier marqueur de l'Anthropocène

L'humanité n'a pas attendu la révolution industrielle pour dégrader radicalement son environnement. Des chercheurs datent l'accélération de l'érosion du sol à la Préhistoire, sous l'influence de l'agropastoralisme.

Agroécologie  |    |  F. Gouty
Dans les Alpes, l'agropastoralisme serait le premier marqueur de l'Anthropocène

L'être humain a commencé à impacter durablement son environnement avant même l'avènement de l'Anthropocène. Un nouvel exemple en est donné avec l'érosion des Alpes dans une étude (1) menée par des anthropologues, écologues et géologues français, et publiée le 10 février dans la revue Nature Communications.

Bien qu'elle puisse se produire naturellement, l'érosion du sol (et de ses écosystèmes) est une des principales conséquences des activités humaines, qui l'accentuent à force de le cultiver ou de l'artificialiser. Cet érosion entraîne, quant à elle, une perte du substrat naturel nécessaire à la végétation et donc à l'alimentation humaine comme animale et limite la capacité du sol à retenir le dioxyde de carbone (CO2) de l'atmosphère.

L'impact de l'agropastoralisme

Les chercheurs ont tenté de déterminer à partir de quel moment cette érosion s'est produite principalement sous la pression des activités humaines. Pour cela, ils ont effectué un carottage des couches sédimentaires accumulées sous le lac du Bourget, au nord de Chambéry (Savoie), en 2018 et 2019. « Les Alpes présentent actuellement le plus fort rythme d'érosion de tout le continent européen, expliquent les chercheurs. Et les variations climatiques de cette région sont parmi les plus documentées au monde, ce qui en fait un cas idéal pour quantifier l'impact du climat et des activités humaines sur l'érosion du sol. » En plus de l'analyse et de la datation des carottes, les chercheurs ont également étudié l'ADN environnemental et les pollens fossiles en provenance de huit autres lacs à l'intérieur ou autour du bassin versant du Bourget pour mesurer l'ampleur des activités agricoles et pastorales dans la région. Car, d'après eux, l'agropastoralisme est le premier marqueur de cette érosion anthropique du sol.

Après avoir analysé l'équivalent de 10 000 ans d'histoire sédimentaire, les scientifiques sont arrivés à identifier l'instant recherché. « Le taux d'érosion reste faible et relativement constant entre 9 440 et 4 880 avant aujourd'hui, et s'accélère une première fois (pendant huit cents ans) durant une courte période, dite "néoglaciaire" plus humide et froide, qui a conduit les glaciers alpins à avancer en montagne et à éroder le sol. Puis, à partir de 3 860 ans avant aujourd'hui, le rythme d'érosion a continué de s'accélérer sans lien avec le mouvement des glaciers. » D'autant que cette accélération correspond immanquablement aux évolutions agropastorales. L'arrivée des premiers cheptels ovins dans les alpages de haute altitude, il y a environ 3 600 ans, a été le premier coup d'accélérateur. L'explosion agricole à la fin de l'Antiquité en pied de montagne et sa mécanisation, avec l'introduction de la charrue au début de la Renaissance, en ont été d'autres. Cependant, depuis le début de l'époque moderne, cette accélération de l'érosion naturelle du sol a perdu en intensité localement, avec l'abandon progressif des alpages et des cultures, laissant de nouveau la place à des forêts.

Un Anthropocène plus précoce ?

En somme, concluent les chercheurs, « les activités agropastorales ont multiplié par 2 à 2,5 fois le rythme d'érosion du sol dans les Alpes occidentales ». Pour eux, « de telles études sont indispensables pour tester l'hypothèse d'un impact précoce à grande échelle des activités humaines sur l'environnement, remettant ainsi en question l'hypothèse selon laquelle l'Anthropocène commencerait avec la révolution industrielle ».

1. Accéder à l'étude
https://www.nature.com/articles/s41467-024-45123-3

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