« Cette étude est porteuse d'un message d'une grande clarté : le changement climatique est la plus grande menace qui pèse sur les récifs mondiaux, et nous devons tous faire notre part en limitant au plus vite les émissions mondiales de gaz à effet de serre et en atténuant les pressions locales », prévient Paul Hardisty, directeur général de l'Institut australien des sciences de la mer (AIMS).
L'étude en question, publiée ce mardi 5 octobre, est le sixième rapport sur le statut des coraux dans le monde, réalisé à l'initiative du Réseau mondial de surveillance des récifs coralliens (GCRMN). Un réseau de scientifiques, de gestionnaires et d'organisations créé en 1998 et chargé de fournir les meilleures informations scientifiques disponibles sur l'état et les tendances des récifs coralliens en vue de leur conservation. Le rapport s'appuie sur 2 millions d'observations individuelles, réunies par plus de 300 scientifiques, sur plus de 12 000 sites de collecte répartis dans 73 pays situés dans dix régions coralliennes.
Augmentation de 20 % de la quantité d'algues
L'étude révèle que le monde a perdu près de 14 % du corail entre 2009 et 2018. « Soit une quantité plus importante que tout le corail vivant d'Australie », situent les auteurs de l'étude. Les épisodes de blanchiment des coraux dus à la hausse des températures de surface des mers ont été le principal facteur de disparition, même s'il en existe d'autres comme la surpêche, l'acidification des océans ou la pollution. Un pic de chaleur survenu en 1998 a, à lui seul, tué 8 % du corail mondial. L'étude établit plus globalement une corrélation entre les épisodes de disparition et des températures de surface des mers élevées.
Les scientifiques ont également étudié les changements intervenus dans la couverture en coraux durs vivants, indicateur de santé des récifs, et en algues, signal de stress subi par ces derniers. L'étude révèle une baisse de 9 % de la quantité mondiale de coraux durs depuis 1978 et une augmentation de 20 % de la quantité d'algues entre 2010 et 2019.
Ces chiffres sont inquiétants dans la mesure où les récifs coralliens sont des écosystèmes particulièrement riches qui abritent plus d'un quart des espèces marines, constituent une source de protéines très importante et entrent dans la composition de certains médicaments. Les chercheurs estiment à plusieurs millions le nombre de personnes qui en dépendent, que ce soit pour se nourrir, pêcher ou se protéger des tempêtes.
Des récifs capables de résilience
Le tableau brossé par cette étude n'est toutefois pas tout noir. « Certains récifs montrent une remarquable aptitude à rebondir, ce qui donne de l'espoir pour la reconstitution future des récifs dégradés », positive Paul Hardisty. Dans le Triangle de corail de l'Est asiatique, qui abrite environ 30 % des récifs mondiaux, la couverture en coraux durs a augmenté entre 1983 et 2009. Globalement, un rétablissement partiel de la couverture corallienne a été observé en 2019. « Cela indique que les récifs coralliens sont encore résilients : avec la diminution des pressions qui s'exercent sur ces écosystèmes cruciaux, ils auront la capacité de se reconstituer, peut-être en l'espace d'une décennie, en récifs sains et riches semblables à ceux qui prévalaient avant 1998 », concluent les auteurs de l'étude.
« Les décideurs auront l'opportunité de démontrer leur leadership et de sauver nos récifs coralliens, mais cela ne sera possible que grâce à des décisions ambitieuses », prévient la directrice de cette organisation onusienne.