Vendredi 24 janvier, Eco-Emballages a publié le rapport d'observations définitives de la Cour des comptes sur la gestion d'Eco-Emballages et de sa filiale Adelphe. Le document tombe à point nommé pour Eco-Emballages. En effet, il apporte un soutien de poids à l'éco-organisme alors qu'un arbitrage gouvernemental attendu devrait être annoncé très prochainement en application de la clause de revoyure prévue lors du réagrément d'Eco-Emballage en janvier 2011. Au cœur de la bataille, l'augmentation – ou non – du soutien financier apporté par Eco-Emballages aux collectivités locales pour la gestion des déchets d'emballages.
Le document, qui, semble-t-il, circulait depuis le début de la semaine dernière, propose de "ne prévoir aucune enveloppe financière nouvelle au titre de la clause de revoyure". Il conseille plutôt de "veiller strictement à la corrélation entre l'augmentation des soutiens versés aux collectivités (…) et l'atteinte de l'objectif de 75 % en matière de recyclage".
De son côté, Amorce, qui représente une partie des collectivités, ne décolère pas. C'est "une tentative de déstabilisation" dénonce Gilles Vincent, président d'Amorce, ce mardi 28 janvier à l'occasion des 7èmes rencontres entre l'association de collectivités et les éco-organismes. "Quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage", a estimé pour sa part la sénatrice Evelyne Didier (CRC – Meurthe-et-Moselle), auteure d'un rapport d'information remis en novembre 2013 et consacré aux filières de responsabilité élargie du producteur (REP) et à l'écoconception.
Ne pas augmenter l'enveloppe financière
A l'issue d'un contrôle conduit entre novembre 2012 et juillet 2013 et portant sur les exercices 2007 à 2012, la Cour des comptes délivre un rapport qui fait figure de blanc-seing accordé aux entreprises de la grande consommation et de la distribution pour leur prise en charge des déchets d'emballages. "Une large part des objectifs fixés lors de la création de cette filière de responsabilité élargie du producteur a (…) été atteinte", estime la Cour.
Par ailleurs, la Cour critique une "augmentation significative" des prélèvements sur les entreprises qui ne se serait pas accompagnée d'une hausse du tri. Plus encore, elle remet ouvertement en cause l'objectif de 75 % de recyclage des déchets d'emballages ménagers qui "apparaît clairement hors d'atteinte à l'échéance prévue, d'autant que la détermination de cet objectif n'a pas été précédée d'une analyse approfondie de la part des pouvoirs publics".
En cause, le dispositif lui-même "qui fait peser sur les éco-organismes des obligations dont la réalisation dépend très largement de tiers (en l'espèce, les collectivités territoriales)". Pire, "cette situation paradoxale a été renforcée avec l'augmentation du taux de couverture des coûts (80%) attendu des éco-organismes à la faveur du dernier agrément".
Pour Amorce, l'affaire est entendue : "la Cour des comptes [donne] son quitus à l'éco-organisme et critique la gestion des collectivités".
Et la Cour de conclure que "les considérations qui précèdent militent fortement pour que la « clause de revoyure » de l'agrément actuel soit, dans sa dimension financière, sans impact en termes de contributions supplémentaires pour les entreprises adhérentes".
Une conclusion qui "[défend] au mot près les positions sur la clause de revoyure à coût nul pour les metteurs sur le marché".
Efficacité de la gestion des déchets
Malgré tout, la Cour constate que le dispositif d'Eco-Emaballages "atteint incontestablement un palier en termes d'efficacité et surtout d'efficience". Les sages de la rue Cambon jugent pourtant qu'"il ne serait pas judicieux d'en changer les fondements", même si certains aspects du dispositif mériteraient d'être révisés.
C'est en particulier le cas du calcul des coûts réellement supportés par les collectivités locales. "Il est indispensable désormais de rendre obligatoire, le cas échéant par une disposition législative, l'identification des coûts réels du service rendu par les collectivités, notamment par la généralisation d'une comptabilité analytique adaptée", estime le rapport.
La révision proposée par la Cour vise à identifier "les collectivités les plus efficaces en matière de gestion des déchets" et à lier la montée en charge du barème contributif à l'atteinte du taux de recyclage de 75%. En clair, les collectivités ne verront croître leur soutien que si le taux de recyclage progresse. C'est le "coup de grâce", dénonce Amorce.
La Cour suggère aussi deux autres modifications. Il s'agit en premier lieu d'améliorer et développer la communication en direction des consommateurs, notamment parce que "de nombreux messages n'ont que très partiellement atteints leur cible, soit parce qu'ils étaient ambigus, soit parce qu'ils étaient contestés". Elle propose aussi de fusionner Eco-Emballages et Adelphe au motif que la concurrence entre les deux entreprises est "très largement fictive". La présence d'Eco-Emballages dans le capital d'Adelphe, à hauteur de 85%, plaide aussi en ce sens.