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La nouvelle liste nationale des espèces « nuisibles » est en consultation

Le ministère de la Transition écologique s'apprête, de nouveau, à classer quatre mammifères et cinq oiseaux dans la liste des espèces «nuisibles ». Les services rendus par ces espèces ne semblent pas pris en compte dans ce classement.

Biodiversité  |    |  L. Radisson
La nouvelle liste nationale des espèces « nuisibles » est en consultation

« Ce classement n'a pas pour but d'éradiquer les espèces concernées, mais bien de les réguler afin de limiter les perturbations et les dégâts qu'elles peuvent provoquer notamment sur la faune, la flore, les activités agricoles ou les propriétés privées. » C'est ainsi que le ministère de la Transition écologique présente le projet d'arrêté (1) , soumis à la consultation du public (2) jusqu'au 6 juillet prochain, qui fixe la liste, les périodes et les modalités de destruction des espèces susceptibles d'occasionner des dégâts (Esod). Autrement dit les animaux qui étaient qualifiées de « nuisibles » jusqu'à la loi reconquête de la biodiversité de 2016.

« La nouvelle terminologie « d'espèces susceptibles d'occasionner des dégâts » (Esod) n'a pas été suivie du changement de paradigme qu'aurait apporté un minimum de rigueur scientifique et de résistance face au lobbying agricole et cynégétique », déplore Yves Vérilhac, représentant de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) au Conseil national de la chasse et de la faune sauvage (CNCFS). Cette instance a examiné le projet d'arrêté le 8 juin dernier.

Neuf espèces reconduites

Le texte reconduit pour trois ans la liste des espèces contenues dans l'arrêté précédent, qui datait de 2019. Celle-ci avait été prolongée en juin 2022 du fait de l'impossibilité de collecter l'ensemble des données nécessaires sur les dégâts occasionnés par ces espèces en raison de la crise sanitaire. Figurent dans cette liste les espèces suivantes : belette, fouine, martre, renard, corbeau freux, corneille noire, pie bavarde, geai des chênes, étourneau sansonnet. Seul le putois ne figure plus dans cette liste suite à une décision du Conseil d'État de juillet 2021 qui l'en avait écarté à la demande de plusieurs associations de protection de la nature.

Cette liste s'ajoute à deux autres groupes d'Esod : les espèces non indigènes susceptibles d'occasionner des dégâts sur l'ensemble du territoire métropolitain, classées par un arrêté ministériel pérenne, et des listes complémentaires définies par des arrêts préfectoraux annuels. Les espèces visées par ces textes sont la bernache du Canada, le chien viverrin, le ragondin, le rat musqué, le raton laveur et le vison d'Amérique.

“ Une espèce n'est pas nuisible par nature mais peut, ponctuellement, causer des dommages aux activités humaines. ” Yves Vérilhac de la LPO
« Lorsqu'une espèce est classée Esod, les modalités de destruction sont renforcées, permettant notamment sa destruction à tir ou par piégeage en dehors des périodes d'ouvertures de la chasse, pour la protection des intérêts ayant conduit à son classement (ex : classement du renard pour la protection des élevages avicoles) », rappelle le ministère de la Transition écologique. Selon la jurisprudence du Conseil d'État, le classement peut se justifier selon deux critères. En premier lieu, du fait que l'espèce porte atteinte de façon significative (dégâts supérieures à 10 000 €) à la santé et à la sécurité publiques, à la protection de la faune et de la flore, aux activités agricoles, forestières et aquacoles, ou à d'autres formes de propriété. En second lieu, que l'espèce soit répandue de façon significative (500 prélèvements par an) et que sa présence soit susceptible de porter atteinte à ces intérêts, compte tenu des caractéristiques locales.

Le texte précise les modes de prélèvement autorisés pour chaque espèces. Toutes peuvent être détruites à tir ou par piégeage, hormis le renard qui peut également être déterré. L'arrêté indique la liste des espèces classées dans chaque département, ainsi que la liste des cantons ou communes concernés lorsque l'autorisation ne porte pas sur l'ensemble du département.

« Rôle d'auxiliaire pour l'agriculture et la santé »

Ce projet de texte ne laisse pas indifférent les Français puisque près de 10 000 contributions étaient déjà mises en ligne sur le site de la consultation quatre jours après son lancement. Il faut dire que de nombreuses associations de protection de la nature sont mobilisées contre ce texte. En mai dernier, six d'entre elles (3) livraient les conclusions d'un sondage commandé à l'Ifop qui révélait que 65 % des adultes interrogés contestaient le classement en Esod des espèces considérées. Elles pointaient l'absence de prise en considération de « la place occupée par ces espèces dans les écosystèmes, ni le rôle d'auxiliaire qu'elles peuvent jouer pour l'agriculture et la santé ».

« Une espèce n'est pas nuisible par nature mais peut, ponctuellement, en certains endroits et dans certaines conditions, causer des dommages aux activités humaines (…). Non seulement ce concept d'Esod n'a rien changé à la classification passée de « nuisible », mais il a introduit une confusion : toutes les espèces sont susceptibles d'occasionner des dégâts, y compris et en premier lieu une espèce gibier comme le sanglier, mais aussi les espèces protégées telles que les oiseaux piscivores comme le cormoran, ou les grands prédateurs comme le loup », explique Yves Vérilhac.

Les associations de protection de la nature estiment également que les services rendus par ces espèces ne sont pas pris en compte. « Ne considérer que les potentiels dommages créés par des espèces, sans tenir compte des nombreux services rendus, équivaudrait à demander à une entreprise de présenter un bilan financier en affichant uniquement les dépenses, pas les recettes », a expliqué un scientifique devant le CNCFS, rapporte Yves Vérilhac. « De plus en plus d'études scientifiques montrent pourtant les services nombreux rendus par des espèces comme le geai des chênes, premier planteur d'arbres en France par les graines qu'il enfouit puis oublie, ou le renard qui consomme des milliers de rongeurs chaque année », ajoute l'ancien directeur général de la LPO.

Déclarations de dégâts collectées par les fédérations de chasse

Les associations contestent également la méthode de classement retenu reposant essentiellement sur des déclarations de dégâts collectées par les fédérations de chasseurs. En juillet 2021, alors que le renouvellement de l'arrêté se profilait avant que le Gouvernement décide son report, la Fédération nationale des chasseurs appelait à une remobilisation. « Si vous ne déclarez pas les dégâts occasionnés, vous ne pourrez plus les détruire ! », alertait-elle à l'attention des fédérations départementales.

« Les dégâts déclarés sont rarement vérifiés, les alternatives non létales ne sont quasiment pas mises en œuvre ni même envisagées, l'efficacité de la destruction [des animaux] n'est pas démontrée, et leur importance dans le fonctionnement des écosystèmes naturels n'entre pas en ligne de compte », explique la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO). « Les fédérations départementales de chasseurs ont tout intérêt à chasser après la date de fermeture et à protéger a priori les futurs millions de cocottes d'élevage (faisans, perdrix…) relâchées la veille de l'ouverture », explique Yves Vérilhac.

Ce dernier avance également un argument juridique à la reconduction du dispositif. « La réalité juridique est que les espèces sauvages n'étant la chose de personne (res nullius), elles ne sont pas "assurables" », rappelle le représentant de la LPO. Ce qui expliquerait pourquoi des méthodes alternatives à la destruction des animaux à l'origine de dégâts ne soient pas testées. « Quelle assurance accepterait de rembourser année après année des dommages identiques causés à des particuliers sans qu'aucune mesure de protection ne soit mise en place ? », interroge M. Vérilhac.

1. Télécharger le projet d'arrêté
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-42005-projet-arrete-nuisibles-esod.pdf
2. Accéder à la consultation
https://www.consultations-publiques.developpement-durable.gouv.fr/projet-d-arrete-pris-pour-l-application-de-l-a2864.html
3. Aspas, Humanité et biodiversité, LPO, SFEPM, Société herpétologique de France, SNPN

Réactions8 réactions à cet article

Cette année pour la première fois des corbeaux se sont installés dans notre jardin. Il y a aussi des pies (ils se battent entre eux) et des oiseaux de proie de jour et de nuit.
Et bien sûr des hirondelles dans les granges et divers petits oiseaux, plus des geais. j'oublie les nombreux pigeons et tourterelles.
Il faut dire qu'on met de l'eau pour abreuver, des raines en hiver, des restes de pain ... bien sûr les cerises, nous ne comptons pas dessus.
Disparition des mares, des haies, des arbres, etc... sècheresse, produits chimiques dans les champs.
Ne nous plaignons pas, c'est nous qui détruisons !

28plouki | 20 juin 2023 à 09h33 Signaler un contenu inapproprié

Bonjour,
Est-ce que le Ministère a aussi prévu de mettre l'Homme comme espèce nuisible ?
Bonne journée

Bibi Fricotin | 20 juin 2023 à 09h47 Signaler un contenu inapproprié

Malheureusement, il semble qu ce soit une solution, pas sympa pour nos enfants.
Il faudra que la planète, au vu des dangers grandissants, s'organise. Les choix sont devant nous.
Guerres à outrance, Nouvel Age, les auteurs de science-fiction ont envisage des solutions.
Il faudra cocher la bonne case, pas simple.

28plouki | 20 juin 2023 à 12h54 Signaler un contenu inapproprié

La LPO a pour habitude d’être opportuniste. prenons l'exemple du loup:
La LPO pour obtenir pour obtenir des aides financières pour l'achat d'un troupeau et tout ce qui va avec : "Le pastoralisme est aujourd'hui considéré comme une solution durable a l'entretien des milieux en faveur de la biodiversité".

La LPO pour obtenir des financements pour luter en faveur du loup :"Écologiquement, la montagne n’a pas besoin de moutons Les éleveurs ont besoin d’alpages, mais l’inverse n’est pas vrai. L’idée que le bétail serait utile pour " entretenir " la montagne renvoie à une image symbolique de celle-ci, mais ne correspond à aucune réalité biologique ou écologique."

En réalité : Les Alpes qui tiennent leur nom des alpages (et non l'inverse) sont un exemple de réalité écologique et biologique. CNRS : "En France, 84 % des surfaces classées en "haute valeur naturelle " correspondent à des zones d'élevage en plein air "

ouragan | 20 juin 2023 à 22h00 Signaler un contenu inapproprié

Alpes : je n'ai pas bien compris le truc de la LPO. Ils veulent des loups, ou pas de loups ? Des subventions, ils en veulent, oui.
Le hasard veut qu'un de vieux copains de jeunesse, disparu, ait été le fonctionnaire responsable des loups et surtout l'introducteur des ours.
J'ai toujours été perplexe, c'est quand même dangereux.
Mais il était dès l'enfance acharné sur la liberté, pour lui donner la liberté aux loups et aux ours était sacré.
Et comme il avait le pouvoir en tant que haut-fonctionnaire, il l'a pris.
C'était son caractère, défenseur des opprimés, tout les autres étaient des oppresseurs sauf lui, vers 1960...
C'était le temps des guerres coloniales...

28plouki | 21 juin 2023 à 10h10 Signaler un contenu inapproprié

Ouragan, ou l'obsession monomaniaque du Loup et de l'anti-écologisme primaire, quitte à nous répéter à longueur de post inlassablement les mêmes phrases, mot pour mot... Cas d'école de névrose obsessionnelle !
C'est exactement pour ce type de profil "client" que ces arrêtés scélérats du ministère soit disant "de la Transition écologique" - j'y vois plutôt ici pour ma part un ministère "de la Continuité démagogique" - sont rédigés. Niveau zéro scientifique et économique (le seul chiffrage des "dégâts" est celui réalisé au doigt mouillé par les chasseurs et le milieu agricole productiviste, aucune prise en compte des avantages du Renard roux dans la consommation de rongeurs porteurs de tiques vectrices de la borréliose de Lyme par exemple et de tous les autres services rendus à l'Homme par les espèces cibles de l'arrêté) mais niveau maximal de clientélisme aussi éculé que cynique et d'illégalité.
La justice se chargera très probablement de le casser mais le mal sera fait pour des millions de bêtes sauvages. Il y a assurément beaucoup mieux à faire de la part de l’État. Pitoyable !

Pégase | 21 juin 2023 à 15h58 Signaler un contenu inapproprié

Surtout ce qui énerve le cheval ailé c'est qu'il ne faut pas mettre en contradictions les ONG lorsqu'elle se contredisent pour profiter de la manne financière.
Un coup le pastoralisme est bon pour la biodiversité (gling gling le tiroir caisse), un coup le pastoralisme est inutile pour la biodiversité (gling gling le tiroir caisse).

Ensuite la différence est aussi entre celui qui constate et participe et celui qui juge et stigmatise en vomissant sa haine. La "névrose obsessionnelle" qui consiste à vouloir systématiquement tout porter devant le tribunal devrait nous rappeler les années noires de notre histoire.

Il est facile pour celui qui ne subira jamais aucune contrainte physique, financière, morale et psychologique de vouloir imposer son mode de pensée.
Comme le disait Gavino Leda : ""quelle est la différence entre un extrémiste qui défend ses idées parce "qu'il culpabilise de s'apercevoir qu'il ignore sa condition de vie dans son rapport réel avec les choses qui la fondent et qui ne s'aperçoit pas qu'en somme il n'existe pas", et un extrémiste qui défend "sa vie en contact étroit avec la nature et pour qui il n'est pas loisible de se contredire et de la contredire, car il en mourrait"!"

l'anti-écologiste primaire était au Larzac avec José Bové, à Malville aussi et s'est installé en polyculture élevage en 1975 dans un ferme qui n'a jamais vu un gramme de pesticide ni d'engrais chimique.

ouragan | 21 juin 2023 à 17h56 Signaler un contenu inapproprié

Si notre journaliste préféré pouvait éclaircir le débat entre Pégase et Ouragan, je serai fort intéressé.
Il y a de part et d'autre des arguments puissants, forcément, mais je suis un peu dépassé, pourtant j'aimerais y voir clair.
Je lis aussi le journal de la fédération des chasseurs, qui donne sa version, je protège ce que je peux et les laisse s'entretuer, il faut le dire, c'est jour et nuit...
Pas simple.

28plouki | 22 juin 2023 à 09h30 Signaler un contenu inapproprié

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