Le bio à la portée de tous, c'est souvent le credo de la grande distribution. Pourtant, dans une enquête publiée mardi 29 août, UFC Que choisir démontre que derrière le slogan, "il y a une hypocrisie qui n'est pas tolérable". Selon Alain Bazot, président de l'association de consommateurs, "en matière d'achat de bio en grande distribution, le consommateur subit une double peine : sur le prix et sur la disponibilité des produits. Il est victime de surmarges disproportionnées et aberrantes".
Des marges plus importantes que sur les produits conventionnels
L'enquête a porté sur les prix des 24 fruits et légumes les plus achetés par les consommateurs français. Elle s'est appuyée sur les chiffres du Réseau des nouvelles des marchés (RNM), un service dépendant de FranceAgriMer, office agricole sous tutelle du ministère de l'Agriculture. "Nous avons suivi la moyenne des prix hebdomadaires sur un an", explique Olivier Andrault, chargé de mission alimentation.
Ce suivi confirme que le bio est plus cher que le conventionnel : 98% en moyenne. Mais avec des surcoûts très variables : de +27% pour le chou-fleur à +151% pour la pêche ! "Alors que le panier de produits conventionnels revient à 368€ sur une année, le panier bio atteint 660€, soit 292€ plus cher que le panier conventionnel (+79%)", souligne l'association.
Pour vérifier d'où provient une telle différence de prix, UFC Que choisir a comparé les prix à l'expédition, qui représentent les prix des produits après lavage, triage, calibrage et conditionnement (donc les prix d'achat par les distributeurs), et les prix en rayon. "Les prix à l'expédition (France uniquement) relevés sur le RNM confirment bien l'existence d'un surcoût significatif du bio au niveau agricole. On remarque des surcoûts très différents d'un produit à l'autre, allant de +18% pour les kiwis à +273% pour les oignons", indique l'étude.
Au stade de l'expédition, le surcoût du bio par rapport au conventionnel est de 111%. Mais une fois mis en rayon, ce prix aura encore augmenté de 191% dans certains cas ! Cette différence s'explique par la marge brute (charges et bénéfices) réalisée par le distributeur… "Elle vient doubler l'impact du surcoût agricole", analyse Olivier Andrault.
Et fait étonnant : en moyenne la marge réalisée sur les produits bio est 91% plus importante que celle réalisée sur les mêmes produits conventionnels. "Nous ne nous expliquons pas cette différence, note Alain Bazot. Les produits bio ne sont pas plus difficiles à manipuler, pas plus périssables…". D'autant que les marges les plus élevées sont appliquées aux produits les plus consommés, les tomates et les pommes. "Ces écarts sont inexplicables… Ils sont de +0,26€ par kilo pour le melon bio et de +2,06€/kg pour les poireaux bio, alors que le melon est plus fragile que les poireaux… Ces niveaux de marges sont irrationnels, inadmissibles et contreproductifs : en diminuant de moitié cette marge, la grande distribution augmenterait la consommation de produits bio", estime le président de l'UFC.

Des produits bio peu disponibles
La deuxième partie de l'étude portait sur la disponibilité de deux produits bio en grande surface : la pomme et la tomate, "deux produits incontournables du rayon fruits et légumes, pour lesquels les consommateurs français dépensent le plus". L'enquête, réalisée sur 1.541 magasins de 81 départements, montre là aussi que la grande distribution ne joue pas le jeu. Dans un quart des magasins prospectés, il n'y a ni tomate ni pomme bio. Dans 43% des magasins, il n'y a qu'un seul de ces deux produits disponible en bio. "Magasin U est le distributeur dont l'offre bio est la moins étoffée sur ces deux produits, suivi par Intermarché, Monoprix, Casino super et Carrefour Market". Auchan, Carrefour hyper et Cora se situent au contraire dans le haut du panier. Dans les magasins où ces produits sont disponibles, UFC note un moindre choix : quatre fois moins de variétés disponibles qu'en conventionnel. "Il y a un paradoxe : les consommateurs paient plus cher pour une offre indigente et très insatisfaisante", estime Robert Mondot, administrateur national d'UFC Que choisir. L'association promet de suivre ce sujet de près et attend des améliorations concrètes.