La commission Environnement du Parlement européen a adopté ce jeudi 11 juillet, en première lecture, le projet de rapport présenté en avril dernier par l'eurodéputée Corinne Lepage (ALDE) proposant de limiter le taux d'incorporation des agrocarburants de première génération (biodiesel et bioéthanol) en Europe, produits à partir de cultures alimentaires et énergétiques. Ce rapport a été adopté par 43 voix pour, 26 contre et 1 abstention. Il propose de prendre en compte les émissions liées au changement d'affectation des sols indirect (CASI dit facteur Iluc) dans le calcul des réductions d'émissions de gaz à effet de serre attribuées aux agrocarburants.
Les députés de la commission Environnement soutiennent un taux d'incorporation d'agrocarburants de première génération qui "ne doit pas dépasser 5,5% de l'énergie finale consommée dans les transports en 2020". La Commission européenne avait initialement proposé en octobre 2012 un plafonnement à 5% pour le calcul des objectifs des 10% d'énergies renouvelables (EnR) dans les transports en 2020 et un "reporting" des émissions liées au changement d'affectation des sols.
"Les Etats membres doivent faire en sorte que la part de l'énergie renouvelable dans les transports compte pour au moins 10% de leur consommation finale en 2020", appellent les députés.
Les parlementaires veulent en revanche promouvoir les agrocarburants "avancés" de seconde génération produits à partir d'autres sources, comme les algues ou certains déchets de matières premières, et les "accélérer".Ces agrocarburants avancés devront représenter pas moins de 2% de la consommation en 2020 dans les transports, chiffrent-ils. "Cependant, ce développement ne devra pas priver d'autres secteurs de matières premières, déstabiliser la politique européenne en matière de déchets, de forêt, ou avoir un impact négatif sur la biodiversité", prévient la commission Environnement. Afin "d'assurer une meilleure présence des véhicules électriques sur le marché", l'électricité produite à partir d'énergies renouvelables devra également compter pour 2% de la consommation globale d'énergie dans les transports en 2020, ajoutent les députés.
"Des compromis" proposés aux industriels en session plénière
Ce rapport doit être encore approuvé en session plénière du Parlement en septembre. "Je me félicite que la commission Environnement ait décidé de traiter le problème des émissions de gaz à effet de serre liées au changement indirect d'affectation des sols en les intégrant dans la législation, de plafonner la première génération et de promouvoir les agrocarburants avancés", a déclaré la rapporteure Corinne Lepage, à l'issue du vote. "Je pense cependant qu'il faut laisser du temps à l'industrie pour s'adapter et je proposerai des compromis dans ce sens en session plénière", a-t-elle assuré.
Alors que la commission de l'industrie, de la recherche et de l'énergie (ITRE) du Parlement européen a proposé le 20 juin un plafonnement à 6,5% des agrocarburants de première génération, les industriels dénoncent la prise en compte du CASI dans ce rapport "qui attribue au biodiesel un très mauvais bilan environnemental", a fustigé le groupe français d'oléagineux Sofiprotéol dans un communiqué. "La mesure de ce facteur Iluc ne repose actuellement sur aucun consensus scientifique. Il s'appuie essentiellement sur une étude américaine, celle de l'Ifpri, contestée par de nombreux scientifiques et dont l'auteur lui-même a récemment souligné la fragilité. Le vote de la commission Envi constitue un mauvais signal pour les industriels, alors que la filière du biodiesel a investi en France 1 milliard d'euros et créé près de 20.000 emplois", a déploré Jean-Philippe Puig, directeur général de Sofiprotéol. "L'orientation des débats sur les biocarburants dissuade les industriels d'investir, faute de stabilité de l'environnement réglementaire européen", a-t-il ajouté.