L'arrêté du 28 novembre 2003, qui fixe les conditions d'utilisation des insecticides et acaricides à usage agricole en vue de protéger les abeilles et autres insectes pollinisateurs, sera prochainement modifié, a indiqué Stéphane Le Foll dans une réponse écrite, publiée le 31 juillet au Journal officiel. Le ministre de l'Agriculture avait été interpellé sur les risques que représentent les néonicotinoïdes pour les abeilles (1) , par le député François-Noël Buffet (UMP, Rhône). Le nouvel arrêté devrait prendre en compte l'avis publié par l'Anses en mars 2014.
Celle-ci, saisie par le ministère de l'Agriculture, indiquait que le principal paramètre à prendre en compte pour protéger les abeilles domestiques (2) , notamment à proximité des cultures attractives (phacélies, colza), était la luminosité. Ainsi, "afin de garantir un délai suffisant entre l'application et le début de l'activité de butinage des abeilles domestiques, les traitements phytopharmaceutiques bénéficiant d'une dérogation à l'interdiction de traitement, ne peuvent être appliqués ni en fin de nuit ni tôt le matin". Elle préconisait donc que, "quelque soit la culture concernée", ces traitements "ne puissent être appliqués qu'aprèsl'heure de coucher du soleil telle que définie par l'éphéméride et dans les trois heuressuivantes, dans des conditions permettant d'assurer la sécurité et la santé des opérateurs". En revanche, l'Anses alertait sur le fait que ces mesures de précaution étaient susceptibles de ne pas être efficaces pour les autres pollinisateurs (bourdons et abeilles sauvages).
Réévaluation des risques de plusieurs néonicotinoïdes
Le ministre rappelle par ailleurs que trois néonicotinoïdes (clothianidine, imidaclopride et thiaméthoxam) ont été suspendus à l'échelle européenne et qu'une réévaluation du risque des produits contenant de l'acétamipride ou du thiaclopride sera "conduite dans le cadre du réexamen général de l'approbation de ces substances au niveau européen". Les lignes directrices de l'évaluation du risque des produits phytopharmaceutiques (3) , publiées en juin 2013 par l'Efsa, ont été renforcées. Elles prennent désormais en compte, "de manière plus large, le risque pour les abeilles domestiques et certains pollinisateurs sauvages, au-delà du seul risque oral aïgu pour les abeilles domestiques". Pour cela, "un programme européen de financement dédié au développement et à l'évaluation de méthodes de tests nécessaires à son application pourrait être mis en place", indique le ministre.
Les VTH, pas responsables du déclin des abeilles ?
Le député UMP Louis Nègre (Alpes Maritimes) voulait quant à lui connaître la position du ministre sur le colza "tolérant aux herbicides de post-levée" (4) qui, selon lui, permettrait de maintenir la production de colza en France. Par ailleurs, l'élu estime que cette plante joue "un rôle majeur dans l'économie apicole".
Les variétés tolérantes aux herbicides (VTH) sont obtenues "soit en exploitant la diversité génétique existante, soit en provoquant des modifications génétiques par mutagénèse qui conduisent à introduire le caractère dans la variété", rappelle en premier lieu Stéphane Le Foll. Selon lui, si peu d'études ont été menées pour évaluer les effets directs ou indirects de ces variétés sur les abeilles, "les données disponibles à ce jour indiquent notamment que la famille herbicide des imidazolinones, appliqués sur les colza et tournesol appartenant à des VTH, ne présentent pas de toxicité directe pour les abeilles". Le ministre précise que "ces données ont été obtenues dans le cadre de la délivrance des autorisations de mise sur le marché des herbicides associés à ces VTH". En fait, le rôle néfaste de ces variétés serait indirect : en limitant les herbes et plantes non désirées sur la parcelle (les adventices), elles réduisent de fait "la ressource pour les pollinisateurs". Le ministre conclut de manière laconique : "Des leviers d'actions concrets pouvant conduire à une augmentation de la ressource en plantes mellifères sont indispensables. Leur mise en œuvre est prévue dans le plan de développement durable de l'apiculture".